Journées dermatologiques de Paris
6-10 décembre 2005 - Paris
Comme le rappelle le texte de la conférence de consensus sur la prise en charge de la dermatite atopique de l’enfant (1), cette affection «correspond au développement d’une réponse immunitaire inflammatoire survenant sur un terrain génétique prédisposant qui s’accompagne d’anomalies de la barrière cutanée ». Les mécanismes physiopathologiques de la dermatite atopique ne sont pas complètement élucidés. Ils peuvent néanmoins être analysés sous trois aspects : prédisposition génétique, facteurs immunologiques et, enfin, anomalies de la barrière épidermique, celles-ci pouvant être constitutives ou induites.
Une dermatose inflammatoire chronique.
La dermatite atopique est actuellement considérée comme « une dermatose inflammatoire chronique due à l’activation, dans la peau, de lymphocytes T spécifiques d’antigènes protéiques ». Les antigènes en cause « proviennent de molécules de notre environnement » ou « de molécules du soi » (2). Dans le premier cas, les allergènes des dermatites topiques sont extrinsèques et ces formes de la maladie sont associées à une augmentation des immunoglobulines E (IgE), dont le rôle physiopathologique semble alors être crucial. Dans cette situation, les tests cutanés, immédiats (prick-tests) ou retardés (Atopy Patch Tests), sont positifs. Dans le second cas, les autoantigènes sont caractéristiques des dermatites topiques dites intrinsèques.
Dans le cas des dermatites atopiques extrinsèques, une prédisposition génétique a été mise en évidence chez de nombreux enfants. Cette prédisposition concerne environ de 50 à 70 % des patients qui ont un parent au premier degré atteint d’une dermatite atopique, d’un asthme ou d’une rhinite allergique. Les anomalies constitutionnelles alors mises en évidence peuvent, en particulier, porter sur la sécrétion d’interféron gamma. En effet, cette cytokine exerce une action inhibitrice sur les lymphocytes T CD4 appartenant à la population Th2, impliqués dans la réponse immunitaire inflammatoire qui caractérise cette affection.
Les mécanismes ne sont pas tous élucidés.
Les chercheurs se sont également intéressés à l’interaction de l’immunoglobuline E avec son récepteur de haute affinité de type I (ou FceRI), lequel est exprimé sur les mastocytes et les cellules basophiles. Cette interaction est au c?ur de la réaction allergique. Les immunoglobulines E peuvent, en effet, réguler positivement l’expression de ces récepteurs. Cette régulation permet la fixation et l’internalisation de l’allergène par les cellules présentatrices de l’antigène.
Les immunoglobulines E sont synthétisées après interaction des lymphocytes B et Th2, sous la dépendance de nombreux facteurs, dont les interleukines 4 et 13. Des médiateurs, leucotriènes, prostaglandines et cytokines, sont secondairement synthétisés et libérés. Ils entretiennent l’inflammation. Ainsi la dermatite atopique extrinsèque réalise une forme de réaction d’hypersensibilité retardée qui met en jeu des lymphocytes et des cellules présentatrices d’antigènes.
Dans le cas de la dermatite atopique intrinsèque ou « non allergique », les tests cutanés aux pneumallergènes sont négatifs et les taux d’immunoglobulines E, normaux. Des autoantigènes ont été identifiés et le staphylocoque doré pourrait jouer un rôle dans son aggravation, voire dans son initiation. En outre, la modification des facteurs environnementaux dans les pays riches est à prendre en compte dans l’augmentation de la prévalence de la dermatite atopique dans la population de ces pays. La diminution de la pression infectieuse et la modification de la flore saprophyte, ainsi qu’un plus grand contact avec les allergènes, pourraient influencer la réponse immunitaire en favorisant la réponse des lymphocytes T CD4 qui appartiennent à la population Th2 ou en diminuant les capacités de régulation du système immunitaire inné.
Chez l’homme et les mammifères, le système immunitaire comporte des Toll-like Receptors (TLR), proches des récepteurs Toll mis en évidence chez la drosophile. Ils permettent la reconnaissance des agents pathogènes. Le polymorphisme génétique de ces récepteurs Toll-like serait susceptible d’exercer une influence sur la perception des signaux générés par des agents infectieux ou des ligands endogènes et, ainsi, potentiellement, contribuer aux mécanismes génétiques de l’inflammation et de l’allergie. Par ailleurs, des anomalies constitutives ou induites de la barrière épidermique rendent compte du prurit et favorisent la colonisation par divers micro-organismes.
D’autres cellules, comme les kératinocytes et des cellules dendritiques, les cellules de Langerhans et les Inflammatory Dendritic Epidermal Cells (Idec), semblent étroitement impliquées dans la physiopathologie de la dermatite atopique.
D’après la communication de F. Bérard (Lyon), J.-P. Lacour (Nice) et J.-F. Stalder (Nantes).
1. Prise en charge de la dermatite atopique de l’enfant. Conférence de consensus (texte court). Disponible en ligne sur le site de la Société française de dermatologie (sfdermato.org), liens « formation médicale » puis « Bonnes pratiques médicales ».
2. Hennino A., Bérard F., Nicolas J.-F., La dermatite atopique n’est pas une maladie allergique. « Presse Med » 2005 ; 34 (2) : 78-80.
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