Plus de 50 % des patients atteints d'une tumeur maligne présentent une anémie aboutissant à une réduction de la capacité de transport de l'oxygène. L'origine de cette anémie est soit liée à la tumeur elle-même du fait d'hémorragies, d'infiltration de la moelle osseuse, de carences nutritionnelles..., soit liée aux traitements (chimiothérapie ou radiothérapie ou conjugaison des deux).
L'effet secondaire le plus important
D'un point de vue clinique, l'anémie se traduit essentiellement par la fatigue, une très grande fatigue altérant la qualité de vie et ressentie par les patients comme « l'effet secondaire le plus important en cancérologie ». Une enquête (Volgelzang N. J., Breitbart W. et coll.) réalisée chez 419 patients présentant une pathologie tumorale et traités par chimiothérapie et ou radiothérapie, indique que 78 % des sujets ont ressenti cette fatigue soit au cours de la maladie, soit lors du traitement ; 41 % la considèrent même comme l'effet secondaire le plus important (contre 34 % pour la douleur) et 70 % estiment qu'elle affecte considérablement leur vie quotidienne.
Un point de vue que les médecins européens traitants perçoivent de façon très différente : 94 % des 197 médecins interrogés dans cette enquête placent la douleur en premier plan, et 5 % seulement estiment la fatigue « comme un effet secondaire méritant considération ».
L'anémie, dans le cadre d'une pathologie tumorale et de son traitement, est à prendre en compte du fait de son impact sur la qualité de vie du patient, qui peut le conduire à arrêter un traitement ; et du fait de son impact négatif sur la réponse au traitement liée à l'hypoxie tissulaire engendrée ou à la modification du transport sanguin de certains médicaments.
Pourtant, l'anémie en cancérologie est très largement sous-traitée ; comme en témoigne une enquête d'observation pharmacologique, l'étude ECAS (European Cancer Anaemia Survey) qui porte sur 15 000 patients présentant une anémie définie par un taux d'hémoglobine inférieur à 12 g/dl). Cette enquête révèle que plus de la moitié des patients présentant une anémie lors de leur recrutement dans l'étude n'avait reçu aucun traitement.
Les traitements existent : la transfusion en cas d'urgence ; dans les autres cas, l'érythropoïétine humaine recombinante est très efficace. L'époïétine alpha (Eprex), dont la structure est identique à l'érythropoïétine endogène, est employée. Plusieurs études ont confirmé et démontré son efficacité pour le traitement des anémies chroniques liées aux pathologies cancéreuses.
Gain d'Hb : 2 g/dl
Autorisant la régulation de l'érythropoïèse, elle permet, en administration régulière, d'augmenter le taux d'hémoglobine de plus de 2 g/dl chez plus de 70 % des patients. Pour le Pr S. Pecorelli (Brescia, Italie), outre « une amélioration significative de la qualité de vie des patients », l'administration d'érythropoïétine permet « une réduction du nombre de transfusions, des actes toujours à risque ». Et, précise le Pr P. Gascon (Barcelone), « il est encore regrettable qu'actuellement de nombreux patients cancéreux ne soient traités que tardivement quand leurs taux d'hémoglobine ont atteint des niveaux très bas, quand l'anémie est devenue sévère ». « Il faut espérer », souligne le Pr H. Ludwig (Vienne, Autriche) que « l'anémie et la fatigue des patients cancéreux seront prises en considération par les médecins traitants comme l'est maintenant la douleur, non traitée il y a quelques décennies ». Dans les pays du nord de l'Europe, la fatigue ressentie par les patients cancéreux commence réellement à être prise en compte, les patients étant peut-être mieux informés sur les possibilités de traitement.
Vienne (Autriche). Symposium international sur le sous-traitement de l'anémie relative aux cancers, organisé par les Laboratoires Ortho-Biotech, une division de Janssen-Cilag. Modérateurs : Pr L. Degos (hôpital Saint-Louis, Paris) et Pr M. Dicato (Luxembourg).
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