La compétition électorale entre les deux principaux candidats à l'élection présidentielle s'annonce, chez les médecins, un peu plus serrée que lors du précédent scrutin de 1995.
Au premier tour, Jacques Chirac et Lionel Jospin recueilleraient tous deux 19 % des suffrages des praticiens. Autrement dit, ils obtiennent, l'un et l'autre, dans cette catégorie professionnelle, des scores moins élevés que dans l'ensemble de la population. Cela est surtout vrai du président sortant qui, selon un sondage réalisé par le même institut, les 22 et 23 février, auprès du grand public, était crédité de 25 % des suffrages (soit 6 % de plus que chez les médecins). Lionel Jospin, lui, obtenait dans le grand public 22 % de intentions de vote.
Le score relativement décevant du président sortant bénéficie surtout à Alain Madelin qui, avec 15 % des intentions de vote, fait un tabac chez les médecins et recueille les suffrages des libéraux pur sucre, toujours bien implantés dans le corps médical. Ses thèses sur la mise en concurrence des caisses d'assurance-maladie peuvent expliquer, partiellement, l'attrait qu'il exerce sur de nombreux praticiens. Jacques Chirac pâtit aussi du score de François Bayrou relativement élevé (8 % des intentions de vote contre 3 % dans l'ensemble de la population).
Jean-Pierre Chevènement, enfin, continue a séduire les médecins avec 15 % des intentions de vote, soit le même pourcentage que celui d'Alain Madelin. L'importance qu'il a accordée, au début de sa campagne, aux questions de santé, son message d'autorité et de républicanisme qui séduit les catégories socioprofessionnelles qui se sentent victimes de l'évolution de la société, expliquent sans doute son bon score. Il prend visiblement des électeurs médecins à Chirac et à Jospin. Certains médecins déçus par les politiques menées par Alain Juppé entre 1995 et 1997 et Lionel Jospin entre 1997 et aujourd'hui sont sans doute tentés par la troisième voie qu'incarne le député de Belfort. C'est le réflexe de « l'homme du recours ». Le score du « Che » est, en tout cas, meilleur chez les médecins que dans l'ensemble de l'électorat.
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Si le premier tour de l'élection présidentielle se déroulait dimanche prochain, et si vous aviez le choix entre les candidats suivants, quel serait celui pour lequel il y aurait le plus de chances que vous votiez au premier tour ? | ||
Candidat / Médecins certains d'aller voter (en % exprimés)
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Rappel grand public : le point, France 2, Europe 1,du 22-23/02/2002 (en % exprimés)
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Arlette Laguiller |
5
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7
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Olivier Besancenot |
0,5
|
0,5
|
Robert Hue |
1
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6
|
Lionel Jospin |
19
|
22
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Christiane Taubira |
0,5
|
0,5
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Jean-Pierre Chevènement |
15
|
11
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Noël Mamère |
7
|
6
|
Corinne Lepage |
2
|
0,5
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Jean Saint-Josse |
2
|
3
|
François Bayrou |
8
|
3
|
Alain Madelin |
15
|
3
|
Jacques Chirac |
19
|
25
|
Christine Boutin |
1
|
0,5
|
Charles Pasqua |
1
|
1,5
|
Jean-Marie Le Pen |
3
|
9
|
Bruno Mégret |
1
|
1,5
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20 % des médecins interrrogées, certains d'aller voter, n'ont pas exprimé d'intention de vote. | ||
Enquête d'intentions de vote auprès des médecins - Enquête IPSOS/« le Quotidien du Médecin » - Vague 1 - Février 2002. |
Les spécificités du corps médical
Autres spécificités, traditionnelles celles-là, du corps médical : le faible score obtenu par Jean-Marie Le Pen (3 % des intentions de vote contre 9 % dans l'ensemble de la population et parfois davantage selon d'autres sondages) et par Robert Hue (1 % contre 6 % dans l'ensemble de l'électorat). Le leader du Front national n'a jamais réussi à convaincre les médecins, rebutés par l'extrémisme des thèses et par le caractère du personnage. Les praticiens qui sont proches de certaines idées de la droite nationale se retrouvaient naguère chez Philippe de Villiers, mais rarement chez Jean-Marie Le Pen. Les communistes, pour leur part, bien qu'ils manifestent la sollicitude la plus attentionnée à l'égard des médecins et qu'ils se fassent régulièrement les avocats inlassables de leurs revendications, n'ont jamais été payés de retour par le corps médical.
