L'enquête est considérable, par le nombre de femmes analysées, plus de 488 000, et par sa durée, trente ans. Menée en Norvège, elle a permis d'établir que, pour une femme, le changement de partenaire entre ses deux premières grossesses favorise un accouchement prématuré, la naissance d'un enfant de petit poids et majore la mortalité néonatale.
La notion n'est pas totalement nouvelle, mais les hypothèses antérieures attribuaient ce phénomène davantage à l'influence d'antigènes ou de gènes paternels. Ici, en plus de chiffrer ces risques, Lars J. Vatten et Rolv Skærven (Trondheim) proposent des explications.
Doubler le risque relatif d'accouchement prématuré
Les médecins norvégiens ont donc analysé les dossiers obstétricaux de 31 683 femmes ayant changé de partenaire entre leurs deux premières grossesses. Ils ont comparé leurs résultats à ceux de 456 458 femmes ayant eu deux enfants successifs du même père. Le changement de compagnon a fait doubler le risque relatif d'accouchement prématuré (avant la 37e semaine), créé un risque relatif de 2,5 en ce qui concerne un poids de naissance à inférieur à 2 500 g et multiplié le risque de décès par 1,8. Ces mêmes femmes, dès leur première grossesse, montraient déjà une très faible élévation de ces risques. Les hypothèses proposées par les Norvégiens permettent d'expliquer ces deux constats.
Plusieurs situations spécifiques aux femmes ayant changé de partenaire pourraient intervenir sur l'accouchement. En premier lieu, ces femmes ont tendance à attendre davantage avant de concevoir leur second enfant et sont légèrement plus âgées. Deux facteurs jouant sur la grossesse. Les auteurs précisent que leurs données ont été ajustées en fonction de ces éléments.
De même, les scientifiques ont tenu compte du niveau d'études. Il est généralement corrélé inversement à la fréquence des pathologies obstétricales. Ici, son effet protecteur n'influe pas sur les risques obstétricaux des femmes « instruites ».
Les médecins norvégiens constatent surtout que les femmes changeant de partenaires créent un sous-groupe aux caractéristiques défavorables à une grossesse.
Tabac, alcool, mauvaise alimentation
Pour eux, il s'agit de femmes qui ont davantage de conduites à risque telles que tabagisme, consommation d'alcool ou mauvaise alimentation. Facteurs de risque qu'elles poursuivent au cours de la grossesse. Comme le second enfant arrive plus tardivement au cours de la vie, l'influence néfaste de ces éléments se fait sentir avec plus d'acuité. Cette notion de groupe à risque explique aussi les pathologies découvertes lors de la première grossesse. Au passage, les chercheurs relèvent que les femmes qui ont changé d'homme sont trois fois plus souvent des fumeuses.
Enfin en ce qui concerne l'hypothèse impliquant des antigènes ou gènes paternels, les médecins norvégiens y croient peu. Pour eux, la responsabilité du père se traduirait par des conséquences autres que gestationnelles.
« British Medical Journal », vol. 327, 15 novembre 2003, pp. 1138-1141.
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