D ANS le domaine du traitement de l'infarctus du myocarde (IM), l'utilisation des thrombolytiques et de l'aspirine a fait chuter la mortalité à la phase aiguë de 14 % à 6 %. On retrouve la même tendance dans l'angor instable, dont la mortalité s'est stabilisée à 6 à 7 % environ, avec la prescription systématique d'aspirine et d'héparine depuis une vingtaine d'années.
Il semble que des bénéfices supérieurs puissent être attendus à l'avenir grâce aux combinaisons d'antithrombotiques, comme l'ont indiqué récemment les résultats de l'essai CURE : l'association de clopidogrel à l'aspirine a induit une réduction importante du risque d'évolution des syndromes coronariens aigus vers l'infarctus du myocarde.
Le rôle des statines dans la prévention cardio-vasculaire
Cet essai a ouvert la voie au développement d'associations d'antithrombotiques, plus efficaces que l'aspirine.
La prévention cardio-vasculaire a bénéficié, ces dernières années, de l'apport des statines en termes de réduction des complications coronariennes associées à l'hypercholestérolémie : les grands essais cliniques - menés chez des patients très sélectionnés - comme 4S (Scandinavian Simvastatin Survival Study) et CARE (Cholesterol and Recurrent Events study - pravastatine) ont montré une diminution du risque de récidive d'infarctus et de la mortalité qui en découle.
Cependant, ces données restent à confirmer dans des populations autres ; une baisse encore plus marquée du LDL-cholestérol va-t-elle permettre d'éviter un certain nombre de récidives d'IM chez les coronariens ? C'est la question à laquelle les essais en cours devront tenter de répondre. Des éléments déterminants pourraient provenir de l'étude clinique HPS (Heart Protection Study), où la simvastatine est prescrite chez 20 000 patients non évalués dans les grands essais précédents : il s'agit de patients hypertendus, diabétiques, ayant des antécédents d'artérite ou d'AVC. En cas de résultats positifs dans tous les sous-groupes, les statines deviendront un des éléments essentiels de la prévention du risque coronarien, au même titre que l'aspirine, avec des conséquences médicales et socio-économiques considérables ; dans le cas contraire, il sera temps de réviser la théorie selon laquelle la diminution du LDL-cholestérol est corrélée à celle du risque coronarien.
De nombreux essais comparatifs
Les progrès accomplis dernièrement dans différents champs de la pathologie cardio-vasculaire ont suscité le lancement de projets ambitieux centrés sur les patients à haut risque, comme l'essai HOPE (the Heart Outcomes Prevention Evaluation study) en cours, dont l'objectif est d'évaluer la prévention cardio-vasculaire par des IEC chez des patients ayant des antécédents d'insuffisance coronarienne, d'AVC, de diabète, etc. Cette étude a permis de préciser que le ramipril est efficace en prévention des accidents ischémiques et de la mortalité qui en découle.
Dans le même ordre d'idée, sont également attendus les résultats dans les mois qui viennent de l'étude PROGRESS, où le perindopril est prescrit chez des patients ayant présenté un AVC, et ceux de l'essai EUROPA, où cette molécule est évaluée chez des coronariens à haut risque. Ces trois essais apporteront un éclairage important sur le rôle des IEC dans les sous-groupes de patients considérés.
