J EAN-PIERRE CHEVENEMENT a déclaré mardi sa candidature à la présidence de la République. Il offre ainsi une alternative à la gauche plurielle, celle qui aura permis à Lionel Jospin de gouverner pendant cinq ans mais dont les déchirements vont en s'aggravant, au point de compliquer énormément la stratégie du Premier ministre pour l'élection présidentielle.
Il est logique que les candidats qui n'ont pas de responsabilité nationale se déclarent tôt parce qu'ils ont beaucoup de chemin à faire pour se rendre crédibles ; comme il est logique qu'un chef d'Etat ou un chef de gouvernement se déclarent à la dernière minute parce qu'ils ne veulent pas donner l'impression qu'ils sacrifient les affaires de l'Etat à leur campagne électorale.
Les Français pourront choisir au premier tour entre de nombreux candidats, sans doute deux de l'extrême-droite, François Bayrou (UDF) assurément, un candidat communiste, Alain Lipietz pour les Verts, et d'autres qui se réclament de mouvements moins importants. Comme d'habitude, ils n'auront que l'embarras du choix, mais la seule question qui vaille porte sur la capacité de M. Chevènement ou de M. Bayrou à se placer pour le second tour.
M. Bayrou prépare sa candidature depuis longtemps et propose un programme parfois séduisant, très européen, et d'où la perspective d'une nouvelle cohabitation serait exclue, encore qu'on voit mal ce qu'il pourrait faire si, une fois élu, il n'avait pas de majorité parlementaire.
M. Chevènement a pris des positions courageuses sur la Corse, surtout quand on sait que M. Lipietz envisage non seulement d'appliquer les accords de Matignon mais d'amnistier les crimes de sang. La gauche très particulière qu'incarne M. Chevènement, avec des idées restrictives sur l'immigration et fermes sur la sécurité des Français, l'aura rendu sympathique aux yeux de nombre de ses concitoyens. Mais sur l'Europe et la monnaie, sur le Proche-Orient, sur les relations avec les Etats-Unis, sur la défense nationale, son ardent nationalisme introduirait des concepts assez nouveaux pour déranger une majorité d'électeurs.
Le « miraculé de la République », ainsi qu'on le nomme depuis qu'il a survécu à un long coma consécutif à une opération, risque de secouer le pays au-delà de ce qu'il peut supporter. Mais il est bien trop tôt pour se poser des questions sur son programme. Il faut d'abord qu'il nous convainque qu'il a une chance de l'appliquer. Et il en va de même pour M. Bayrou.
L'un et l'autre, toutefois, apportent un peu d'air frais dans une campagne qui, si elle se limitait à un affrontement entre le président actuel, quelque peu affaibli par les scandales, et le Premier ministre, que quatre ans de querelles avec les composantes agitées de sa majorité ont manifestement usé, serait bien peu intéressante.
Quoi qu'il en soit, la crise économique semble devoir se prolonger, de sorte qu'elle risque de peser sur la campagne et de contraindre les candidats à faire des promesses qu'ils ne seront pas sûrs du tout de pouvoir tenir. Tout pronostic est donc interdit à neuf mois d'une présidentielle dont l'issue dépendra essentiellement du taux de chômage et du niveau de vie des Français.
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