PRATIQUE
L'augmentation des mouvements de population amène plus fréquemment les médecins à examiner au sein de leur clientèle habituelle, soit des migrants porteurs de parasitoses digestives de leur pays d'origine, soit des patients européens au retour d'un voyage exotique. Avec la fièvre, les troubles du transit représentent l'un des principaux motifs de consultation et s'il peut parfois être tentant d'utiliser rapidement des antiparasitaires intestinaux à large spectre pour guérir le patient, il est toutefois nécessaire de rappeler que le diagnostic de certitude de toute parasitose passe par la découverte et l'identification du parasite présumé responsable des troubles digestifs, ou de ses ufs, ne serait-ce que pour préciser au malade l'agent causal de sa maladie et le possible mode de contamination dont il a été la victime.
Les laboratoires de biologie sont en mesure aujourd'hui de fournir la (ou les) réponse(s) attendue(s) par le clinicien. L'examen parasitologique des selles est non invasif et de réalisation simple ; sa grande banalité ne doit pas faire oublier les principes généraux qui permettent de garantir la qualité des résultats, tant pour le patient que pour son médecin. On gardera à l'esprit que si l'exonération des selles est en règle générale facile et assez rapide pour le patient, il n'en est pas toujours de même pour la conduite de l'analyse au laboratoire, souvent grande consommatrice de temps.
La manière de prescrire est fondamentale : tous les renseignements épidémiologiques (lieu, durée du séjour, mode de vie sur place), cliniques (douleur, trouble du transit, fièvre, terrain immunodéprimé...), biologiques (anémie, hyperéosinophilie) et thérapeutiques, permettant d'orienter les recherches du laboratoire, doivent être précisés.
De même, les modalités du recueil des selles nécessitent l'éducation du patient, qui supprimera au cours des jours précédents l'analyse, tout médicament opaque non absorbable, tout lavement et laxatif huileux, tout produit de radiologie, ainsi que les aliments laissant beaucoup de résidus (pain, pomme de terre, fruits à grains, salade).
Pour décrire les conditions optimales de l'analyse parasitologique des selles dans le laboratoire, le mieux est de suivre son cheminement à la paillasse, celui-ci passant par trois ou quatre étapes successives.
L'examen parasitologique standard (B60 à B145) est fondé sur :
1) l'examen macroscopique de la selle qui est incontournable. Il précise la couleur, la consistance de la selle (liquide, moulée, mucus, sanglante ou non) et permet dès ce stade de reconnaître des vers adultes (ascaris, oxyure, anneaux de Tænia...) ;
2) l'examen microscopique extemporané à l'état frais qui est la seule étape permettant de juger la mobilité des formes végétatives des protozoaires et notamment des amibes. Mais ces formes végétatives sont très fragiles et meurent rapidement hors de l'organisme humain (moins de dix minutes). C'est pourquoi il faut examiner les selles aussitôt après leur émission, ce qui justifie le recueil du prélèvement au laboratoire si cela est réalisable ;
3) l'examen microscopique après concentration (on ne doit pas dire enrichissement) des parasites. En l'absence de méthode universelle (« passe-partout ») de concentration, on fait habituellement appel à deux types de méthodes complémentaires entre elles :
- les méthodes physiques (sédimentation, flottation, bien adaptées pour les ufs d'helminthes) ;
- les méthodes diphasiques (bien adaptées pour les kystes de protozoaires).
Toutefois, pour bien choisir la partie du prélèvement fécal à examiner, il est nécessaire de disposer de quelques éléments cliniques. Par exemple, la recherche d'ufs de schistosomes se fera de préférence à partir du raclage superficiel de la selle, tandis que celle d'ufs de douves se fera à partir de l'intérieur du prélèvement ;
4) des techniques complémentaires facultatives pouvant ensuite être mises en uvre en fonction du contexte épidémiologique : recherche d'anguillules (méthode de Baermann), coproculture sur gélose, protozooculture, recherche de coccidies (trichrome de Weber pour les microsporidies, coloration de Ziehl-Nielsen modifiée pour les cryptosporidies). Elles sont toutefois de réalisation lourde et ne sont réalisées que sur prescription explicite...
Le résultat de toutes ces étapes doit donc être inscrit sur le compte rendu adressé au clinicien qui pourra apprécier l'exhaustivité des techniques mises en uvre, en concordance avec les renseignements cliniques d'orientation qu'il aura lui-même adressés au laboratoire.
Dans tous les cas, le prescripteur gardera à l'esprit que chaque parasite n'est bien mis en évidence que par une technique qui lui est spécifiquement adaptée et que si, malgré cela, l'examen est négatif, il faut savoir le répéter pour tenir compte des périodes muettes d'émission des parasites (de trois à huit jours pour certains parasites jusqu'à trois semaines pour Giardiaintestinalis). Aussi, est-il inutile de répéter l'examen trois jours de suite, voire même trois fois le même jour, un intervalle de quatre à six jours entre chaque prélèvement (si l'état clinique le permet) devant être prescrit au malade. Ainsi, plus que jamais, la qualité de ce type d'analyse nécessite-t-elle une étroite collaboration entre le clinicien prescripteur et le biologiste.
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