C'EST DÉMONTRÉ : les carcinomes cutanés du sujet âgé évoluent sous nos yeux, mais ne retiennent pas l'attention des soignants. Ils sont essentiellement représentés par les carcinomes épithéliaux, c'est-à-dire les carcinomes baso-cellulaires et les carcinomes épidermoïdes. Favorisés par l'exposition solaire cumulée ou intense, leur fréquence avec l'âge ne fait qu'augmenter.
Dans l'étude de prévalence des cancers cutanés conduite récemment dans l'hôpital gériatrique de Charles-Foix (Ivry-sur-Seine) (2), on constate que «80% des cancers cutanés sont situés sur des zones photo-exposées, le plus souvent sur la tête et le cou», déclare le Dr Patricia Senet. La facilité de cette accessibilité à l'examen clinique devrait augmenter son dépistage, mais la réalité est tout autre. On note que ces cancers cutanés sont sous-diagnostiqués, probablement par insuffisance de formation des médecins et des soignants. «Nous en avons tiré comme conclusion qu'un avis dermatologique doit être demandé devant toute lésion cutanée suspecte chez un sujet âgé, a fortiori si elle est située sur une zone photo-exposée, notamment sur l'extrêmité céphalique. Il est même souhaitable que cette population considérée comme à risque élevé de cancer cutané puisse bénéficier régulièrement d'une consultation dermatologique, probablement annuelle. »
Carcinome baso-cellulaire
Le carcinome baso-cellulaire est le plus fréquent des cancers cutanés. Il ne métastase pas, mais évolue par infiltration en profondeur. Il est très destructeur dans certaines zones à risque (zones narinaire et péri-oculaire). Le laisser évoluer prive le patient d'une exérèse locale curative et nécessite alors une chirurgie plus délabrante sous anesthésie générale, avec les problèmes que pose ce type d'endormissement chez le sujet âgé. Sa lésion caractéristique est la perle. C'est une papule de quelques millimètres, très ferme, indolore, translucide et non pigmentée, parcourue de fines télangiectasies.
Cancers épidermoïdes
L'incidence des cancers épidermoïdes est plus faible, mais, contrairement aux carcinomes baso-cellulaires, ils ont une évolution métastatique, d'abord lymphophile. Ils se développent le plus souvent sur des lésions précancéreuses, essentiellement les kératoses actiniques chez des sujets de phototype clair. L'apparition d'une infiltration et/ou leur caractère bourgeonnant doit faire évoquer une transformation maligne (3). En prévention, les kératoses actiniques sont détruites systématiquement par cryothérapie en consultation. Si elles sont trop épaisses, une exérèse est préférable, avec étude anatomopathologique.
Mélanome
Le mélanome, carcinome cutané non épithélial réputé être une tumeur du sujet jeune, n'est pas rare chez le sujet âgé. Le plus connu est le mélanome de Dubreuilh, un mélanome in situ, intraépidermique, situé le plus souvent sur la joue. Il a l'aspect d'une nappe pigmentée irrégulière. Son exérèse complète est impérative. Mais « si l'on exclut ces formes-là, le mélanome du sujet âgé a un taux de mortalité plus élevé en raison de son retard diagnostique», conclut cette spécialiste.
(1) Service de gérontologie, hôpital Charles-Foix, Ivry-sur-Seine (94) et hôpital Tenon, service de dermatologie, Paris 20e.
(2) Fontaine J., Mielczarek S., Meaume S., Senet P. Fréquence des cancers cutanés non diagnostiqués en hôpital gériatrique. « Ann Dermatol Vénéréol » (2008) (sous presse).
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