LES ANGLAIS redécouvrent une de leurs régions d'origine : l'Aquitaine. Ou plus largement le sud-ouest de la France. Depuis quelques années, on assiste en effet à un afflux de Britanniques dans toutes ces contrées. Il est vrai que les lignes aériennes directes, assurées par des compagnies à bas prix, entre Londres et Bordeaux notamment, facilitent ces transferts. Certains, surtout des retraités, se partagent entre leur pays et la France ; d'autres, plus jeunes, de plus en plus nombreux, s'installent à demeure, et développent une activité professionnelle.
L'un des problèmes de cette migration reste que ces Britanniques se regroupent, ne cherchent guère de contacts avec les populations locales et parlent peu, voire pas du tout le français. Ils ont certes contribué à faire revivre certains villages et bourgs qui avaient tendance à se dépeupler. Mais ils n'ont pas cherché pour autant à nouer d'autres contacts que ceux qu'ils entretiennent avec leur compatriotes.
Cela ne va pas, bien sûr, sans créer quelques difficultés. Les enseignants les connaissent qui accueillent parfois dans leurs classes des enfants britanniques qui connaissent bien peu de mots en français. Les médecins ne sont pas moins concernés qui rencontrent des problèmes lorsqu'ils reçoivent en consultations ou visitent des patients anglais : les études médicales, malgré des progrès dans ce domaine, ne préparent guère à la pratique de l'anglais.
Un groupe de neuf médecins.
C'est pour tenter de surmonter ces difficultés et surtout pour améliorer la qualité des soins qu'ils doivent apporter à ces patients britanniques qu'un groupe de médecins généralistes charentais a fait appel à une enseignante pour améliorer leur pratiques de l'anglais.
Pour le Dr Christine Paulien, qui exerce à Chazelles, un bourg d'un peu plus de 1 100 habitants, et qui est à l'origine de cette initiative, si lire l'anglais est un exercice qu'un médecin peut réussir, « se trouver face à un patient, c'est totalement différent ». Les généralistes ont du mal à trouver leurs mots pour expliquer à leur patient anglais l'affection dont il souffre et surtout pour lui conseiller les soins qu'il doit suivre et les prescriptions qu'il doit prendre. Notamment lorsqu'il s'agit de personnes âgées. D'où le recours à une enseignante, Francy Brethenoux, qui a le privilège de connaître déjà le monde de la santé et ce type de problème. « J'ai l'avantage, explique-t-elle en effet, d'avoir délivré une formation en anglais aux personnels de l'hôpital de Ruffec et à l'école d'infirmières d'Angoulême ». Avec l'aide d'un infirmier, elle a d'ailleurs mis au point un manuel pratique et un CD, « Comment communiquer en anglais à l'hôpital ». Une initiative qui a été rapidement connue du monde médical charentais. D'où l'idée d'un certain nombre de médecins généralistes de s'adresser à elle pour améliorer leur pratique de l'anglais. Un groupe de neuf généralistes s'est ainsi constitué qui s'autofinance pour assurer, en particulier, la rémunération de leur enseignante.
« En quelques mois, explique celle-ci, ils ont fait des progrès intéressants et peuvent aujourd'hui communiquer avec leurs patients anglais plus aisément qu'hier. »
Jeu de rôle.
Deux sessions de formation sont au programme. La première s'est déroulée de septembre 2004 à avril dernier à raison d'une séance de deux heures tous les quinze jours. la seconde aura lieu de septembre 2005 à avril 2006, toujours sur le même rythme. « On met les médecins dans la situation qu'ils peuvent rencontrer avec des malades anglais, explique Francy Brethenoux. Ainsi au cours de ces séances, ils jouent tour à tour le rôle du patient et du médecin. Le touten anglais. » Pour l'enseignante, ces jeux de rôle permettent aux praticiens de se familiariser avec le mode d'expression anglais et de pouvoir s'adapter à certaines situations qu'ils peuvent trouver lors de leurs rencontres avec des patients britanniques.
Selon les services de la préfecture de la Charente, le département compterait aujourd'hui un peu plus de 2 500 sujets de Sa Gracieuse Majesté. Une population bien peu nombreuse, comparée à celle de l'ensemble du département : 340 000 habitants environ. Certes. Mais lorsque l'on sait que, en 2003, toujours selon les services de la préfecture, la Charente ne recensait que 1 500 Britanniques, on s'aperçoit que l'émigration des Anglais vers le pays de François Mitterrand s'accélère à la vitesse grand V. Et le mouvement n'est pas près de ralentir, semble-t-il. D'où le souci légitime des médecins charentais de devenir de parfaits bilingues.
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