L'envenimation.
La toxicité du venin de la vipère est due à des enzymes protéolytiques responsables de lésions de l'endothélium vasculaire entraînant œdème et hématomes et à des hémotoxines responsables d'une coagulopathie de consommation.
La morsure siège souvent à une extrémité, avec deux lésions punctiformes distantes de 6 à 10 mm. Toutes les morsures ne sont pas suivies d'envenimations (pas d'injection de venin, vêtements protecteurs) ; ces morsures « blanches » (de 20 à 40 % des cas) sont le grade 0 de la classification clinique appréciant la gravité de l'envenimation. L'absence de réaction locale autour de la morsure après un délai de 4 heures à 6 heures permet d'affirmer l'absence d'envenimation.
Le grade 1 d'envenimation minime correspond à un œdème isolé autour de la morsure qui est généralement douloureuse.
Le grade 2 est une envenimation modérée caractérisée par un œdème régional qui atteint l'articulation sus-jacente du membre et par des signes généraux modérés (hypotension artérielle, vomissements, diarrhée).
Le grade 3 est une envenimation sévère avec un œdème extensif atteignant le tronc, des signes généraux sévères (état de choc, hémorragies, détresse respiratoire).
Les facteurs aggravant l'envenimation sont la localisation (visage), les âges extrêmes, la grossesse car il existe une toxicité fœtale du venin et les antécédents cardio-vasculaires.
En pratique.
Tout patient mordu par une vipère ou un serpent non identifié doit être hospitalisé sauf s'il consulte au-delà des 6 premières heures et qu'il est asymptomatique (pas d'envenimation).
Une envenimation grade 1 nécessite une hospitalisation minimale de 24 heures, le traitement est symptomatique.
Les envenimations grades 2 et 3 doivent bénéficier d'un traitement intraveineux par sérum antivipérin (ViperfavTM) composé de fragments F(ab')2 d'immunoglobulines équines antivenimeuses. Ce sérum commercialisé depuis quatre ans a une meilleure tolérance que les anciens sérums, mais il n'est disponible qu'en milieu hospitalier du fait de réactions anaphylactiques potentielles. L'intérêt d'un traitement précoce est de limiter les lésions endothéliales qui, une fois survenues, évoluent pour leur propre compte en dépit du sérum qui neutralise le venin circulant. Un avis doit être demandé avant mise en route de ce traitement auprès d'un centre antipoison.
Une antibiothérapie prophylactique n'est pas indiquée même si des infections bactériennes des tissus mous sont possibles. La vérification de la vaccination antitétanique est systématique.
La prévention.
La prévention des morsures de vipères passe par des conseils de bon sens comme ne pas chercher à attraper une vipère (circonstances de morsures souvent rencontrées chez des patients alcoolisés), débroussailler les alentours des habitations, porter des chaussures montantes et un pantalon pour aller dans les broussailles.
Enfin, l'évolution sociale incite à rester vigilant et prudent devant toute morsure de serpent non autochtone (ou non identifié) et à contacter au plus vite le centre antipoison de référence.
F. Audeberg, M. Sorkine, C. Bon. Envenoming by viper bites in France : clinical gradation and biological quantification by Elisa. Toxicon 1992 ; 30 : 599-609.
M. Sorkine. Les morsures de serpents en France : aspects cliniques, biologiques et thérapeutiques. In Envenimations Perspectives en réanimation. Ed. Arnette Blackwell ; Paris 1996 ; 83-93.
P. Harry, L. de Haro, P. Asfar, J.-P. David. Evaluation de l'immunothérapie antivipérine par fragments F(ab')2 purifiés (ViperfavTM) par voie veineuse. Presse Med. 1999 ; 28 : 1929-34.
Ne pas faire
Il ne faut pas :
- sucer, inciser ou cautériser la plaie ;
- mettre un garrot artériel ;
- les pompes aspirantes n'ont aucun intérêt ;
- une corticothérapie ou une héparinothérapie, locale ou générale, n'a aucune indication.
Que faire ?
Sur les lieux de la morsure ou en consultation :
- noter l'horaire de la morsure ;
- rassurer le patient, le mettre au repos (éviter de marcher ou encore plus de courir) ;
- désinfecter la plaie avec un antiseptique ;
- ôter tout ce qui peut faire garrot (bagues, bracelets) ;
- immobiliser le membre au repos (écharpe ou attelle) ;
- appliquer de la glace ;
- vérifier la protection antitétanique ;
- poser une voie veineuse si le patient est hypovolémique ;
- orienter systématiquement le patient vers l'hôpital le plus proche en ambulance médicalisée ou non, selon les critères habituels.
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