Ce que disent les monnaies

Publié le 20/06/2002
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Antiquités

L'histoire de la monnaie royale commence en fait avec Louis IX. Loin de passer sa vie la tête dans les étoiles du paradis, le saint roi n'était pas détaché des contingences financières, du moins quand il s'agissait des intérêts du royaume. C'est lui qui réintroduit en France la frappe de la monnaie d'or, disparue depuis l'Antiquité, et en fait un monopole royal, à l'exclusion des grands féodaux qui avaient, eux aussi, droit de battre monnaie sur leurs terres.

L'écu d'or de 1266, frappé d'un écusson fleurdelisé, est aujourd'hui introuvable, même sur plusieurs générations de collectionneurs. Les pièces du règne de Philippe le Bel, (dont les numismates affirment qu'il ne fut pas le grand manipulateur qu'on prétend), sont plus présentes sur le marché, et certaines sont même accessibles. Et plus encore celles de ses successeurs, les acteurs de la guerre de Cent Ans.
Les monnaies capétiennes ne sont pas personnalisées au profil reconnaissable du souverain régnant, comme ce sera le cas à partir du XVIe siècle. Elles affichent les symboles de la royauté dont leur rôle est d'affirmer le prestige. L'image du monarque y figure sceptre en main (la masse d'or), siégeant sur son trône (la chaise d'or). Symbole encore plus fort, la Couronne d'or du règne de Philippe VI, une couronne ouverte, ornée de rosace et entourée de six fleurs de lis, est considérée comme une des plus belles monnaies françaises, et des plus rares, vedette en tous cas de la vente de cette semaine, avec un exemplaire de 5,42 grammes, « très beau à superbe », estimé 38/45 000 euros.

L'écu usurpateur

Une couronne que revendique comme on sait Edouard III d'Angleterre, qui s'arroge à son tour le droit régalien de frapper sur le sol français un écu d'or le représentant sur un trône gothique avec un écu fleurdelisé. Cette pièce usurpatrice n'est apparemment pas très recherchée puisque, malgré son état « superbe », elle n'est créditée que de 6 000/7 500 euros, trois fois moins que le « salut d'or » du pseudo règne d'Henri V représentant un écu écartelé de France et d'Angleterre avec le mot « AVE » (salut en latin) dont on espère 18/23 000 euros.
La guerre de Cent Ans fit considérablement avancer l'art monétaire, par les mouvements de richesse qu'elle entraîna. Il fallait de l'or pour financer la guerre, et il en circula beaucoup, de France en Angleterre surtout, pour payer les rançons exorbitantes liées aux mœurs guerrières de l'époque. Celle du roi Jean, bien sûr, celles aussi (il y en eut plusieurs) de du Guesclin et autres seigneurs de la guerre qui mettaient un point d'honneur à se faire racheter le plus cher possible, pour le plus grand profit du trésor britannique !
La monnaie est aussi instrument de propagande. Pour damer le pion au « noble d'or » britannique, Philippe VI, encore lui, édite « l'ange d'or » en 1340, où Saint-Michel, terrassant le dragon anglais, proclame clairement le bon droit du capétien. L'archange, pas plus que Saint-Georges qui lui succède sur le « florin Georges », n'empêche la débâcle de Crécy en 1346.
Il fut donc abandonné et c'est en 1360 qu'apparaît le « franc à cheval », lié au rachat de la captivité de Jean le Bon et dont on a tant parlé au moment du passage à l'euro. Chargées de redresser les finances du royaume après les désastres des années 1350/1360, ces deux pièces ne sont pas spécialement rares et sont accessibles, sauf état exceptionnel, à moins de 1 000 euros. Il n'en figure pas dans la vente.

Lundi 24 juin, 14h, Hôtel Drouot, salle 12, PIASA (expert, Sabine Bourgey).

Françoise DEFLASSIEUX

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7151