TOUT A ÉTÉ DIT, avec parfois quelques écarts significatifs entre les différentes rumeurs. Profitant de la toute récente parution de l'exposé des motifs du projet de loi portant sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat (texte transmis au Conseil d'Etat), nous ferons ici le point sur ce qui pourrait être la fiscalité de demain.
Article 1er : les heures supplémentaires
Conformément à la volonté exprimée par le président de la République de permettre aux salariés de « travailler plus pour gagner plus », l'article 1er prévoit l'exonération d'impôt sur le revenu des heures supplémentaires effectuées à compter du 1er octobre 2007 et un allégement de cotisations sociales pour le salarié. Les employeurs bénéficieraient également d'un allégement de cotisations sociales qui «vise à compenser le surcoût des heures supplémentaires et à inciter l'entreprise à accroître son offre de travail».
Par ailleurs, les heures supplémentaires n'entraîneraient plus une baisse de l'allégement des charges sociales.
Une mesure qui vise l'ensemble des salariés, qu'ils relèvent du secteur public ou privé. L'ensemble des heures supplémentaires serait pris en compte, qu'il s'agisse des heures dites du contingent, des heures choisies ou des heures effectuées dans le cadre d'une convention de forfait. Les heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel bénéficieraient aussi de l'exonération fiscale et sociale.
Néanmoins, pour éviter tout abus, ce bénéfice serait accordé «dans des limites permettant d'éviter les optimisations résultant d'une baisse du temps de travail contractuel». Autrement dit, il s'agit d'empêcher les employeurs de céder à la tentation de remplacer un plein-temps par un mi-temps assorti d'autant d'heures supplémentaires.
Autre changement proposé : le taux de majoration des heures supplémentaires dans les entreprises de vingt salariés au plus, qui était fixé jusqu'au 31 décembre 2008 à 10 %, serait porté à 25 % au 1er octobre 2007, afin que l'ensemble des salariés bénéficie de la même majoration.
Autre écueil devancé par le projet de loi : «Afin de ne pas modifier l'économie d'autres avantages fiscaux ou sociaux soumis à condition de ressources dont bénéficieraient les salariés concernés», il est proposé de réintégrer dans le revenu fiscal de référence la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires, et de la prendre en compte dans le calcul des limites conditionnant le bénéfice de la prime pour l'emploi (PPE).
Article 2 : pour les étudiants qui doivent travailler
Concernant les étudiants qui doivent travailler pour financer leurs études, l'article 2 prévoit une exonération d'impôt sur le revenu des salaires qu'ils perçoivent, dans la limite de trois fois le Smic mensuel. L'exonération, actuellement limitée aux rémunérations perçues par les jeunes gens âgés de vingt et un ans au plus pour les emplois qu'ils occupent pendant les seules vacances scolaires ou universitaires (jobs d'été), serait étendue aux salaires perçus par les élèves ou étudiants (étudiants salariés) en contrepartie d'une activité exercée durant l'année scolaire ou universitaire. Et la limite d'âge, appréciée au 1er janvier, serait relevée de vingt et un ans à vingt-cinq ans au plus.
Enfin, en vue de préserver, le cas échéant, leurs droits à la prime pour l'emploi (PPE) calculés sur les seuls revenus imposés, cette exonération serait applicable sur option des intéressés.
Article 3 : intérêts d'emprunt de la résidence principale
La mesure largement annoncée, dans des versions parfois aussi diverses que variées, d'aide à l'acquisition de la résidence principale fait l'objet de l'article 3. Il propose d'instituer un avantage fiscal sur « les intérêts d'emprunt supportés pour l'acquisition ou la construction d'un logement à usage d'habitation principale ». Un avantage qui rappelle une ancienne mesure supprimée lors de la mise en place du prêt à taux zéro.
Techniquement, cet avantage, qui concernerait tous les accédants (primo-accédants ou non), prendrait la forme d'un crédit d'impôt sur le revenu égal à 20 % des intérêts d'emprunt payés, à compter du premier jour du mois suivant la date d'entrée en vigueur de la loi, au titre des intérêts afférents aux cinq premières années de remboursement, dans la limite d'un montant annuel d'intérêts ne pouvant pas excéder 3 750 euros pour une personne célibataire, veuve ou divorcée, et 7 500 euros pour un couple soumis à imposition commune (soit un crédit de 20 % sur 7 500 = 1 500 euros). Cette somme serait majorée de 500 euros par personne à charge, soit un crédit de 2 % (7 500 + 500 + 500) = 1 700 euros pour un couple avec deux enfants.
