POUR LA DROITE, le résultat des municipales est désastreux. Pas pour les Français. Il ne faut jamais se désoler des conséquences d'un scrutin, sauf quand il risque, comme au premier tour de la présidentielle de 2002, de déboucher sur une altération profonde du système.
La puissance de l'opposition dans les régions, les départements et les communes rappelle à un pouvoir que la Constitution protège contre les aléas, qu'il n'est pas seul et qu'il ne peut pas, en toute occasion, faire ce qui lui chante. Compte tenu de la leçon infligée à la majorité parlementaire par les municipales, le gouvernement sera obligé, quoi qu'il en dise, d'orienter son action vers tous ceux qui lui ont signifié leur mécontentement.
Un mandat indemne.
Cela ne signifie pas qu'il faille rejoindre l'analyse du PS, dont le zèle critique le conduirait presque à exiger des élections anticipées (qui ne relèvent que du bon vouloir du chef de l'Etat). Les socialistes savent mieux que quiconque que la hargne de leurs attaques ne remplace pas un programme crédible qu'ils n'ont pas encore adopté.
En outre, leur autorité renforcée sur la gestion des communes leur permet d'appliquer leurs idées partout où ils gouvernent les localités, les villes, les régions. Tout cela, en somme, n'est pas nouveau : la France a su s'accommoder de deux projets qui ne coexistent pas forcément d'une manière chaotique. Il est impossible en revanche d'attribuer à des élections municipales l'importance ou les conséquences des législatives. M. Sarkozy et l'UMP disposent d'un mandat de cinq ans dont ils n'ont pas encore consommé un cinquième. Ils s'attaquent avec sérieux à des réformes dont les effets ne sauraient se faire sentir avant plusieurs mois ou quelques années ; ils ont ouvert un chantier multiple, complexe, ardu dans un pays dont personne n'ignore les conservatismes et les scléroses ; ils travaillent dans un climat mondial affreusement dégradé ; enfin ils appliquent dans tous les domaines les impératifs dictés par le pragmatisme. Il est beaucoup trop tôt pour dire qu'ils ont échoué.
LE MAL DU POUVOIR EST AU COEUR DU POUVOIR, C'EST-A-DIRE A L'ELYSEELes erreurs de Sarkozy.
La gauche tire son principal atout non de sa capacité à mieux gérer l'adversité que la droite, mais des erreurs commises principalement et personnellement par M. Sarkozy qui a d'abord dit que les municipales seraient un test national, ce qui n'est jamais vrai du point de vue constitutionnel, puis qu'elles auraient une signification locale, puis qu'il en tirerait la leçon. A quoi riment toutes ces déclarations contradictoires, sinon à compliquer la tâche même du président ?
Tout le monde aura remarqué que le Premier ministre, quant à lui, a gardé le cap des réformes moins d'une demi-heure après la diffusion des estimations. Le président ne va pas « tirer la leçon » des municipales. En réalité, il s'est aperçu qu'un remaniement gouvernemental en profondeur compliquerait son action à la veille de la présidence française de l'Europe. Il a renoncé à contraindre les ministres battus aux municipales à démissionner. En même temps qu'il parlait de remaniement il y a trois semaines, il disait qu'il garderait M. Fillon, puis Jean-Louis Borloo, et chantait tant les louanges de Rachida Dati qu'on ne voyait guère qui, dans cette affaire, allait perdre son portefeuille.
En outre, personne ne peut ignorer que la droite a été victime de la démobilisation de son électorat. La participation n'a été que 65 %. Or, sur le plan national, l'écart entre la gauche et la droite n'est que de deux points. Si on considère tous ces paramètres, on tend à relativiser le succès de la gauche, ce que nous ne ferons pas. Elle a fait un tabac.
En attendant les socialistes.
Toute la question porte sur l'usage qu'elle est autorisée à faire de ce succès. A nos yeux, elle ne serait en mesure de contester le programme des réformes que si elle pouvait afficher une plate-forme large et précise sur laquelle elle aurait formé un consensus. Ce n'est pas le cas.
La France doit-elle, dans ces conditions, attendre que les socialistes se décident, qu'ils fédèrent l'ensemble des forces de gauche, qu'ils nous disent de façon enfin convaincante comment ils vont sortir le pays du mauvais pas où il se trouve ? Non. Une expérience a été lancée en 2007 et il faut aller au bout de cette expérience. Sinon, nous allons rouvrir des chantiers sans avoir refermé les précédents.
Il nous semble que le mal du pouvoir est au coeur du pouvoir : à l'Elysée. Il nous semble que M. Sarkozy n'est, en définitive, pas bien entouré et que ses conseillers devraient soit se taire ou mieux inspirer le président, soit se démettre. Tout le monde sait d'où viennent les pires idées émises depuis trois mois par le chef de l'Etat, d'où est venu un texte adressé aux Africains et qui était pratiquement xénophobe, comment l'idée de l'Union méditerranéenne aurait échoué si Angela Merkel ne l'avait amendée, d'où viennent encore les pirouettes insupportables sur le pouvoir d'achat, pourquoi les franchises médicales n'ont pas été mises en oeuvre de manière à protéger les pauvres ; pourquoi un certain voyage en Syrie était assuré d'échouer. Conjugué à ces funestes influences, le caractère même de M. Sarkozy qui, au lendemain de sa victoire de 2007, a cru qu'il pouvait tout faire, y compris ce que les Français ne lui demandaient pas (son excursion dans le domaine des religions, par exemple), l'a desservi. Mais, à notre avis, le président change. D'aucuns estiment qu'on ne pourra jamais le réformer. Il demeure qu'en politique la nécessité fait loi.
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