E N l'espace de cinquante ans, qu'il s'agisse du cancer du côlon, de l'estomac ou du pancréas, le traitement chirurgical exclusif - avec des résultats médiocres - a été remplacé par des traitements combinés beaucoup plus actifs. Ainsi, dans ces trois localisations, à un stade métastatique, la chimiothérapie a montré qu'elle augmentait à la fois le confort et la survie des patients. En tant que traitement adjuvant, elle a également montré un intérêt certain dans le cancer du côlon ayant des ganglions métastatiques, et moins bien établi dans les cancers de l'estomac et du pancréas. Pour ces deux indications, quelques essais ont mis en évidence une efficacité modérée de la chimiothérapie utilisée seule ou combinée à la radiothérapie.
Le 5-fluoro-uracile (5-FU) est apparu en 1957, puis dans les années quatre-vingt le cisplatine efficace dans les tumeurs de l'estomac et du pancréas ; dans les années 1995 à 2000, de nouveaux médicaments ont vu le jour, en particulier le CPT11 et l'oxaliplatine dans les cancers du côlon et du rectum, la gemcitabine dans les cancers du pancréas, le CPT11 et le taxotère dans les cancers de l'estomac.
Des progrès en biologie
Parallèlement, de gros progrès ont été réalisés en biologie moléculaire. Ils permettent aujourd'hui de classer différemment les cancers du côlon sur les plans diagnostique, pronostique et thérapeutique. Demain, cela concernera probablement les autres cancers digestifs. En outre, la caractérisation des tumeurs va permettre de plus en plus de prédire la résistance ou la sensibilité à certaines chimiothérapies. Par exemple, l'hyperexpression de la thymidylate synthétase (TS) permet de prédire une relative résistance au 5-FU ; ce qui a été confirmé récemment à l'ASCO. Enfin, la pharmacogénétique devrait permettre de mieux prédire la toxicité de certains médicaments en étudiant l'équipement enzymatique des lymphocytes des patients : ainsi, chez les patients ayant un taux de dipyridamole déshydrogénase (DPD) abaissé, peut-on craindre un risque de toxicité au 5-FU très important. Par cette double approche, caractérisation à la fois des tumeurs et des enzymes qui gèrent le catabolisme des médicaments, il va être possible d'améliorer la prédiction et donc de mieux utiliser les produits à des doses plus adaptées.
Des progrès en termes de survie
Ces progrès peuvent sembler lents, mais sont bien réels pour les patients en termes de survie. Ainsi, en 1999, à partir des données de deux registres des cancers (Bourgogne et Calvados), le Dr Corinne Faivre a montré que la survie spécifique des cancers du rectum à cinq ans était passée de 35 à 57 %... (Gut, 1999).
En 1970, pour tous les malades qui avaient des métastases hépatiques non résécables, l'espérance moyenne de survie était de six mois. Dans les années quatre-vingt-cinq, après l'apparition du 5-FU, elle est passée à douze mois. Actuellement, avec l'utilisation des nouvelles molécules - CPT11 et oxaliplatine - , elle est comprise entre dix-huit et vingt mois. Il en est de même pour les métastases hépatiques résécables. Avant, leur présence était synonyme de condamnation à mort. Actuellement, de 10 à 15 % d'entre elles sont résécables dans les cancers du côlon et du rectum. Et, après résection, 25 % des malades sont guéris.
D'après un entretien avec le Pr Philippe Rougier, hôpital Ambroise-Paré, Boulogne
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