Partagez-vous l'avis de ceux qui disent que 115 F pour une consultation c'est insuffisant ?
CLAUDE LE PEN
C'est effectivement insuffisant. Il y a un consensus sur ce point. C'est un tarif dont les bases ont été établies il y a longtemps et qui n'a pas été rebasé.
Franchement, non. Le nombre de consultations ne dépend pas que du médecin. En théorie, le médecin a une capacité à induire un certain nombre de consultations supplémentaires ; mais, dans les faits, c'est plus compliqué. Si on revalorise aujourd'hui les actes, les médecins considéreront cela comme un simple rattrapage (NDLR : et ne réduiront pas leur activité).
C'est vrai, mais le lien de causalité (entre tarifs plus élevés et activité moindre) n'est pas prouvé. On pourrait tout aussi bien conclure à la causalité inverse et dire que c'est parce qu'ils avaient une activité peu importante que les médecins ont choisi d'entrer dans le secteur à honoraires libres.
Cela dit, on peut, en effet, décider de mettre dans une convention des clauses prévoyant des modérations d'activité en échange d'une rémunération plus importante de l'acte. Mais c'est là un mécanisme conventionnel. Ce n'est pas un mécanisme économique.
Cela est un peu inférieur aux revenus des généralistes anglais qui ont pourtant la réputation d'être mal payés. En fait, cela correspond à un salaire de cadre intermédiaire dans une entreprise privée - qui n'est ni très riche, ni défavorisé. C'est en rupture avec l'image des médecins qu'a la population, qui s'imagine que les praticiens ont un train de vie élevé. J'ajoute que pour apprécier ces revenus, il faut tenir compte du fait que les études d'un médecin sont plus longues que celles d'un ingénieur, que sa carrière est plus courte, qu'il a peu de possibilités de moduler ses revenus au cours de sa carrière, qu'il a peu de possibilités de promotion puisqu'il va exercer sa profession dans des conditions à peu près identiques tout au long de sa carrière.
Dans l'entreprise privée, on valorise l'expérience, le savoir-faire des cadres. On pourrait imaginer que ce soit le cas pour les médecins. Il faudrait qu'il puisse y avoir une diversification des rémunérations, que certains praticiens puissent être mieux payés, non pas en fonction de leur ancienneté ou de manière arbitraire, comme c'est le cas avec l'ancien secteur 2, mais en fonction de leur qualité, de leur expérience. C'est ce qui était plus ou moins prévu lorsque les partenaires conventionnels envisageaient la mise en place d'un secteur d'exercice promotionnel ou optionnel. Mais on a toujours tourné autour de cette idée sans jamais la concrétiser.
Le paiement à l'acte résiste, malgré les tentatives insistantes de lui faire le peau. Il a ses vertus : c'est une incitation à porter attention au patient. Mais il ne faut pas le mythifier, en faire un élément essentiel de l'indépendance du médecin, de la qualité des soins, de la médecine libérale. Et on peut prévoir des rémunérations forfaitaires pour des pathologies chroniques, pour le suivi d'un patient souffrant d'HTA ou pour le suivi d'une femme enceinte par exemple.
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