CHAZAY D’AZERGUES (69)
DR JEAN-PIERRE MICOLLE
Les pouvoirs publics viennent de demander aux médecins de prescrire moins de médicaments. Et de proposer des solutions non médicamenteuses validées…
J’écoutais ces propos dans ma voiture alors que je venais de renouveler une ordonnance de 15 médicaments majeurs pour une femme de 78 ans. Ses maladies ? BPCO liée à un tabagisme ancien qui, associé à un diabète, à une HTA et une hypercholestérolémie, avait provoqué 2 infarctus du myocarde et une amputation de jambe pour oblitération artérielle aiguë. La suite de cet infarctus est une insuffisance cardiaque stade 3 de la NYHA, une hyperuricémie induite par le furosémide et un état dépressif liée a son manque de mobilité… Et quand elle a des douleurs arthrosiques je lui donne de l’Harpagophytum parce que des traitements médicamenteux validés ils n’y en a pas beaucoup, mais des non médicamenteux validés je n’en connais pas.
Comme toujours c’est au médecin que l’on renvoie la balle alors qu’il n’est pas le seul responsable de ces ordonnances à rallonge, en dehors de l’exemple ci-dessus qui n’est pas si rare quand on soigne des polypathologies chez des personnes âgées.
Il y a l’État qui décide de l’AMM et du remboursement d’un médicament et qui pourrait envisager de ne pas mettre sur le marché ou/et d e ne pas rembourser les médicaments avec une ASMR de 3 ou 4. Il y a les patients qui réclament (le mot est juste). Pour la circulation, pour le mal de gorge, pour le dos qui pique pour le crâne qui gratte…les Français sont devenus une population de douillets.
Tout le monde sait que la consultation du généraliste français est la plus longue d’Europe. Nous avons donc le temps d’écouter ces doléances dont un grand nombre sont peu intenses, fonctionnelles ou simplement insoignables car tout ne se soigne pas… On rencontre aussi beaucoup de mal-être, de moments dépressifs, de situation sociale angoissante, tout ce dont le médecin anglais ou hollandais se débarrasse très vite avec sa consultation un peu plus expéditive.
Et puis il faut aborder un sujet qui fâche… Le paiement à l’acte qui nous pousse parfois, pour ne pas décevoir un patient, à accepter des prescriptions qu’au fond de nous-même nous réprouvons. Que celui qui ne l’a jamais fait…
Je me souviens lorsque je m’occupais des relations internationales à L’UNAFORMEC avoir fait des stages de plusieurs semaines dans des cabinets de médecine générale aux USA où, au bout de 5 minutes face a un patient en petite tenue, le médecin disait sans appel « c’est rien ça va passer » exactement ce que je disais à mes enfants quand ils étaient petits… Reste maintenant à le dire aux patients français
Harcèlement sexuel et abus de pouvoir
AIX-EN-PROVENCE
DR MURIELLE MOLLO
L’analyse de certains psychiatres, de l’expression d’un soi-disant « acte manqué ou désir inconscient de déchéance » de la part de DSK, pour expliquer – voire justifier ? - Les faits dont ce dernier est accusé, me laisse perplexe…
Au-delà des accusations portées à l’encontre de ces personnalités politiques, que ce soit DSK, ou Georges Tron, sans vouloir outrepasser la présomption d’innocence, ni anticiper les résultats d’enquêtes en cours, un constat est bien là : les affaires de harcèlement sexuel se suivent, les scandales d’abus de pouvoir se répètent, mais leur interprétation, que ces actes soient avérés ou non, apparaît souvent fantaisiste, voire grivoise ou sexiste…
Laissons donc là, les divagations fumeuses de mes chers confrères, pour nous focaliser un instant sur le vécu des présumées victimes.
En ma qualité à la fois de médecin, mais aussi de victime de harcèlement, et auteur d’un roman exutoire de souffrances, portant précisément sur ce thème, voilà aujourd’hui ce que je peux dire, pour tenter d’en apporter un nouvel éclairage.
Certes, ma plume a volontairement exagéré la facette ambiguë de la relation victime-bourreau, pour éviter de tomber dans une situation simpliste et manichéenne. La « proie », soumise à l’autorité, prise dans le filet de son prédateur et de ses pulsions irrépressibles bassement sous-corticales, se transforme malgré elle, en complice d’un « jeu » pervers. Cercle vicieux, piège inavouable, entraînant une perte de tous les repères.
Acculée au cœur d’un paradoxe sans issue, la victime se retrouve ligotée entre le respect porté à son patron, admirant ses qualités professionnelles, son charisme, et l’aversion ressentie envers l’homme, et la lubricité qu’il s’autorise par abus de pouvoir. Au fil du temps, la victime le devient donc doublement, allant jusqu’à minimiser, voire pardonner les excès de son bourreau, pour récupérer la faute à son propre compte, demeurant sous l’emprise insidieuse d’une spirale infernale qui l’entraîne vers les affres de la dépression et de l’isolement, prisonnière de son mutisme.