Qu'en est-il de ceux qui sont devenus propriétaires ces dernières années ? Certes, comme cela a été annoncé, cet avantage fiscal s'appliquerait aussi bien aux nouveaux emprunts qu'aux emprunts en cours. Mais, si le projet de loi demeure dans sa forme actuelle, ce sera «uniquement pour les intérêts payés à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi et afférents aux cinq premières annuités suivant l'acquisition de l'habitation principale». Autrement dit, si vous avez acheté votre maison il y a quatre ans et si la loi n'est votée que l'an prochain, vous ne pourriez pas bénéficier du dispositif ; et si votre achat date de deux ans, vous ne pourriez en bénéficier que partiellement.
Article 4 : droits supprimés pour le conjoint survivant
«Afin de faciliter la transmission des patrimoines représentant le fruit d'une vie de travail», l'article 4 propose un allégement des droits de mutation à titre gratuit. Concrètement, les droits de succession seraient supprimés au profit du conjoint survivant et du partenaire lié au défunt par un pacte civil de solidarité. En outre, chacun des ascendants et chacun des enfants vivants ou représentés bénéficieraient d'un abattement personnel de 150 000 euros (au lieu de 50 000 actuellement) sur les successions, mais aussi les donations.
Un abattement spécifique de 5 000 euros est également proposé pour les successions dévolues aux neveux et nièces. En revanche, l'abattement global de 50 000 euros applicable sur l'actif net successoral serait supprimé : rappelons que, actuellement, lors d'une succession, est appliqué un abattement global de 50 000 euros ; une fois que cet abattement est réalisé, chaque héritier bénéficie d'un abattement supplémentaire (76 000 euros pour le conjoint qui acquitte des droits de succession au-delà ; 50 000 euros pour les parents qui héritent de leur enfant ou les enfants qui héritent de leur parent).
Les donations seraient donc également facilitées par le triplement proposé du plafond précédemment évoqué : chaque parent pourrait donner 150 000 euros tous les six ans à chacun de ses enfants, sans avoir à acquitter des droits de donation (contre 50 000 euros aujourd'hui). S'y ajoute une seconde mesure favorisant la transmission entre vifs : la création d'une exonération de droits de mutation applicable aux dons en numéraire dans la limite de 20 000 euros au profit d'un enfant, d'un petit-enfant, d'un arrière-petit-enfant ou, à défaut d'une telle descendance, d'un neveu ou d'une nièce. Une sorte de bis repetita de la « donation Sarkozy » de 30 000 euros qui avait été mise en place, temporairement, durant l'année 2004-2005.
Article 5 : un bouclier fiscal à 50 %
Comme nous l'avions annoncé le 13 juin, à compter du 1er janvier 2007, les impôts directs payés par un contribuable ne devraient pas excéder 50 % de ses revenus, hors contributions sociales, contre 60 % en 2006. De plus, les prélèvements sociaux seraient inclus dans la somme des impôts plafonnés.
Ces nouvelles dispositions devraient s'appliquer pour la première fois en 2008, pour déterminer le plafonnement des impositions relatives aux revenus réalisés à compter de 2006 (vous payez en 2007 des impôts sur le revenu 2006 ; si le montant des impôts 2006 dépasse 50 % de vos revenus, vous êtes remboursés de la différence en 2008).
Article 6 : déduire l'aide aux PME de son ISF
L'article 6 propose de permettre aux contribuables qui le souhaitent d'affecter tout ou partie de leur impôt de solidarité sur la fortune (ISF) au financement de PME ou d'organismes d'intérêt général. Il prévoit ainsi une réduction d'ISF égale aux versements effectués dans la limite annuelle de 50 000 euros :
– soit au titre de souscriptions directes ou indirectes au capital des PME, quelle que soit leur forme sociale : société anonyme (SA), société à responsabilité limitée (Sarl), société coopérative de production (Scop),
– soit au titre de dons au profit des fondations reconnues d'utilité publique, des établissements publics de recherche, des établissements publics d'enseignement supérieur et des entreprises ou des associations d'insertion.
Articles 7 et 8 : les parachutes dorés
Enfin, les articles 7 et 8 s'attaquent comme promis aux fameux parachutes dorés de certains dirigeants, en subordonnant notamment la rémunération à la performance et en instaurant une obligation de transparence.
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