Madame la Ministre,
Loin des manifestations, des réactions épidermiques, des « positions » à tenir, il y a une urgence : comment, et avec l'aide de tous les acteurs de la profession, redéfinir la place et le rôle de la médecine générale en France ?
Cette « mission » que nous sommes amenés à remplir, est l'un des piliers de notre société : interface santé, prévention des risques et même équilibre moral de toute une population. Vous êtes informée, vous connaissez les craintes, les doutes, la fatigue, la sensation de perte d'identité de toute une profession. Nous attendons de vous la force de savoir redonner du sens, l'audace de proposer les réformes structurelles audacieuses, de permettre aux médecins d'être totalement mobilisés par leur mission : élan puissant porteur de nouvelles vocations.
Engageons ensemble les « État Généraux de la Médecine » en France.
Que faudrait-il pour qu'un médecin, s'installant devant son bureau, s'apprêtant à recevoir ses patients, puisse être à 100 % préoccupé par sa mission ? Un partenariat, efficace, total, confiant, avec ceux qui ont pour mission de s'occuper, avec performance et au juste coût, de la santé publique.
Ce partenariat pourrait prendre plusieurs aspects.
1. Mise au point d'un logiciel médical unique, identique, pour tous les médecins généralistes.
– C'est le point d'accroche fondamental. Pourquoi ? Facilité d'utilisation et de transmission pour les remplaçants, les médecins partant en vacances ou en retraite. Création de lieu de consultations dans les déserts médicaux avec médecins« tournants ».
– Possibilité d'accès à une partie du dossier, avec numéro codé, pour les patients ou les confrères (antécédents, examens paracliniques, imagerie, traitements suivis, directives des patients). C'est le Dossier médical partagé.
– Possibilité de transmission anonyme de toute une série d'informations capitales pour un suivi de santé publique (banque de donnée inégalable).
– Mise à jour régulière et maintenance par les autorités compétentes (partenariat politique, administratif et médical).
Ce logiciel doit comporter des modules qui rendront plus efficace les médecins et qui permettront des économies de santé non négligeables pour la collectivité.
– Ouverture du dossier patient sur fenêtre prévention: facteurs de risques, antécédents familiaux, âge, sexe, dépistages effectués… Il est possible, et totalement souhaitable, que le médecin généraliste redevienne totalement responsable de tout le volet prévention (cancers). Ce changement radical d'approche rendrait les patients et les médecins totalement responsables. Il mettrait fin aux dépenses souvent inutiles et mal ciblées des campagnes actuelles. Ce programme de prévention pourrait être à chaque instant évalué (télétransmission des données).
Dans ce logiciel :
– une base de données médicamenteuses efficace et ludique. Indications, contre-indications, interactions. Médicaments et grossesse, allaitement, glaucome… ;
– une base de données médicales complète (recherche par mots clés) qui permette au médecin d'être efficace dans ses décisions et prescriptions ;
– une base de données permettant de délivrer à chaque patient un document. (recommandations) concernant sa santé (suivi des anticoagulants, grossesse, diabète, asthme, attitudes diététiques, vaccinations, conseils d'hygiène de vie, etc.).
L'achat et les mises à jour d'un tel outil de travail seraient à la charge du médecin. Il y aurait certes un gros travail de mise au point (recueil des données des logiciels actuellement sur le marché/ hébergement/ sécurisation du système) mais les bénéfices attendus seraient considérables. Il faut souligner ici, que les médecins, télétransmettant par convention, régulièrement leurs données techniques de manière anonyme (codage), pourraient, si leur activité est inadaptée aux recommandations, avoir à en rendre compte à un médecin-conseil. Lui seul aurait accès à l'identité du médecin mis en cause. L'outil de travail étant installé, le patient et son médecin sont en confiance ... Mais le téléphone sonne…
Avoir les moyens d'embaucher un(e) secrétaire.
– C'est plus qu'un confort de travail, c'est une nécessité. Accueil des patients, saisies dans les dossiers, prise de rendez-vous, comptabilité… Autant de tâches indispensables qui sont un service rendu à la patientèle et qui dégagent le médecin des soucis administratifs et le rendent plus disponible et attentif à sa mission.
– Création d'emplois à la clé…
– Favoriser si besoin la création de cabinet de groupe.
