E NVIRON 30 % des tumeurs humaines portent des mutations des gènes ras. Parmi les trois gènes de cette famille (K-ras, N-ras et H-ras), K-ras est le plus souvent muté dans les tumeurs humaines, notamment les adénocarcinomes du pancréas (incidence de 70-90 %), du côlon (environ 50 %) et du poumon (environ 25-30 %).
Ce sont surtout les effets des gènes H-ras et N-ras qui ont été étudiés chez la souris transgénique. Il fallait donc étudier aussi des souris K-ras. Pour cela une équipe américaine (Leisa Johnson et coll.) a créé des souris transgéniques porteuses d'allèles oncongéniques K-ras latents, capables d'une activation spontanée par recombinaison in vivo.
Tumeurs pulmonaires
Résultat : les souris ont développé tout un spectre de tumeurs. Le site le plus fréquent était le poumon (100 % des animaux ont eu des tumeurs multifocales). Ces tumeurs étant d'abord détectables sous forme de petits nodules pleuraux à l'âge d'une semaine.
En dehors des tumeurs pulmonaires, les souris K-ras étaient également sujettes à des lymphomes thymiques et à des papillomes cutanés (environ 30 % des souris). En revanche, malgré la fréquence des mutations de K-ras dans les carcinomes du pancréas et du côlon chez l'homme, ces tumeurs n'ont pas été détectées chez les souris K-ras. Toutefois, toutes le souris mutantes examinées avaient des foyers cryptiques aberrants au niveau du côlon.
Coopération avec le gène p53
Chez l'homme, dans les adénocarcinomes du poumon, du côlon et du pancréas, les mutations de K-ras sont souvent associées à des altérations du gène p53 ; de plus, l'expression ectopique de l'oncogène ras peut provoquer, dans les cultures cellulaires, un arrêt de la croissance et une apoptose, dépendants de p53. Les Américains ont donc croisé des souris K-ras avec des souris porteuses d'une délétion germinale de p53. Résultat : les souris mutantes à la fois pour p53 et K-ras (double mutantes) avaient une réduction de l'espérance de vie et davantage de signes de malignité au niveau des tumeurs pulmonaires (pléïomorphisme, anaplasie avec formation de cellules géantes) ; de plus, 30 % des double mutantes avaient des hémangiosarcomes et des fibrosarcomes. « Nous avons démontré qu'une mutation de p53 facilite la progression des cancers du poumon chez les souris K-ras », écrivent les auteurs. Ce qui cadre avec ce que l'on constate chez l'homme.
« En raison de son implication fréquente dans les cancers de l'homme, le système ras est considéré comme une cible potentielle pour une intervention chimiothérapeutique. Les souches de souris K-ras pourraient être utiles pour tester l'efficacité de traitements anti-ras. » Etant donné la courte latence et la forte pénétrance des tumeurs des souris K-ras, ces animaux pourraient aussi être utiles pour rechercher de potentiels agents chimiopréventifs, ajoutent les auteurs.
« Nature » du 26 avril 2001, pp. 1111-1116.
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