La décision de traiter une hypertension artérielle ne devrait plus être fondée sur la notion de valeur anormale, comme c'était le cas lorsque le Joint National Committee on Detection, Evaluation and Treatment of Hypertension (JNC) a publié ses premières recommandations en 1977. Elle devrait actuellement s'appuyer sur la notion de risque cardio-vasculaire, comme c'est le cas dans les recommandations de l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) depuis 2000.
Selon les recommandations publiées en 2003 par la Société européenne d'hypertension artérielle, les facteurs de risque utilisés pour la stratification du pronostic cardio-vasculaire sont les chiffres tensionnels, l'âge, le tabagisme, les dyslipidémies, les antécédents familiaux et l'obésité abdominale.
Un autre paramètre très utile pour évaluer le risque individuel est toutefois fourni par l'étude des antécédents du patient. En effet, l'étude Progress a montré que les patients ayant le risque le plus élevé d'accident vasculaire cérébral sont ceux qui en ont déjà fait un. L'étude Europa a apporté la même démonstration pour l'infarctus du myocarde, le risque le plus élevé étant observé chez les malades ayant déjà un antécédent de nécrose.
Des tables de risque pour les Européens.
Il est possible d'estimer le risque à partir d'une formule et d'un calculateur. C'est à partir des données de l'étude de Framingham réalisée aux Etats-Unis que ces calculateurs sont programmés. De tels outils sont disponibles pour les assistants numériques personnels de type PalmOS ou PocketPC. Le logiciel STAT Cholesterol est, par exemple, téléchargeable gratuitement à l'adresse statcoder.com.
Pour les sujets qui vivent en Europe, les estimations du risque obtenues dans l'étude de Framingham ne sont pas toujours adaptées. Il a été par exemple montré que cette dernière surestime le risque des patients britanniques. S. Bastuji-Garin et coll. ont également montré en 2002 que cette même équation n'est pas adaptée à la prévision des complications cardio-vasculaires au sein de la population de l'étude Insight, réalisée dans huit pays européens et en Israël.
Des tables de risque élaborées à partir d'études épidémiologique réalisées en Europe, comme les études Procam (Prospective Cardiovascular Munster Study) pour l'Allemagne ou PPS (Prospective Paris Study) pour la France. Les auteurs ont rassemblé les données de douze études représentant un suivi global de 2,7 millions d'année-personnes.
La Société européenne de cardiologie propose la table de risque Score qui permet l'évaluation du risque individuel de décès par maladie cardio-vasculaire dans les pays européens, en fonction de l'âge, du sexe, du tabagisme, de la pression artérielle systolique et de la cholestérolémie totale des sujets.
Les tables de risque Score permettent d'évaluer le risque de mortalité cardio-vasculaire chez les habitants des pays à risque « élevé » (Danemark, Finlande, Norvège) et chez les habitants des pays à risque « faible » (Belgique, Italie, Espagne, France).
La formule de risque est disponible dans l'article (Estimation of ten-year risk of fatal cardiovascular disease in Europe : the Score project. « Eur Heart J » 2003 ; 24 : 987-1003) et on peut la trouver sur le site de la Société européenne de cardiologie à l'adresse www.escardio.org, lien « ESC Guidelines ».
Calcul du risque et bénéfices des traitements.
Le calcul du risque permet de déterminer la complication à laquelle chaque patient est le plus exposé. Chez l'hypertendu non traité, l'utilisation des calculateurs indique que sur une période de dix ans, c'est la maladie coronaire qui est la complication la plus fréquemment observée. Les complications vasculaires cérébrales étant trois fois moins fréquentes que les complications coronaires, en particulier chez les sujets âgés de moins de 60 ans. Alors que le traitement antihypertenseur diminue avant tout le risque d'accident vasculaire cérébral, comme l'ont montré F. Gueyffier et coll. à partir de sept études de la base de données Indana (INdividual Data ANalysis of Antihypertensive intervention trials), le traitement par atorvastatine, quant à lui, diminue le risque coronaire chez l'hypertendu traité qui présente au moins trois autres facteurs de risque cardio-vasculaire, comme l'a montré l'étude Ascot (« Lancet » 2003). Dans la métaanalyse de M. R. Law et coll., publiée en 2003, le risque d'événement ischémique cardiaque est diminué de 20, 31 ou 51 % lorsque la réduction moyenne de LDL cholestérol est de 0,5, 1,0 ou 1,6 mmol/l. Par ailleurs, une réduction de 1 mmol/l de LDL cholestérol, diminue le même risque de 11 % à un an, de 24 % à deux ans, de 33 % de trois à cinq ans et de 35 % au-delà de cette période.
Ainsi, pour décider d'un traitement chez l'hypertendu, l'utilisation des calculateurs de risque permet d'estimer non seulement le type de complication cardio-vasculaire auquel il est exposé, alors que les résultats des essais thérapeutiques indiquent les bénéfices à attendre des différents moyens d'intervention thérapeutique.
D'après un entretien avec le Pr Xavier Girerd, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris.
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