Neuf organisations de médecine générale constituées autour de MG France en « front généraliste » ont présenté, ce mercredi, les motifs de leur colère contre la politique de santé, qui les amène à appeler à la fermeture des cabinets les 23 décembre et 6 janvier prochains.
MG France avait réactivé il y a quelques jours ce mouvement hétéroclite, rassemblant des syndicats de médecins (FMF), des internes (ISNAR-IMG), des remplaçants et nouveaux installés (ReAGJIR), des jeunes généralistes (SNJMG), des enseignants (SNEMG), mais aussi des centres de santé (FNCS), avec le soutien du CNGE et du collège de médecine générale.
Ce même mouvement s’était mobilisé de manière éphémère, il y a un an, pour presser le gouvernement de lancer une politique ambitieuse pour les soins primaires.
De la révolution du premier recours au dépeçage
La colère est montée d’un cran depuis. Les espoirs levés dans la foulée de la stratégie nationale de santé ont été douchés par le projet de loi lui-même. « Marisol Touraine avait appelé à une révolution du premier recours et à un médecin traitant pivot du parcours de soins mais il y a un décalage entre les grandes orientations et la loi de santé », résume Pierre Antoine Moinard, président de l’ISNAR-IMG.
La révolution annoncée serait de toute autre nature : la réforme est accusée d’être « hospitalocentrée », et de vouloir « dépecer » la médecine générale avec, par exemple, les délégations subies de vaccination et la création des infirmières cliniciennes.
Au-delà du rejet de cette réforme (et du tiers payant obligatoire qui reste un abcès de fixation), le président de MG France a souligné l’enjeu plus large de la mobilisation des généralistes à la fin de l’année.
« La profession a perdu 11 % de ses effectifs ces dix dernières années. Les généralistes partent par grappes sans trouver de successeur, clame le Dr Claude Leicher. Et chaque année, des postes d’internat demeurent vacants en médecine générale. Le problème aujourd’hui est d’assurer l’avenir de la médecine générale ».
Discrimination tarifaire
Les divers protagonistes du « front généraliste » ont énuméré les raisons de cette crise démographique.
En premier lieu, MG France évoque la « discrimination tarifaire » durable dont sont victimes, à ses yeux, les généralistes français, payés 23 euros la consultation, et privés des majorations de coordination réservées aux autres spécialistes.
« Au tarif horaire, les généralistes sont les médecins les moins bien payés de France et parmi les moins bien de l’Europe, argumente le Dr Leicher. Le chef de file de MG France juge « abracadabrantesques » les calculs de Marisol Touraine et de l’assurance-maladie selon lesquels la rémunération globale des médecins généralistes « ramenée à une consultation » atteint en réalité 31,40 euros (si l’on inclut les majorations personnes âgées, la rémunération sur objectifs...).
Une formation imparfaite
Très inquiets pour l’avenir de la médecine générale, les jeunes professionnels ont pointé les lacunes de leur formation, « un seul stage de six mois dans un cabinet de ville pour former un futur généraliste », une filière universitaire fragile avec seulement un enseignant titulaire pour 100 internes (contre 1 pour 20 internes pour les autres spécialités), l’insuffisance du nombre de chefs de clinique (78), et un manque de maîtres de stage.
Matthieu Calafiore, président du SNEMG, a dénoncé au passage la « décision ubuesque » de l’organisme gestionnaire du développement professionnel continu (DPC), de baisser l’enveloppe dédiée à la formation des médecins.
« Nous comprenons l’ensemble des mots d’ordre et nous appelons à fermer les cabinets le 23 décembre et le 6 janvier. Mais nous soutiendrons aussi ceux qui fermeront du 24 au 31 décembre », conclut Claude Leicher.
« Le ras-le-bol est tel que les médecins vont en profiter pour mettre le "souk" un maximum », affirme le Dr Claude Bronner, président de la branche généraliste de la FMF.
Le « front généraliste » espère être reçu par Marisol Touraine qui a promis une phase de concertation d’ici à la mi-décembre avec les libéraux. Une chose est sûre, la journée du 23 décembre constituera un premier test pour les membres de cette coalition.
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