L' INCIDENCE de la cardiomyopathie du péripartum est, aux Etats-Unis, de 1 sur 3 000 à 4 000 naissances. Elle est définie cliniquement, depuis 1997, comme la survenue d'une insuffisance cardiaque inexpliquée au cours du dernier mois de la grossesse ou des cinq mois suivant l'accouchement, et sans maladie cardiaque préalable.
L'évolution est variable. Alors que 20 % des femmes meurent ou survivent seulement grâce à une transplantation cardiaque, la majorité récupère soit partiellement, soit complètement. Pour celles qui récupèrent et souhaiteraient une nouvelle grossesse, il existe peu de données sur lesquelles se baser pour établir des recommandations. Il semble exister un risque accru de récidive au cours d'une grossesse ultérieure.
Elkayam et coll. (university of Los Angeles, Californie) ont étudié la question. Les investigateurs ont envoyé un questionnaire à l'ensemble des membres de l'American College of Cardiology (15 000 cardiologues). Une minorité des cardiologues ont renvoyé le questionnaire (409). Sur la base des réponses, les auteurs ont identifié 92 femmes diagnostiquées avec une cardiomyopathie du péripartum et qui ont eu ensuite une autre grossesse.
Après avoir obtenu l'accord des patientes, ils ont pu passer en revue les dossiers médicaux de 44 de ces femmes : 28 d'entre elles avaient retrouvé leur fonction ventriculaire normale avant la grossesse suivante (groupe 1), et les 16 autres femmes présentaient une insuffisance ventriculaire gauche persistante.
Des biais sont possibles
Les auteurs reconnaissent que leurs données, obtenues de manière rétrospective, peuvent être incomplètes et influencées par des biais divers. De plus, les critères qu'ils ont utilisés pour le diagnostic de cardiomyopathie du péripartum sont plus larges que ceux qui ont été récemment recommandés. Ils ont inclus dans leur étude des femmes qui ont développé une insuffisance cardiaque dans les six derniers mois de la grossesse (au lieu du dernier mois seulement), et ils n'ont pas exclu les femmes qui avaient une maladie cardiaque reconnaissable avant le dernier mois de la grossesse.
Néanmoins, l'étude apporte de précieuses informations, et il paraît clair qu'une grossesse ultérieure peut avoir un effet délétère sur la fonction cardiaque des femmes qui ont eu une cardiomyopathie du péripartum.
Baisse de la fonction du ventricule gauche
Les femmes ayant une cardiomyopathie du péripartum présentent lors de la grossesse suivante une baisse de la fonction ventriculaire gauche (VG), et cette baisse est plus importante chez celles qui ont une insuffisance ventriculaire gauche persistante.
Ainsi, la moyenne de la fraction d'éjection du VG dans le groupe des 44 femmes baisse de 49 à 42 % durant la grossesse suivante ; la FEVG moyenne baisse de 56 à 49 % dans le groupe 1, et de 36 à 32 % dans le groupe 2. De plus, des symptômes d'insuffisance cardiaque se développent chez 20 % des femmes du groupe 1 et chez 44 % des femmes du groupe 2. Les décès surviennent uniquement chez les femmes qui ont une insuffisance ventriculaire gauche persistante (groupe 2), et dans ce groupe, une femme sur cinq meurt (taux de décès de 20 %). Le taux d'accouchements prématurés est aussi plus élevé dans le groupe 2 (37 % contre 11 % dans le groupe 1), ainsi que le taux d'interruption thérapeutique de grossesse (25 % contre 4 %).
Contre-indication à la grossesse ultérieure
Selon les Drs Reimold et coll. (université de Dallas, Texas), éditorialistes, la persistance à l'échocardiographie d'une insuffisance cardiaque, six à douze mois après le diagnostic initial de cardiomyopathie du péripartum, « indique généralement un problème irréversible et représente presque toujours une contre-indication absolue à une grossesse ultérieure ». Ils ajoutent que parmi les femmes qui ont eu une normalisation de leur fonction cardiaque, « il n'est actuellement pas possible d'identifier le petit groupe de femmes qui pourraient tolérer une grossesse ultérieure sans complications sérieuses. Si ces femmes deviennent enceintes, ajoutent-ils, elles devraient être surveillées par échocardiographie en sachant qu'un avortement devrait être pratiqué dès que la fonction ventriculaire se détériore et augmente le risque maternel à un niveau inacceptable ».
« New England Journal of Medicine » du 24 mai 2001, pp. 1567-1571 et 1629-1630.
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