Les tumeurs cancéreuses savent se défendre face à la thérapeutique. En effet, pour lutter contre leur aptitude à créer leur propre vascularisation par angiogenèse, des thérapeutiques visant à bloquer spécifiquement tel ou tel facteur angiogénique ont été proposées. Ce à quoi elles répondent en sécrétant un nouveau facteur angiogénique. « Un cocktail de plusieurs agents antiangiogéniques serait plus efficace », suggèrent Yotaro Izumi et coll. (Boston, Etats-Unis) dans la revue « Nature ». Ce cocktail pourrait être représenté notamment par l'herceptin, qu'ils ont testé et dont ils rapportent l'action.
Un cancer mammaire expérimental
L'herceptin est un anticorps monoclonal s'opposant aux récepteurs de surface cellulaire HER2 (récepteur du facteur de croissance épidermique-2). Les chercheurs américains ont pu démontrer, chez des souris atteintes d'un cancer mammaire humain expérimental surexprimant HER2, des effets à la fois pro- et antiangiogéniques sur plusieurs facteurs d'angiogenèse. Chez les rongeurs soumis à l'herceptin, ils ont constaté une normalisation et une régression de la vascularisation néoformée. Le diamètre et le volume des tumeurs sont significativement réduits. Il en va de même pour la perméabilité vasculaire. Toujours chez les animaux traités, les vaisseaux s'approchent davantage du phénotype normal. Enfin, la croissance tumorale est ralentie et la survie significativement augmentée.
Pour mieux comprendre le mode d'action de l'anticorps monoclonal, les chercheurs ont étudié l'expression de 23 gènes liés à l'angiogenèse. Ils ont relevé, sous traitement, une baisse de l'expression des facteurs proangiogéniques VEGF (vascular-endothelial growth factor), TGF-alpha (transforming growth factor-alpha), Ang-1 (angiopoietin-1) et PAI-1 (plasminogen-activator inhibitor-1). En revanche, une sur-expression du facteur antiangiogénique TSP-1 (thrombospondin-1) a été notée, in vivo.
De façon surprenante les américains ont constaté, en passant d e l'éprouvette au vivant, des discordances dans les sur- et sous-expressions de ces gènes. Sans entrer dans le détail, ces changements mettent en valeur l'importance des interactions entre les cellules hôtes et tumorales, dans la production des facteurs angiogéniques. Cette notion suggère que l'herceptin agit à la fois sur les cellules tumorales et hôtes et que ces dernières seraient à même d'agir de façon délétère sur le processus de normalisation vasculaire. Aussi d'autres agents antiangiogéniques (par exemple, un anti-VEGF) pourraient être nécessaires pour obtenir une régression vasculaire stable à long terme.
Les auteurs concluent de façon prospective. D'autres inhibiteurs, au potentiel de cocktail thérapeutique, pourraient bloquer diverses séries de facteurs angiogéniques. En déterminant les profils angiogéniques des patients et des tumeurs, il deviendrait alors possible de proposer un traitement personnalisé.
« Nature » vol. 416, 21 mars 2002, pp. 279-280.
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