Cerveau et pensée : une recherche en pleine expansion

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Pierre Buser, professeur émérite de neurosciences à l'université Pierre-et-Marie-Curie, et Rémy Lestienne, directeur de recherche au CNRS, ont voulu rendre « simple » leur ouvrage, intitulé « Cerveau, information, connaissance ». Ils l'ont aussi rendu passionnant pour tous ceux qui se posent des questions à la fois sur les conceptions théoriques du fonctionnement cérébral et sur les mécanismes physiologiques de l'activité mentale.

Certes, de leur propre aveu, « le texte est parfois devenu complexe », même s'ils ont choisi, plutôt qu'une illusoire recherche d'exhaustivité, de mettre plus particulièrement l'accent sur quelques points précis, à partir d'un plan d'une clarté limpide, du traitement des informations sensorielles à la réponse en forme d'action.
Mais s'ils évoquent les dernières acquisitions des neurosciences, aussi abondantes que complexes concernant le codage de l'information sensorielle, le fonctionnement de la synapse et des réseaux neuronaux, les oscillations et les synchronisations propres au tissu cérébral, les mécanismes mis en œuvre dans la perception, l'attention ou la mémoire ou l'intégration sensori-motrice, c'est sans jamais perdre le fil d'une réflexion globale sur le système complexe que constitue le cerveau humain. Ils mettent ainsi en relief de grandes avancées conceptuelles : il est désormais clair notamment qu'une fonction cognitive complexe met en jeu l'activité de plusieurs zones cérébrales en parallèle, que « la représentation mentale d'une perception non présente... active en fait les mêmes structures qui le seraient par le même objet réellement perçu » ou que le fonctionnement cérébral repose « sur une gestion très rigoureuse du temps ». De même, ils font le point des grandes questions en suspens, montrant par exemple pourquoi « le modèle naguère influent de cerveau-ordinateur n'a plus aujourd'hui la faveur qu'il a connue », ou comment peuvent s'articuler l'autonomie des groupes de neurones et la grande capacité d'intégration fonctionnelle du cerveau. Enfin, ils soulignent que la conscience fait désormais partie du champ d'études des spécialistes modernes de la cognition, ceux-ci ayant bel et bien confirmé expérimentalement l'existence d'un inconscient décelable. Reste, entre autres recherches, à préciser ses liens avec « l'inconscient des profondeurs ».

Respectivement professeur de psychologie cognitive, professeur de radiologie et médecin chercheur au CEA, les auteurs de « Cerveau et psychologie » entendent bien renforcer le rapprochement entre psychologie et neurosciences et faire oublier le vieux dualisme à la Descartes, en s'appuyant essentiellement sur les résultats obtenus par l'imagerie cérébrale, dans un ouvrage très technique, assez abondamment illustré. Ils dissèquent d'abord le cerveau, à la manière des anatomistes et des histologistes les plus pointus, puis montrent comment des chercheurs ont établi des cartes cérébrales « probabilistes » à l'intention des neurochirurgiens qui ont à intervenir sur des cerveaux très différents d'un individu à l'autre.
C'est de façon tout aussi détaillée qu'ils décrivent les différentes techniques d'imagerie cérébrale anatomique et fonctionnelle à partir desquelles se révèle le cerveau neurobiologique, et en particulier certaines de ses fonctions cognitives, de l'attention au langage, au raisonnement logique ou à la conscience.
Conscients de la longueur et de la rudesse du chemin qui reste à parcourir à leur discipline, les auteurs n'en sont pas moins enthousiastes : « Le fait que l'Homme ait trouvé les moyens technologiques d'une interrogation scientifique sur lui-même, y compris sur les liens intimes entre son cerveau et sa pensée, a déjà un impact perceptible sur notre société », notent-ils avec satisfaction.

« Cerveau, information et connaissance », Pierre Buser et Rémy Lestienne, CNRS Editions, 230 pages, 30 euros.
« Cerveau et psychologie », Olivier Houdé, Bernard Mazoyer, Nathalie Tzourio-Mazoyer, PUF, 614 pages, 28 euros.