Théâtre
Anne-Marie Lazarini s'est prise de passion pour ce texte oublié de Robert Pinget qu'elle a découvert en lectrice curieuse de répertoires très différents, dans une bibliothèque... Elle sait désormais son Pinget par cur, elle en apprécie l'étrangeté, l'humour acide, les humeurs noires, les rires sarcastiques et on ne sait quelle douleur tenace qui soulève sans cesse les textes, romans, récits, théâtre.
Tout est en place pour que cette production trouve le juste ton. Mais on mentirait si l'on ne disait pas à quel point représenter Pinget est difficile : le premier soir, jour où la presse était invitée, les interprètes n'ont pas pris comme il le fallait la pièce. Comme un orchestre qui n'aurait pas entamé dans le bon ton. Résultat : une bonne représentation d'un théâtre insolite, avec des personnages pittoresques, des acteurs justes mais qui ne jouaient pas ce qui est consubstanciel à Pinget, cette inquiétante étrangeté nourrie de désespoir métaphysique.
Pourtant les signes de l'irréalité sont là : dans le décor et les lumières de François Cabanat, avec ces rangées de valises disposées sur le plateau entre le kiosque déglingué de la vendeuse de journaux, Madame Flan (Sylvie Herbert) et l'abri précaire de Clope (Philippe Lebas) ; dans les costumes subtilement décalés de Dominique Bourde, dans le choix des interprètes, Frédéric de Goldfiem (Pierrot), Bruno Andrieux (Monsieur Plot), Isabelle Mentré (Madame Boulette), Geneviève Yeuillaz (Madame Tronc).
Ici, ailleurs. Demeurer, partir. Bricoler, s'en aller. Répéter, oublier. S'entêter, lâcher prise. On est exactement dans la question du divertissement pascalien et pas dans une aimable et déroutante comédie comme aurait pu le faire penser la première représentation. Mais jouer Pinget est très difficile. Ce n'est pas Beckett et « Ici ou ailleurs » est une pièce singulière mais qui n'est pas sans faiblesses. Elle donne peu d'appuis aux interprètes pour trouver la juste hauteur de ton. C'est donc au metteur en scène de fixer l'échelle. On le répète, c'est le type même de production qui a besoin du répondant du public pour que s'instaure l'équilibre entre ce qui se raconte et ce que cela veut raconter...
Théâtre Artistic Athévains, les mercredi et jeudi à 19 h, les mardi, vendredi, samedi à 20 h 30, en matinée les samedi et dimanche à 16 h. Durée : 1 h 30 sans entracte. (01.43.56.38.32).
Le texte, qui n'était plus disponible, est publié, avec l'accord des Editions de Minuit, à « L'Avant-Scène Théâtre », n° 1107 (10 euros). A noter, dans le foyer du théâtre, une exposition des peintures de Robert Pinget.
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