À MI-PARCOURS du mouvement de grève des chirurgiens libéraux et hospitaliers (report des opérations programmées, mais urgences assurées), qui se poursuit cette semaine à l'appel de l'UCDF, chacun campe sur ses positions.
Du côté des responsables de cette fronde chirurgicale, le ton reste déterminé, offensif. L'UCDF estime avoir marqué des points sur le terrain et dans les esprits. «La mobilisation est forte dans les grandes villes, notamment en province, affirme le Dr Philippe Cuq, président du syndicat. Certes, les perturbations sont minimes, car les urgences sont assurées. Mais la profession est aujourd'hui en alerte maximale. Chacun est conscient que les semaines qui viennent seront cruciales pour l'avenir de la chirurgie.»
En clair, le message serait en train de passer même si lescliniques sont peu perturbées. «On manque de visibilité, précisait la Fédération de l'hospitalisation privée (FHP) en début de semaine. On a demandé aux établissements de quantifier l'impact de la grève.» Certains soutiens restent mesurés. Le syndicat des ORL, par exemple, s'associe au mouvement en laissant chaque adhérent apprécier les modalités de son action.
Roselyne Bachelot, quant à elle, n'a pas attendu de connaître ses répercussions pour porter un jugement sévère sur la grogne des blocs opératoires ; dans « le Journal du Dimanche » du 12 octobre, la ministre de la Santé a jugé que la grève a été lancée pour «un motif qui n'existe pas, la fin de la liberté tarifaire des praticiens du secteurII».
Or, affirme-t-elle, «il n'en est pas question bien sûr». Nicolas Sarkozy pourtant, dans son discours « santé » du 18 septembre, avait souligné qu' «une forme de régulation adaptée [des honoraires en secteur II] pourrait être envisagée», afin d'apporter des solutions aux difficultés d'accès aux soins . Et certains parlementaires, y compris à l'UMP, ne cachent pas leur volonté d'encadrer peu ou prou les règles du secteur II actuellement régi par la seule notion de « tact et mesure ».
À tort ou à raison, nombre de chirurgiens craignent une «mauvaise surprise» au détour de l'examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) ou de la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST).
Légitimité.
Mais il y a un autre front plus immédiat. Les chirurgiens en colère redoutent qu'un accord conventionnel «au rabais» sur le secteur optionnel soit signé «dans leur dos» par les centrales polycatégorielles habilitées à négocier. Ils refusent d'être «dépossédés» d'un dossier qui conditionne leur exercice et leur rémunération. Des centrales (CSMF, SML, FMF) qui, dans des registres différents, ont pris leurs distances avec la grève et plus encore avec les menaces de déconventionnement agitées par certains praticiens. Aujourd'hui, les chirurgiens de l'UCDF, soutenus par des responsables de l'Association des anesthésiologistes libéraux (ALL) et du Syndicat national des gynécologues-obstétriciens de France (SYNGOF), devraient rappeler publiquement les enjeux de la mobilisation avec cette mise en garde : «Qui et comment va-t-on opérer les Français demain?»
Reste à savoir si ce bruit de fond aura une quelconque influence sur les négociations autour du secteur optionnel, qui doivent démarrer le 23 octobre. La profession avance en tout cas en ordre dispersé. «Nous ne voulons pas déléguer notre défense à des syndicats pour lesquels les chirurgiens ne comptent pas, martèle le Dr Jean Marty, secrétaire général du SYNGOF. L'histoire a montré que l'on avait tort de leur faire confiance. Xavier Bertrand avait accepté de traiter le dossier de la RCP [responsabilité civile professionnelle] directement avec les chirurgiens et cela a fonctionné; Roselyne Bachelot aurait intérêt à procéder de la même façon...»
L'arrêté sur les devis obligatoires publié
Longtemps annoncé, plusieurs fois modifié... enfin publié. L'arrêté sur les devis obligatoires est paru au « JO » du 11 octobre. Ce court texte prévoit comme prévu que le professionnel devra remettre au patient une «information écrite préalable» dès lors que «lorsqu'ils comportent un dépassement, les honoraires totaux des actes et prestations facturés lors de la consultation sont supérieurs à 70euros». La fixation de ce montant a fait l'objet de longs arbitrages. Les partenaires sociaux redoutent un alignement des praticiens sur les tarifs les plus élevés pratiqués dans les régions les plus chères.
Les syndicats de spécialistes sont, eux, extrêmement réservés. Le SML doute du caractère opérationnel du seuil de déclenchement des devis. «Au début d'une séquence de soins, le médecin n'a pas une connaissance forcément exhaustive des traitements qu'il va devoir mettre en oeuvre.»
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