PERSONNE OU PRESQUE N'EN voulait mais beaucoup l'ont signé. Le contrat de pratiques professionnelles (CPP), promis à un grand « flop » par tous les syndicats, avant même d'être né, a rencontré un succès inattendu.
La Caisse nationale d'assurance-maladie (Cnam) vient en effet de communiquer les résultats d'adhésion des praticiens de secteur I spécialisés en chirurgie, anesthésie-réanimation ou réalisant des échographies obstétricales. Un tiercé dans l'ordre pour le nombre d'adhésions. Les chirurgiens sont en effet les plus nombreux à avoir signé le CPP. Quelque 68,5 % d'entre eux, soit 1 121 sur les 1 637 concernés, ont renvoyé leur adhésion à la Caisse avant le 31 janvier. Pour le Dr Alain Ricci, représentant de l'Union collégiale des chirurgiens et des spécialistes français (Uccsf-Alliance), ce résultat est un succès et montre que « les chirurgiens sont prêts à relever le défi de qualité des soins comme le préconise le rapport du Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie ». Le Dr Jean-Gabriel Brun, président de l'Uccsf, n'a jamais caché que la prime de la Cnam (7 000 euros pour les chirugiens dont la somme des coefficients en actes dépasse 50 000 K) éviterait surtout « une pression assurantielle » aux chirurgiens et servirait à couvrir une partie de leur prime de responsabilité civile professionnelle estimée à 15 000 euros en moyenne. Une prime versée si les engagements en matière de qualité des soins sont réellement appliqués par le praticien.
Beaucoup moins enthousiaste, le Dr Xavier Gouyou-Beauchamps, porte-parole du collectif des chirurgiens de secteur I (Cochise) - qui appelait ses membres à rejeter le CPP - regrettait que les praticiens aient reçu tardivement l'offre de la Cnam pour faire leur choix. Les résultats ne traduisent pas, selon lui, la conjoncture : « Beaucoup de chirurgiens sont contre le CPP mais après le blocage prolongé de leurs honoraires, ils ne pouvaient pas refuser la prime qui leur était proposée. » Pour le Dr Gouyou-Beauchamps, le CPP revient à faire des chirurgiens des salariés, « mais il s'agit d'un mauvais salariat car nous n'en avons pas les avantages, les 35 heures, la retraite à 60 ans, la formation payée par l'employeur... La prime proposée est un cadeau empoisonné car elle n'est pas proportionnelle à notre travail. » Et le Dr Gouyou-Beauchamps de rappeler que l'activité moyenne d'un chirurgien libéral est de 60 000 K. Selon lui, il ne fait aucun doute que les signataires des CPP seront en tête des défilés lors du mouvement de grève de septembre prochain.
Un « contrat inadapté » pour les échographies obstétricales.
Plus de la moitié des anesthésistes-réanimateurs de secteur I (51,5 %) ont adopté le CPP. Le Dr Jean-Marc Dumeix, président du Syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français (Snarf), qui a défendu le CPP « faute de mieux », n'est pas vraiment surpris. Mais il estime que le CPP ne compense pas l'absence de revalorisation des actes attendus depuis de nombreuses années: « Il faudra très vite mettre en place la Classification commune des actes médicaux (Ccam) techniques et rouvrir le secteur II à ceux qui ne peuvent plus tenir. »
En revanche, les médecins réalisant des échographies obstétricales ont peu adhéré aux CPP. Seulement 837 contrats ont été enregistrés par la Cnam, ce qu'explique facilement le Dr Jean Marty, secrétaire général adjoint du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (Syngof) : « Un grand nombre ont pensé qu'adopter le CPP signifiait s'engager à rester dans un système déstructurant. Les gynécos-obstétriciens sont dans un état d'esprit de déconventionnement. » Le rejet du CPP est, selon lui, le résultat des rapports tendus entretenus par la spécialité avec les caisses. Un effet de seuil trop important expliquerait également cette faible adhésion, les médecins devant réaliser 380 échographies obstétricales par an pour signer un CPP. « Ce CPP était inadapté pour les personnes à mi-temps », déplore le Dr Marty.
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