Cette profonde ambivalence des sentiments, à l’image du syndrome de Stockholm, oscillant entre désir et rejet, devient donc d’autant plus insoutenable qu’elle génère la culpabilité, qui elle-même engendre la souffrance, concrétisant la cause même, le nœud de cette terrible épreuve, dans laquelle la victime s’enferme, jusqu’à se détruire elle-même…
Mais pour autant, il s’agit d’une situation subie, imposée, jamais choisie ! Car la victime est bien réellement la victime, mais à ce stade de manipulation et de perdition mentale, elle n’en a plus conscience !
Comme le dit Marie-France Hirigoyen, « Le harcèlement sexuel n’est qu’un pas de plus dans le harcèlement moral » et « dans la relation avec les pervers, il n’y a pas symétrie, mais domination de l’un sur l’autre et impossibilité, pour la personne soumise, de réagir et d’arrêter le combat. Il n’y a pas de négociation possible, tout est imposé. »
Il faut faire preuve d’une bonne dose de sincérité et de lucidité, d’esprit critique et d’un recul suffisant, pour parvenir à mettre à nu et décrypter tous les aspects de cette relation imposée, qui n’est autre qu’une agression extrêmement violente.
Enfin, si la seule solution de « survie » est de s’extraire des griffes de son harceleur par la fuite (au mieux, la démission, au pire, le suicide), la reconstruction psychologique, elle, est d’autant plus difficile quand la douleur reste tapie au fond de soi. Aussi est-il primordial de rompre l’omertà pour parvenir à aider celles et ceux que la souffrance a isolés.
Dans une société où les codes changent, les valeurs fondamentales disparaissent, les règles essentielles sont bafouées, la violence s’insinue partout, il est indispensable d’apprendre à toutes les filles à savoir dire « non » et à se protéger, mais aussi de réapprendre à vivre ensemble, tout simplement en bonne entente et entre gens de bonne compagnie, pour un monde toujours meilleur, courtois et attentionné envers son prochain (soyons fous, tentons au moins d’en rêver !)
Le gachis continue
PARIS
DR BERNARD KRON
Après 20 ans de tracasseries et de mise sous le boisseau de la médecine, le gachis continue. L’on veut tendre vers une médecine « zéro défaut », alors que l’on n’est même pas capable d’organiser un " examen concours" qui conditionnera la vie entière et la carrière des futurs médecins.
L’ENC offre plus de places qu’il n’y a de candidats. De nombreux postes hospitaliers dont les gardes sont trop fréquentes et les responsabilités trop lourdes ne sont même plus choisis. Les étudiants préfèrent redoubler une année que de choisir une spécialité ou une ville de faculté qui ne leur conviendrait pas. Ainsi 600 postes de médecine générale n’ont pas été pourvus en 2010.
On accrédite les chirurgiens, mais on est incapable de dire s’ils seront « compétents» et bien formés.
On supprime la spécialité de chirurgie générale pour créer celle d’urgentiste polyvalent et une spécialité de médecine générale, ce qui aggravera la pénurie en médecins généralistes car devenus spécialistes,
ils exerceront une « sous spécialité » mieux rémunérée ou resteront à l’hôpital (90% veulent le salariat).
On fixe des Quotas en cancérologie, ce qui empêchera des chirurgiens compétents d’opérer ces patients en dehors des centres accrédités. Cela permettra dans les centres autorisés, que des opérateurs de qualités
divers et plus ou moins formés puissent opérer ces patients.
On manque de personnels soignants, mais on multiplie les personnels et des structures administratives de plus en plus coûteuses et inutiles.
On nage dans l’incohérence ! L ’État décrète, légifère, impose des normes, crée de nouvelles structures qui paralysent le système libéral. Après la FMC, le CAPI, la DPC et l’ECPP arrivent les ARSA, la nouvelle gouvernance et les communautés hospitalières. Comment faire plus compliqué ?
Il faut redonner à nos enfants l’envie de s’investir dans ces métiers, en sécurisant les études médicales et les carrières. La médecine devrait être embrassée par une élite et non par les « laisser pour compte des grandes écoles ». Le recrutement de médecins en dehors de l’hexagone (plus de 10 000) ne permettra plus de combler le retard, ni de contrôler leurs qualités puisqu’ils sont jugés, non sur leur compétence mais sur la qualité de leur français !
Il faut simplifier le maquis administratif et reprendre depuis le début le cursus des études médicales, favoriser l’évolution des carrières, redéfinir le rôle de l’hôpital et les droits et devoirs de chacun.
La médecine doit sortir de l’emprise des tutelles. Cette « machine » accomplie la tâche ruineuse pour laquelle elle a été mise en place. Elle secrète ses propres services, développe ses systèmes (HAS,
INCA, CNC, CISS, HALDE, URM…) sans se rendre compte qu’elle stérilise la médecine. Elle enlève l’envie à nos enfants de choisir ces métiers qui ont cessé d’être attractifs et prestigieux pour devenir trop pesants.
Tout le système doit être revu en le simplifiant et en le modernisant.
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