Les germes
En cas de récidive fréquente, certaines étiologies sont à rechercher, débouchant sur des traitements efficaces. Les germes responsables de l'otite de l'enfant âgé de plus de 3 mois sont :
– Haemophilus influenzae non typable pour la plupart, sécréteur de bêtalactamases le plus souvent, donc résistant à l'amoxicilline ;
– streptocoque pneumoniae dont 60 % sont de sensibilité diminuée à la pénicilline ;
–Branhamella catarrhalis, amoxicilline résistant.
La symptomatologie de l'otite associe, avec une intensité variable, douleur d'oreille et fièvre. On évoque plus facilement une otite due à Haemophilus en cas d'otite peu douloureuse, peu fébrile, associée à une conjonctivite. L'otite à pneumocoque est volontiers très fébrile (température supérieure à 38,5 °) et douloureuse. Les complications des otites bactériennes sont sévères, plus rares actuellement mais encore possible avec le pneumocoque notamment.
L'OMA
Leur traitement doit être systématique chez l'enfant de moins de 2 ans. Seule l'OMA avec épanchement est pathologique. L'otite congestive ou tympan rouge ne doit pas être traité par antibiotique. L'enfant peut avoir un tympan rouge simplement parce qu'il pleure ou qu'il est fébrile.
Aux Pays-Bas, depuis plus de dix ans, l'attitude recommandée est de ne pas traiter d'emblée par antibiotique les OMA après l'âge de 6 mois et de se contenter d'un traitement symptomatique. L'antibiotique est prescrit en cas de persistance des symptômes au-delà de 48 heures ou en cas de survenue de complication. Ainsi, moins de 40 % des patients reçoivent une antibiothérapie, contre plus de 90 % en France ou aux Etats-Unis. A présent, en France, chez l'enfant de plus de 2 ans avec symptomatologie peu bruyante, on peut proposer un traitement symptomatique ; l'état de l'enfant est réévalué 48 à 72 heures plus tard, si besoin.
Les antibiotiques recommandés sont :
– amoxicilline-acide clavulanique (80 mg/kg/jour d'amoxilline) en 3 prises ;
– cefpodoxime, Proxétil en 2 prises ;
– céfuroxime, Axétil en 2 prises ;
– ceftriaxone.
50 mg/kg/jour en 1 fois en intramusculaire en cas d'intolérance digestive.
Dans le cas du syndrome otite-conjonctivite, le cefpodoxime-proxétil est le traitement de première intention.
En cas d'allergie aux pénicillines, on peut prescrire cefpodoxime Proxétil ou céfuroxime Axétil.
En cas de contre-indication aux bêtalactamines, chez l'enfant de moins de 6 ans, on proposera érythromycine-sulfafurazole et chez l'enfant de plus de 6 ans, la pristinamycine.
Les macrolides n'ont aucune indication dans l'otite de l'enfant.
La paracentèse est indiquée chez le nourrisson en cas d'otite hyperalgique et pour documenter des échecs du traitement antibiotique. En cas d'échec, on prescrit l'amoxicilline à forte dose (150 mg/kg/jour en 3 prises pendant 10 jours) ou la ceftriaxone (50 mg/kg/jour pendant 3 jours) à adapter aux résultats de l'antibiogramme. La durée du traitement est généralement de 8 à 10 jours chez l'enfant de moins de 2 ans et de 5 jours après cet âge.
Otites récidivantes
On parle d'otites récidivantes quand un enfant de moins de 1 an fait plus de 3 otites en 6 mois (situation fréquente pour les enfants en crèche) et plus de 6 otites par an chez les enfants plus grands.
Ces otites répétées sont plus fréquentes chez les enfants suçant une tétine, gardés en collectivité et exposés au tabagisme passif.
A l'interrogatoire, on recherche aussi des antécédents d'asthme et d'infection broncho-pulmonaire, pathologies souvent associées.
Ces otites moyennes aiguës récidivantes nécessitent de rechercher une étiologie, tout au moins un ou des facteurs favorisants (du plus facile au moins facile à traiter) : la carence en fer est un facteur reconnu de susceptibilité aux infections ORL ; l'hypertrophie des végétations adénoïdes est classique ; le reflux gastro-oesophagien (RGO) est souvent peu recherché et pourtant cause indéniable d'otites récidivantes. On retrouve souvent des laryngites récidivantes, des rhinosinusites associées ; l'allergie ; plus rarement, un déficit immunitaire où les infections ORL sont rarement isolées. Cependant, l'enfant de plus de 5 ans avec otites récidivantes seules doit avoir un bilan immunitaire.
Bilan
Le bilan à proposer comporte :
– numération formule (avec taux d'hémoglobine et volume globulaire moyen) ;
– bilan allergologique avec trophatop ou FX5 et phadiatop chez le moins de 3 ans ; phadiatop chez le plus de 3 ans ; prick-tests d'emblée chez le plus de 7 ans ;
– radiographie de cavum de profil (espace entre les végétations et les fosses nasales et entre les végétations et le voile) ;
– immunoglobulines ;
– pHmétrie des 24 heures ;
– ces deux derniers examens peuvent être remplacés par une fibroscopie ORL qui permet de voir les végétations et de rechercher des signes indirects de reflux. Cet examen peut être réalisé au cabinet de l'ORL sans difficulté à distance du repas. Il montre la situation et le volume des végétations adénoïdes et un aspect érythémateux des aryténoïdes signes de RGO ;
– plus rarement, bilan immunitaire plus approfondi : sous classe IgG, IgE, sérologies postvaccinales : diphtérie, polio, hémophilus, pneumocoque, étude de la phagocytose.
En cas d'allergie, un traitement pendant 3 mois par anti-H1 est efficace le plus souvent.
En cas de RGO, un traitement par anti-H2 pendant 6 semaines (voire plus si nécessaire) permet une diminution des épisodes infectieux.
Les classiques mucorégulateurs et les immunomodulateurs n'ont jamais fait preuve d'aucune efficacité. Ils sont inutiles en cas d'otites récidivantes.
Prévention des complications
La vaccination doit être complète et respecter le plus possible le calendrier vaccinal, notamment pour la prévention des otites à pneumocoque (germe de plus en plus résistant posant des problèmes thérapeutiques). Le vaccin antipneumo- cocique conjugué heptavalent recommandé depuis 2006 chez tous les nourrissons doit être réalisé dès l'âge de 2 mois, puis 3 et 4 mois avec rappel plus tôt vers 12-14 mois.
En effet, ce vaccin diminue le nombre d'otites, notamment les otites très symptomatiques, les otites récidivantes et les échecs thérapeutiques. Le vaccin antihémophilus n'est pas efficace sur la prévention des otites (hémophilus non typable), mais seulement sur la prévention des méningites et des épiglottites liées à l'hémophilus de type b (disparition de ces pathologies grâce à cette vaccination).
Bilan des cas d'otites récidivantes
NFS ; trophatop ou FX5, phadiatop, prick-tests selon l'âge ; immunoglobulines ; fibroscopie naso-pharyngée ou radio du cavum et pHmétrie.
Antibiotiques d'emblée
– Chez l'enfant de plus de 3 mois et de moins de 2 ans ;
– Chez l'enfant de plus de 2 ans avec symptomatologie bruyante ;
– otite perforée quel que soit l'âge.
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