Enfin, avec 8 % des suffrages, Noël Mamère réalise dans le corps médical un score conforme à sa moyenne nationale.
Second tour : Chirac l'emporterait
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Si le second tour de l'élection présidentielle se déroulait dimanche prochain et si vous aviez le choix entre les candidats suivants, quel serait celui pour lequel il y aurait le plus de chance que vous votiez au second tour ? | ||
Candidat / Médecins certains d'aller voter (en % exprimés)
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Rappel grand public : le point, France 2, Europe 1, du 22-23/02/2002 (en % exprimés)
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Lionel Jospin |
40
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49
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Jacques Chirac |
60
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51
|
100
|
100
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21 % des personnes interrogées, certaines d'aller voter, n'ont pas exprimé d'intention de vote. |
Chirac séduit moins
Au second tour, 60 % des médecins apporteraient leur voix au président sortant et 40 % à Lionel Jospin. Ce qui confirme l'ancrage à droite du corps médical. Cet ancrage est cependant moins marqué que naguère. En effet, en 1995, selon un sondage IPSOS réalisé dans les mêmes conditions (1) Jacques Chirac recueillait 69 % des intentions de vote chez les médecins contre 31 % pour Lionel Jospin.
Autrement dit, l'avance du candidat de la droite qui était d'une quarantaine de points dans le corps médical n'est plus que d'une vingtaine de points. Il y a peut-être dans cette forte érosion, un dépit face à la politique et au personnage Chirac. Mais il y a aussi et surtout l'effet du plan Juppé. Bien que cinq ans se soient écoulés depuis l'initiative hasardeuse de 1997 et le changement de majorité, bien que l'ancien Premier ministre ait à de multiples reprises fait son mea culpa, bien que Jacques Chirac ait tenu des propos rassérénants au corps médical, et tout récemment encore à l'occasion des assises du Centre national de professions de santé, le traumatisme du plan Juppé est loin d'être oublié.
La vengeance électorale est, elle aussi, un plat qui se mange froid et accompagné de pain bénit pour Alain Madelin et Jean-Pierre Chevènement.
Que Jacques Chirac voit ainsi son capital de confiance fondre comme neige au soleil dans une catégorie de la population qui, avec les agriculteurs, semblait naguère avoir pour lui les yeux de Chimène, voilà qui devrait inquiéter son équipe de campagne.
(1) Sondage IPSOS réalisé pour « le Quotidien » le 6 mars 1995 auprès d'un échantillon national représentatif du corps médical de 403 médecins.
Fiche technique
Sondage effectué par IPSOS pour « le Quotidien » les 26 et 27 février 2002, auprès d'un échantillon de 353 médecins inscrits sur les listes électorales, constituant un échantillon représentatif de la profession. Echantillon interrogé par téléphone. Méthode des quotas : répartition généralistes/spécialistes, libéraux/hospitaliers/cliniques-dispensaires après stratification par région.
Afin de mesurer au plus près de la population des votants potentiels, les intentions de vote sont calculées sur la base des électeurs inscrits se déclarant certains d'aller voter, soit 75 % des personnes interrogées.
Les résultats d'intentions de vote ne sont pas une prévision du résultat électoral. Ils donnent une indication significative de l'état du rapport de forces politiques actuel et n'interdisent aucune évolution future, notamment en fonction de l'impact de la campagne électorale. Comme pour toute enquête quantitative, cette étude présente des résultats soumis aux marges d'erreur inhérentes aux lois statistiques.
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