La tragédie annoncée par la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) à grand renfort de communication n’a pas eu lieu. Très mobilisées contre la loi Touraine, les cliniques promettaient de paralyser le système de santé dès janvier avec un arrêt total des soins pour une durée illimitée, elles ont finalement remisé leur menace au placard.
La levée soudaine du mot d’ordre de grève a été prise pendant les fêtes par la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), prenant de court tous les syndicats de spécialistes.
Les gages de Marisol Touraine - un courrier et des promesses - ont été jugés suffisants. Irresponsable d’avoir joué sur la peur, la FHP ? « Au contraire, la Fédération est responsable en revenant à la table des discussions, assure ce membre du comité exécutif de la FHP. La ministre a pris la peine de nous recevoir, elle nous a écoutés et elle a avancé. Quelquefois, il faut choquer ».
Plusieurs passages du projet de loi de santé devraient être remaniés. Les cliniques dotées d’un service d’urgences seront associées au service public hospitalier (SPH). Le renouvellement des autorisations ne sera pas conditionné à la participation au SPH. L’attribution d’un label SPH aux cliniques remplissant le bloc d’obligations, autre demande de la FHP, est en discussion.
Reste l’épineuse question de l’accessibilité financière et du secteur II. « On a demandé à la ministre d’ouvrir une négociation avec les médecins, expose cet autre membre du comité exécutif de la FHP, lui-même médecin. La ministre a proposé un groupe de travail, nous avons trouvé l’idée bonne. Le vote pour l’arrêt du mouvement a été unanime ».
Déclaration d’intention
Tenus à l’écart des discussions, les syndicats de médecins libéraux et les représentants des blocs opératoires se sont sentis lâchés. Certains suspectent la FHP d’avoir manigancé quelque accord officieux dans leur dos. La FHP s’en défend, mais le mal est fait. « La confiance avec la FHP est distendue, grince le Dr Jean-Luc Baron, président de la Conférence des présidents de CME de l’hospitalisation privée. C’est par la presse que nous avons appris la levée du mot d’ordre des établissements, alors que nous avions accompagné leur mouvement. Sur le terrain, les médecins sont vent debout, le front continue. Nous convergeons vers l’idée d’un reste à charge zéro, mais nous ne voulons pas du tarif opposable et du tiers payant pour tout le monde ».
Les syndicats médicaux s’étonnent qu’un simple courrier de Marisol Touraine ait suffi à amadouer la FHP. « La ministre écrit qu’il y aurait des dérogations pour ne pas lier le service public hospitalier et le secteur d’exercice. Une déclaration d’intention aussi floue qu’inacceptable », analyse le Dr Philippe Cuq, co-président du BLOC.
Des considérations économiques ont sans doute pesé dans la décision de la FHP : l’examen du texte de loi est officiellement reporté à avril. Pas simple pour le secteur privé de stopper les soins de façon illimitée avec une échéance si lointaine en vue.
Pression
Sur le terrain, de nombreux spécialistes exerçant en clinique poursuivaient leur grève en début de semaine. Mais il était difficile d’en mesurer l’ampleur faute de pointage officiel précis sur les réquisitions. Plus de 6 500 praticiens exerçant en clinique ont stoppé leur activité le 5 janvier, affirme Le BLOC. Les urgentistes ont été particulièrement mobilisés, notamment dans les centres SOS main. Le SYNGOF (obstétriciens), AOC CSMF, le SNARF (anesthésistes), l’UMESPE, le BLOC... tous les syndicats affichent en tout cas leur volonté de maintenir la pression. Le groupe de travail sur l’accessibilité financière leur offrira-t-il une porte de sortie ? La FHP souhaite que l’Ordre des médecins et les syndicats médicaux soient conviés. Il n’est pas question que la FHP participe à toute négociation sur les honoraires, prévient AOC CSMF.
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