T HEME central du congrès national de la douleur 2001 (Société d'étude et de traitement de la douleur, SETD), les facteurs et les mécanismes de la chronicisation douloureuse ont fait l'objet, ces dernières années, de nombreux travaux aboutissant à une modification profonde de la prise en charge. Cette évolution du traitement de la douleur chronique peut être analysée à partir de trois points de vue complémentaires : organisationnel, socio-culturel et scientifique.
Mais beaucoup reste à faire. En effet, comme l'a souligné le président de la SETD (chapitre français de l'IASP, Association internationale pour l'étude de la douleur), Yvan Krakowski, tout acteur de santé s'impliquant avec professionnalisme dans la lutte contre la douleur est conduit à prendre conscience des limites atteintes par le système de santé actuel.
Le milieu « algologique » s'est de mieux en mieux organisé (fusion des sociétés savantes, collège des professionnels) ces dernières années en France. Parallèlement, grâce à l'énergie de nombreux professionnels de santé, les politiques ont pris conscience de la nécessité de développer les structures pluridisciplinaires et de faciliter l'accès aux traitements de la douleur.
Modifications réglementaires de prescription des opioïdes (ordonnances sécurisées, durée de prescription...), obligation pour les médecins de soulager les souffrances en toutes circonstances et d'accompagner les mourants (décret de septembre 1995), mise en place d'une capacité nationale pour la prise en charge de la douleur, création des CLUD (comités de lutte contre la douleur) ne sont que quelques-unes des mesures mises en place depuis dix ans.
Pourtant, si ces mesures étaient essentielles, elles restent insuffisantes et de nombreuses difficultés persistent : manque de formation des soignants, confusion entre structures de soins palliatifs et structures de traitement des douleurs chroniques, fragilité et précarité des structures de prises en charge de la douleur chronique, avec absence de postes universitaires, manque de moyens humains et inadaptation de la nomenclature.
Des réseaux pluridisciplinaires
De vrais changements culturels ont été opérés avec la création des réseaux de la douleur qui s'organisent progressivement dans toute la France, encore trop souvent de manière informelle. Ces réseaux de soins permettent pourtant une approche multidisciplinaire cohérente et souple, particulièrement indispensable dans le domaine de la douleur, assure la continuité des soins et rompt l'isolement des professionnels de santé, rappelle le Dr Claire Delorme (Caen). Leur développement et leur reconnaissance par les pouvoirs publics sont d'autant plus importants et attendus qu'ils pourraient assurer une prise en charge pluridisciplinaire précoce dans les pathologies subaiguës, dont la chronicisation pèse lourd en termes de morbidité et de coût social (lombalgie, par exemple).
Le ministre de la Santé, Bernard Kouchner (voir encadré), a promis de réfléchir à une meilleure assise juridique de ces réseaux dans la loi de modernisation du système de santé promise à l'automne.
Congrès national de la douleur, SETD (Société d'étude et de traitement de la douleur), Paris.
Bientôt un nouveau plan
En faisant une visite dite « surprise » au congrès de la SETD, Bernard Kouchner a manifesté son soutien aux professionnels de santé engagés dans la prise en charge de la douleur. « Trois ans après la mise en place du premier plan triennal (1998), j'ai le sentiment d'une partie du devoir accompli mais j'espère proposer un nouveau plan à la fin de l'année », a-t-il affirmé, « tout en souhaitant que l'efficacité de ces plans successifs puisse être évaluée de manière objective ». Libre circulation des médicaments opioïdes à travers l'Europe communautaire, nécessité de la création d'une spécialité universitaire de médecine de la douleur, application de la circulaire dite « Kouchner » sur le rôle des infirmiers dans la distribution des opioïdes, sont quelques-unes des questions qui ont été posées par les congressistes au ministre de la Santé.
Cannabis et douleur
Le Pr Françoise Cesselin (Paris) a souligné le caractère anecdotique des données scientifiques concernant l'intérêt du cannabis dans le traitement de la douleur, ainsi que la multiplicité des principes actifs présents dans le chanvre indien, rendant les études avec le matériel naturel tout à fait hasardeuses.
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