La formation médicale continue devient obligatoire et facile à observer ...
Chaque mois, sera transmis au médecin, un document de synthèse, adapté aux besoins de santé publique, mis en forme par un partenariat médecins, autorités de santé. À la fin de ce document, quelques réponses à cocher, attestant de la bonne lecture, et renvoi du questionnaire. Fin du passage des salariés de la caisse qui se dérangent pour savoir si l'on a bien chatouillé les pieds de nos diabétiques ! Les médecins pourront aussi recevoir régulièrement par voie informatique leur profil de prescripteur, leur évaluation de performance. Si le partenariat est bâti sur la confiance les résultats seront probants.
Chaque assuré sera tenu, pour bénéficier de la couverture santé, de consulter une fois l'an pour un bilan général.
– Les médecins – et les assurés sociaux en seront prévenus – pourront par un canal privilégié, être en contact avec les médecins conseil afin de les alerter en cas de conduites anormales ou abusives.
– Une vaste campagne sera engagée afin d'expliquer à la population et aux assurances que plus un seul certificat médical obligatoire concernant la pratique sportive (marche, pétanque, zumba) ne sera délivré.
– La démarche de prévention et de faisabilité, avant de pratiquer un sport, devra être volontaire, exception faite de certains sports à risque (plongée sous marine par exemple)
– Discussion à avoir pour les autres certificats (absence scolaire, crèche, cantine)
– L'acte médical doit être utile.
Limitation et revalorisation de l'acte médical.
Propositions :
– Le nombre d'actes par médecin devrait être plafonné. En cela, le système testé par l'option « médecin référent » était vertueux. La population sera prévenue qu'il n'est plus possible d'aller consulter, pour un oui pour un non, un médecin qui doit limiter ses actes. Les médecins seraient plus attentifs à leur mode de fonctionnement (renouvellements ... Stop aux hémoglobines glycosylées obligatoires chez les diabétiques parfaitement équilibrés ... )
– Il devrait être possible, (là encore les usagers doivent en être informés), de mettre en place seulement deux types de consultations (simplification des tarifs, bébé, enfants, vieillards)
– La consultation simple et courte : 20 euros.
– La consultation longue, polypathologies, psychothérapie, pédiatrie, gynécologie avec acte technique, cardiologie, cancérologie, addictologie, etc. : 40 euros.
Bien sûr imposer un quota.
Un système incitatif, permettant au médecin de régler rapidement les questions simples et de s'installer, en contrepartie, dans un temps de consultation longue quand nécessaire.
Continuité des soins
Les médecins de ville s'engagent à la continuité des soins quelque que soit le motif de leur absence : maladie, vacances, départ en retraite. Confrère référent désigné, dossiers transmis. Avantage du logiciel unique et du code d'accès.
Tiers payant
Le tiers payant, s'il se révèle nécessaire, sera géré directement par les caisses d'assurance maladie.
Volet économique
- Création d'emplois.
- Rationalisation du système de soin (prescriptions d'examens biologiques, radios et autres, redondants, inutiles et dangereux).
- Sécurisation du parcours de soin (dossier actualisé et consultable, Diminution des accidents iatrogènes…)
- Diminution du nombre d'actes.
- Prévention efficace. (médecins/patients : responsables !).
- Économies d'échelle sur le système de prévention actuel (qui a déjà chiffré l'effet Hemmocult® ? Les médecins débauchés du privé et salariés, les secrétaires, les structures, les courriers de relance ... Sans compter ceux qui développent un cancer du côlon ou du sein et qui n'ont jamais reçu leur convocation au dépistage ... À qui vont-ils se plaindre ? Certes pas à leur médecin qui n'est plus responsable puisque c'est l'administration qui gère ! ).
- Économies sur initiatives inutiles : passage de salariés de la caisse chez les médecins.
- Sophia (les patients placent ces luxueux dossiers dans les oubliettes: « Mais docteur, vous faites déjà tout cela, c'est vous qui vous occupez de moi… »).
Il y aurait tant à dire, tant à faire…
C'est dans cet esprit, Madame la ministre, que je me permets de vous faire parvenir ma contribution à ces« États Généraux de la Médecine Générale ». que j’appelle de tous mes vœux.
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