ON DOIT A Martine Gozlan plusieurs livres sur le monde musulman qui font d'elle un excellent connaisseur. « Sunnites, chiites » est dans le droit fil de son travail antérieur dont « le Sexe d'Allah » aura été la fine fleur. Le livre contient, en gros, deux parties, l'une historique, l'autre contemporaine, la seconde expliquant la première de façon très didactique.
On y apprend en tout cas que la différence entre sunnites et chiites ne correspond à aucun schisme. Il ne s'agit pas d'une bataille de dogmes, comme celle qui oppose catholiques et protestants, mais d'une querelle d'individus : les proches du Prophète se sont divisés, après sa mort, au sujet de la répartition du pouvoir à une époque où la religion était tout, culture, moeurs, politique, économie et social. Les facteurs conjoncturels qui ont ouvert le fossé ont laissé dans le temps une cassure profonde au nom de laquelle ont été commises les pires atrocités.
Quand le lecteur est suffisamment imprégné de ces passions brûlantes qui finissent par fondre dans le sable, Martine Gozlan le plonge brutalement dans la guerre d'Irak où la haine inexpiable entre chiites et sunnites rend impossible tout projet national. Elle n'épargne personne, ni les uns ni les autres, ni les Américains, bien sûr, qui auraient dû la lire avant d'aller guerroyer en Mésopotamie pour y semer un immense désordre, ni le reste du monde arabe, en particulier l'Arabie sunnite et wahhabite, ni la Syrie, ni l'Iran, dont elle soupçonne le président, l'insupportable Mahmoud Ahmadinejad, de tirer la légitimité de ses idées et de son action de la conviction que l'imam caché, le messie musulman, ne reviendra sur Terre qu'après l'apocalypse ; celle-là même qui, étant inscrite dans les prédictions, l'autorise à envisager une guerre nucléaire contre Israël.
On en a des sueurs froides, tout en suivant, sans jamais s'en lasser, un récit magnifique, où les passions sont exaltées, où le rôle des femmes et leur beauté pèsent sur les décisions des hommes, où l'absolutisme religieux conduit à la plus implacable des cruautés et à l'élimination de l'autre, lequel est pourtant un frère, qui n'a rien de différent dans les gènes ou dans le sang. Comme, décidément, rien ne justifie les erreurs des chiites, des sunnites, des Saoudiens, des Israéliens, des Américains, on ne tiendra pas rigueur à Martine Gozlan d'avoir noté le « triomphe » et la « gloire » du Hezbollah dans sa guerre contre Israël, d'une façon quelque peu répétitive qui fait trop d'honneur à une bande de spadassins pétris de haine.
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