Dans le traitement de l'HTA, l'essai clinique en cours ALLHAT (the Antihypertensive and Lipid Lowering Treatment to Prevent Heart Attack Trial) évalue un IEC dans l'HTA, comparé à d'autres antihypertenseurs ; il apprécie également l'incidence du traitement antihypertenseur sur les décès de cause cardiaque et les infarctus du myocarde non mortels. Il s'agit d'un essai de très grande envergure - plus de 40 000 patients hypertendus inclus, ayant au moins un autre facteur de risque coronarien - où les patients ont été randomisés initialement en quatre groupes afin de recevoir soit un alphabloquant, la doxazosine, soit un diurétique, l'hydrochlorothiazide, soit un inhibiteur calcique, l'amlodipine, soit un IEC, le lisinopril. Le bras alphabloquant a été supprimé par un comité indépendant de contrôle des données, en raison du risque majoré d'insuffisance cardiaque. Les résultats des trois autres traitements apporteront peut-être la confirmation des tendances retrouvées dans les études comparatives des antihypertenseurs comme STOP Hypertension 2, NORDIL, INSIGHT etc. Il sera très intéressant de savoir si l'inhibiteur calcique est associé, comme l'ont rapporté différents travaux, à une réduction du risque de survenue des AVC avec, en contrepartie, une incidence accrue des IM.
La mise au point de nouveaux stents
En cardiologie interventionnelle, des progrès importants sont liés à la mise au point de nouveaux matériaux et, en particulier, de stents plus adaptés à la morphologie des coronaires.
Les bénéfices apportés par l'irradiation endo-coronaire, proposée dans certains cas de resténoses itératives sur stent, restent à confirmer. Cette technique est très difficile à manier, accessible dans très peu de centres, et son retentissement à long terme mal établi ; les données acquises au terme de cinq ans de recul chez un nombre restreint de patients suggèrent une fragilisation de la paroi artérielle.
Dans l'indication prévention de la resténose, on peut penser que l'avenir est plutôt aux programmes de recherche axés sur le développement de stents « enrobés » d'un agent antimitotique (comme le paclitaxel ou la rapamycine) libérant la substance active in situ de façon prolongée, et dont l'objectif est d'inhiber la croissance cellulaire endothéliale. Les limites de cette méthode sont nombreuses, elle ne devrait concerner que peu de patients coronariens.
Insuffisance cardiaque et activation hormonale
Dans l'insuffisance cardiaque, les mécanismes de l'activation hormonale - certains liés au pronostic - précisés au cours des vingt dernières années, avec la mise en évidence du rôle du système noradrénergique, rénine-angiotensine et de l'aldostérone, ont permis la mise au point de molécules inhibant les phénomènes d'activation : bêtabloquants, IEC et spironolactone. Ces molécules apportent des bénéfices très importants en termes de prévention et d'augmentation de la survie des patients, réduisant l'incidence des insuffisances cardiaques incontrôlées qui nécessitaient par le passé des greffes en semi-urgence. L'indication de la greffe cardiaque est ainsi de plus en plus retardée.
Par ailleurs, des travaux récents suggèrent qu'un grand progrès peut être accompli grâce à la surveillance au domicile des patients insuffisants cardiaques chroniques par des infirmières spécialisées : le seul contrôle du poids, du régime sans sel et de la prise adéquate des médicaments induit une diminution très notable des récidives d'hospitalisations, problème majeur dans cette affection.
Plusieurs études ont indiqué que certains patients en insuffisance cardiaque sévère associée à un retard de conduction intraventriculaire surajouté pourraient bénéficier d'un stimulateur triple chambre.
Un vrai progrès a été enregistré dans le traitement des troubles du rythme, en particulier la tachycardie de Bouveret et le flutter auriculaire, où la place du traitement médicamenteux est de plus en plus réduite grâce à la diffusion des techniques de rythmologie d'intervention : la prise en charge de ces patients est totalement bouleversée par la cardiologie interventionnelle utilisant l'ablation des foyers ectopiques par radiofréquence, procédé simple et peu traumatique.
De même, dans les années qui viennent, l'évolution de la fibrillation auriculaire pourrait être modifiée par la rythmologie d'intervention, en cours de mise au point dans cette indication. Les résultats préliminaires laissent penser que cette technique pourrait permettre de réduire la fréquence des épisodes de passage en FA.
La place des défibrillateurs implantables dans la prévention de la mort subite est incontestable dans les morts subites récupérées et les arythmies ventriculaires malignes.
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