IL Y A 420 000 ans, la Terre a connu une période de climat comparable au nôtre, ont découvert des scientifiques au terme d'une analyse de glaces antarctiques sur les 740 000 dernières années, selon un article publié dans la revue « Nature » (10 juin). « Le réchauffement global de la planète n'a toutefois jamais été aussi rapide qu'aujourd'hui », souligne Valérie Masson-Delmotte, du Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement, à Gif-sur-Yvette, et l'un des coauteurs de l'article.
Les résultats de cette étude sont le fruit de huit ans de collectes d'échantillons extraits à la base scientifique franco-italienne Concordia, située au Dôme C, à plus d'un millier de kilomètres à l'intérieur du continent antarctique. Ils ont été obtenus grâce à la mobilisation de scientifiques et d'ingénieurs originaires de dix pays européens dans le cadre du projet Epica (European Project for Ice Coring in Antarctica), avec le soutien logistique de l'Institut polaire français Paul-Emile Victor (Ipev). Ces résultats révèlent l'évolution du climat (température et composition atmosphérique) des 740 000 dernières années. Il s'agit de la plus ancienne reconstitution climatique jamais obtenue à partir de carottes glaciaires.
Les équipes françaises du CEA et du Cnrs ont largement contribué à l'obtention et à l'interprétation de ces résultats. Les analyses de la teneur en deutérium de la glace, qui permettent d'estimer l'évolution de la température, ont été réalisées au Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (CEA-Cnrs). Les analyses de la composition atmosphérique, notamment des gaz à effet de serre (gaz carbonique et méthane) et des poussières ont été obtenues par le Laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement (Cnrs-université Joseph-Fourrier à Grenoble).
Les auteurs de la publication mettent en évidence trois résultats majeurs. Le premier, c'est que les climatologues savent désormais que depuis 740 000 ans, la Terre a subi huit cycles, marqués par des alternances de périodes glaciaires et de périodes plus chaudes, dites interglaciaires, avec un changement brutal du rythme de ces cycles il y a 420 000 ans. Les périodes chaudes des 420 000 dernières années sont caractérisées par une température similaire à celle que nous connaissons aujourd'hui alors que les plus anciennes étaient légèrement plus froides mais duraient plus longtemps.
Le deuxième résultat obtenu par les chercheurs indique que la période chaude la plus longue durant ces 740 000 ans a eu lieu il y a 420 000 ans et a duré environ 28 000 ans. Cette période peut être considérée comme analogue à celle que nous connaissons actuellement (période qui a commencé il y a environ 10 000 ans), notamment parce que les conditions astronomiques, orbite et axe de la Terre qui influencent l'ensoleillement, sont identiques. Ces résultats suggèrent que la prochaine entrée en glaciation n'aura pas lieu avant plusieurs millénaires.
Les gaz à effet de serre.
Enfin, troisième résultat, les analyses des bulles d'air emprisonnées dans la glace confirment que les teneurs actuelles en gaz à effet de serre atteignent le plus haut niveau jamais vu au cours des 440 000 dernières années. Les gaz à effet de serre dus aux activités humaines jouent incontestablement un rôle dans l'évolution actuelle du climat, mais l'ampleur des conséquences constituent une grande inconnue.
Selon les chercheurs, ces premières analyses des carottes de glace d'Epica ouvrent déjà de nouvelles perspectives pour mieux comprendre les mécanismes qui pilotent l'évolution naturelle du climat, notamment les relations entre les teneurs en gaz à effet de serre et les températures. La recherche de glaces plus anciennes au coeur du continent antarctique constituera un enjeu majeur des projets futurs en glaciologie : un des grands défis de l'Année polaire internationale (2007/2008) en cours d'élaboration.
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