Depuis l'affaire Festina et le « scandale » du dopage du funeste Tour 1998, « les choses ont changé dans le bon sens », observent les trois experts* de l'Agence mondiale antidopage dans leur rapport consacré au Tour 2003.
Au chapitre des « points forts et positifs » qu'ils passent en revue, « la fermeté du discours des responsables de l'organisation en matière de respect de l'éthique et de lutte contre le dopage » et « la solidité du système de contrôle de santé de l'UCI » (Union cycliste internationale). Egalement, la stratégie de ladite UCI d' « effectuer des tests inopinés, hors compétition, sur les coureurs lorsqu'ils ont présenté un profil biologique "douteux" à l'occasion des contrôles ».
Manipulations encore possibles
Les filets du dispositif gagneraient, estiment-ils cependant, à être encore un peu resserrés : des « manipulations » restent possibles, craignent-ils, principalement en raison de « la manière dont sont notifiés les contrôles ».
Par exemple, lors du prologue, « les sportifs ont été notifiés cinq minutes avant leur départ » qu'ils seraient testés. C'est trop, jugent les experts : « Les autres avaient encore l'occasion de prendre un stimulant avant le départ, comme ils avaient la certitude de ne pas être contrôlés (sauf en cas de victoire). »
Quant aux étapes, poursuit le rapport, « la notification par Radio-Tour a lieu vingt minutes avant la fin de la course. De cette façon, les sportifs qui n'étaient pas sélectionnés avaient à nouveau l'occasion d'absorber une substance à action rapide », là aussi sauf en cas de victoire, puisque le maillot jaune comme le vainqueur de l'étape sont automatiquement contrôlés.
De plus, les coureurs pouvaient se rendre au laboratoire, après l'arrivée, sans escorte, tandis que certains « se sont changés parfois pendant plus de vingt minutes dans leurs camion ».
« Toutes ces dispositions sont le fait de l'UCI », remarque tout d'abord Daniel Bal, directeur du cyclisme à Thierry Sabine Organisation (TSO) et à ce titre directeur de l'épreuve. Tout en comprenant la remarque, il explique qu' « il ne faut pas juger de ces mesures à l'aune de ce qui passe sur un stade fermé pour un championnat d'athlétisme, par exemple : nous affichons les noms des coureurs contrôlés devant la ligne d'arrivée, mais dans la précipitation et la cohue, ces annonces doivent être doublées, pour des raisons pratiques d'organisation, de messages radio, des messages qui ne sont pas destinés aux coureurs mais à leurs directeurs sportifs ». « De toute manière, estime encore l'ancien président de la Fédération française de cyclisme, ces notifications ne peuvent rien changer concernant les substances dopantes dites lourdes. »
De jour comme de nuit
Concernant le Laboratoire national de dépistage du dopage (LNDD) de Châtenay-Malabry, près de Paris, l'AMA souligne « la qualité des analyses » pratiquées, mais demande qu'il fonctionne de jour comme de nuit, week-end compris, de manière à accélérer le rythme de publication des résultats. « Un délai dans l'annonce d'un cas positif, craignent les auteurs du rapport, peut permettre à un coureur dopé interférer pendant quelques jours dans les résultats de la compétition. »
Le rapport se soucie enfin des cyclistes eux-mêmes, demandant que leur « intimité » soit davantage respectée pendant les contrôles et que les procédures fassent l'objet de plus d'explication à leur endroit.
« Il ne faudrait toutefois pas oublier que dans une compétition comme le Tour, nous nous battons chaque jour contre le temps, plaide Daniel Bal ; à l'étape, pas question de diriger les sportifs vers des structures en dur de grand confort, on a choisi d'aller au plus efficace en aménageant deux mobil-homes installés à proximité de la ligne d'arrivée, l'un pour l'attente, l'autre pour les prélèvements. A l'avenir, on veillera à mieux y assurer la police, promet-il, en interdisant en particulier l'accès de ces structures aux journalistes qui s'y pressent. »
L'AMA ne devrait pas dépêcher une nouvelle équipe de scientifiques au Tour 2004, appelée sur quantité d'autres épreuves, estime le directeur du Tour, qui exprime son « impatience » de voir entrer en application du code mondial antidopage : « toutes les compétitions seront alors soumises à des mesures universelles qui couperont court aux polémiques. »
* Le Dr Anik Sax, chef de service de l'Institut de médecine du sport au Luxembourg, le Dr Luis Herta, directeur du laboratoire antidopage de Lisbonne et Mme Ebermann, experte au sein de l'AMA.
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