« A un moment donné, il était l'un des deux ou trois hommes les plus connus du monde. Vous pouviez vous balader et rencontrer des gens qui ne savaient pas qui était John Kennedy, mais qui connaissaient Chris Barnard », dit son confrère Sir Terence English. Le 3 décembre 1967, le Dr Christiaan Barnard, 45 ans, réalisait en effet au Cap l'impensable : la première greffe d'un cur, celui, endommagé mais encore battant, d'une jeune femme de 25 ans victime d'un accident de la route sur un malade de 53 ans, Louis Washkansky. Le malade ne survécut que dix-huit jours mais d'autres chirurgiens allaient se lancer à leur tour dans l'aventure.
Pour le Pr Christian Cabrol, qui devait réaliser peu après (le 27 avril 1968) la première greffe cardiaque française et européenne, le père des transplantations cardiaques est l'Américain Norman Shumway, qui avait développé la technique sur le chien dès 1965, mais Barnard a eu « le très grand mérite » d'avoir osé :
« Nous lui devons tous énormément parce qu'il a brisé un tabou, celui de prélever un cur battant chez quelqu'un. »
C'est la mort d'un frère de 5 ans d'une maladie cardiaque qui serait à l'origine de la vocation de ce fils de pasteur sud-africain. Après des études dans son pays, il avait obtenu sa spécialité de cardiologie aux Etats-Unis, à l'université du Minnesota - où il fit la connaissance d'un autre jeune chirurgien, Christian Cabrol.
Décrit comme « très méticuleux et très difficile en salle d'opération » par Terence English (auteur de la première greffe cardiaque britannique, en 1979), « le chirurgien aux mains d'or » fut aussi d'une certaine manière victime de sa célébrité. Il « s'est laissé grisé par le côté médiatique et mondain », estime le Pr Cabrol. Et il est vrai qu'il apparut ensuite plus souvent dans les médias pour ses conquêtes féminines que pour ses grandes réalisations médicales. D'autant qu'en 1983, pour cause d'arthrite, il avait dû renoncer à pratiquer la chirurgie.
« Sa mort est une grande perte pour le pays après toutes ses contributions, a déclaré l'ancien président sud-africain Nelson Mandela. Il était également une voix contre l'apartheid. » Jacques Chirac a salué celui qui « restera comme le symbole d'une médecine moderne et audacieuse, capable de dépasser les idées reçues pour apporter la solution aux victimes de la souffrance et de la maladie ».
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