BERNARD KOUCHNER a tout à fait raison quand il dit que «l'acharnement» militaire d'Israël contre Gaza «n'aura aucun résultat». Il a tout à fait raison d'ajouter que «la solution, c'est la reprise des pourparlers». Mais son jugement omet de rappeler les provocations du Hamas ; le Premier ministre israélien, de toute façon, ne peut pas ouvrir une négociation avec le Hamas (pour autant que le Hamas veuille négocier !) tant que les roquettes pleuvent sur Sdérot et maintenant sur Ashkelon. Aucun gouvernement, face à un bombardement de roquettes, ne se mettrait aussitôt à négocier avec l'agresseur. Il lui rendrait d'abord la monnaie de sa pièce et même M. Kouchner peut le comprendre.
Deux mauvaises options.
Quant à la « disproportion » des moyens utilisés par Israël face aux roquettes, c'est une affaire de jugement subjectif. On ne peut que s'incliner devant les victimes, à quelque camp qu'elles appartiennent, et surtout les victimes civiles. Mais on ne peut pas démontrer aux Israéliens qu'ils n'ont pas pu arrêter les tirs de roquettes et les accuser en même temps de taper trop fort. A partir de ce constat, il y a deux conséquences possibles : soit Israël admet que la voie militaire est inefficace et tente de négocier, sans doute avec un tiers, un cessez-le-feu ; soit l'Etat hébreu va chercher les roquettes là où elles sont et commence à ratisser la totalité du territoire de Gaza, avec le bain de sang qui accompagnera le mouvement de ses troupes.
LE HAMAS NE VEUT PAS NEGOCIER IL VEUT CREER ASSEZ DE DESORDRE POUR SE DEBARASSER DU FATAH ET D4ABBAS
La deuxième option doit être rejetée par les dirigeants israéliens parce qu'elle ne va nulle part sur le plan politique et que son résultat militaire n'est pas sûr alors qu'il coûterait très cher en termes d'image à Israël. Cela ne veut pas dire pour autant que la première option soit meilleure. Certes, sous la pression des Américains et des Européens, il est possible qu'Israël recule. Les roquettes continueront à tomber sur son territoire sans qu'il réagisse. Le Hamas criera victoire, comme il l'a déjà fait lundi dernier.
Mais il y a pire : ce n'est pas Mahmoud Abbas qui tire les roquettes contre Israël, c'est le Hamas. Ce n'est pas Abbas qui peut conclure la trêve, c'est le Hamas. Et c'est ce que veut le Hamas : discréditer M. Abbas pour se débarrasser de lui une fois pour toutes.
En outre, les intégristes palestiniens se garderont bien d'entrer dans une conversation polie avec les Israéliens. Ils ont juré qu'ils ne parlementeraient pas avec leurs ennemis. Ils se contentent de faire jouer un rapport de force qui restera en leur faveur tant qu'Israël ne pourra pas sortir de ce cercle vicieux qui lui interdit de se défendre pour des raisons morales.
La secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, qui est irritée par les derniers combats de Gaza parce qu'ils ont mis fin aux négociations de paix, entend bien raccommoder M. Abbas et Ehud Olmert. Celui-ci ne pourra céder aux pressions des Etats-Unis et de l'Europe, fussent-elles amicales, qu'en reprenant les pourparlers sous les bombardements de roquettes. Les meilleurs diplomates occidentaux ne pourront jamais se mettre à la place d'un chef de gouvernement qui a des comptes à rendre à sa population.
Le problème d'Abbas.
De sorte que, si Israël doit rester stoïque face aux menées du Hamas, cela signifie que le Hamas est d'abord le problème de M. Abbas dont l'incapacité à juguler le mouvement terroriste est notoire. Le Hamas ne veut pas non plus que M. Abbas négocie la paix ; il ne veut pas que l'armée israélienne cesse ses incursions à Gaza ; c'est dans une apothéose de violence qu'il entend bien prendre le pouvoir non seulement à Gaza, mais aussi en Cisjordanie, éliminer Abbas et le Fatah par les moyens radicaux propres au totalitarisme et s'imposer définitivement non pas comme l'interlocuteur d'Israël, mais comme son principal ennemi. Le Hamas veut tout simplement établir avec Israël un rapport de force militaire. Les roquettes, dont on continue de dire, assez bêtement, dans les médias qu'elles sont « artisanales » (comme si leurs victimes pouvaient faire la différence entre ce qui est artisanal et ce qui ne l'est pas), continueront à tomber. Pour M. Olmert, le dilemme restera entier, qu'il accepte la bataille ou qu'il la refuse.
La diplomatie occidentale ne peut pas s'engager davantage dans le dialogue avec les Palestiniens si elle ne tient pas compte, enfin, de la réalité d'aujourd'hui, c'est-à-dire la vulnérabilité d'Israël, telle qu'elle a été démontrée lors de la guerre du Liban. On laissera le lecteur imaginer ce qui se passera si le Hamas et le Hezbollah tirent en même temps, s'ils prennent Israël dans un étau Nord-Sud ; et on laissera les grandes chancelleries occidentales décider à partir de quel nombre de victimes israéliennes Israël sera moralement autorisé à dévaster Gaza.
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