Cancérologie digestive : l'apport de la radiochimiothérapie

Publié le 07/10/2001
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• Cancer de l'œsophage
Plusieurs études ont montré que l'échoendoscopie a une valeur pronostique et permet la différenciation entre persistance tumorale et inflammation postchimio- et/ou radiothérapique. En ce qui concerne le cancer superficiel envahissant la sous-muqueuse, il s'accompagne d'un taux d'envahissement ganglionnaire de 30 à 47 %, ce qui jette une ombre sur le traitement endoscopique par résection muqueuse localisée. Le risque de méconnaître un adénocarcinome chez les patients opérés pour œsophage de Barrett avec dysplasie de haut grade n'est pas négligeable (de 30 à 40 %) malgré des endoscopies avec biopsies. Lorsque la chirurgie est complète, la survie à 5 ans est de 40 %. Une étude récente réalisée au Royaume-Uni a montré un avantage significatif sur la survie du traitement combinant la chimiothérapie préopératoire et la chirurgie par rapport à la chirurgie d'emblée (45 % versus 35 %), mais cela demande confirmation. Quant aux cancers avancés chez les patients non opérables, l'étude de la FFCD 8803 a conclu à l'intérêt de la chimioradiothérapie exclusive, avec un taux de survie de 12 % à 5 ans.
• Cancer de l'estomac
Il reste de mauvais pronostic alors qu'il est le deuxième cancer digestif en France par sa fréquence. Récemment, les résultats d'un essai multicentrique américain, portant sur 603 patients randomisés de stade Ib à IV avec une résection chirurgicale pour un adénocarcinome gastrique, ont suggéré pour la première fois l'efficacité d'un traitement adjuvant de type radiochimiothérapie (par FU-FOL et par une irradiation de 45 grays) : la survie sans récidive passe de 32 % dans le groupe contrôle (chirurgie seule) à 49 % dans le groupe de radiochimiothérapie, la survie globale à 3 ans passe de 41 à 52 %. Selon le Dr M. Ychou (Montpellier), dans l'attente d'autres résultats, il n'est pas illicite de proposer ce schéma thérapeutique chez les patients ayant soit un curage ganglionnaire insuffisant, soit un envahissement ganglionnaire majeur.
• Le pancréas
Etant donné les difficultés d'évaluation d'une réponse après chimiothérapie des adénocarcinomes pancréatiques (AP), localement évolués avec les techniques habituelles d'imagerie, on espère que la tomographie à émission de positrons au 18-fluorodéoxyglucose pourrait un jour s'intégrer dans le bilan préopératoire des AP non métastatiques et apporter des informations pronostiques.
Selon les études, la survie à 2 ans des malades ayant eu un traitement adjuvant (l'association de 5-FU continu + l'interféron alpha + cisplatine ou gemcitabine + cisplatine), avec radiothérapie après duodénopancréatectomie céphalique pour AP, est de 22 à 48 %. Le docétaxel, qui a été testé chez les malades ayant un AP non résécable, a permis une stabilisation tumorale dans 38 % des cas pendant 5,1 mois en médiane ; l'absence de neurotoxicité laisse envisager la possibilité de l'associer avec les sels de platine.
• Cancer colo-rectal
Plus de 40 % de nouveaux cas annuels surviennent chez des patients âgés de plus de 75 ans. Les principes de la prise en charge de ces patients sont les mêmes que ceux des patients plus jeunes, sous réserve que des comorbidités associées (pathologie cardio-vasculaire, etc.) puissent contre-indiquer une intervention chirurgicale ou majorer les risques d'une chimiothérapie. En tout cas, en situation palliative, il faut prendre en compte le souhait du patient s'il privilégie sa qualité de vie à la réalisation d'une chimiothérapie potentiellement toxique. La chirurgie, le seul traitement curatif, est proposée chez les patients opérables et en bon état général, en sachant que la mortalité des sujets de 75 ans reste supérieure à celle des patients plus jeunes. Deux études rétrospectives récentes ont montré que la tolérance et l'efficacité d'une chimiothérapie à base de 5-FU en perfusion continue, ou de raltitrexed chez des patients de plus de 70 ans en bon état général, étaient comparables à celles de patients plus jeunes.

D'après les communications du Pr J.-P. Triboulet (Lille) et des Drs M. Ychou (Montpellier), P. Hammel (Clichy) et E. Mitry (Boulogne), lors de la XIIe Journée scientifique de la Fondation française de cancérologie digestive.

Ludmila COUTURIER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6983