La chimiothérapie au cisplatine a permis, depuis vingt-cinq ans, d'améliorer la survie des patients atteints de cancer métastatique du testicule. Lorsque le traitement est instauré précocement, le taux de survie à dix ans est de 88 %. Il a été montré qu'un traitement instauré tardivement (délai de plus de trois mois) diminuait la survie de cinq ans, alors qu'une simple orchidectomie peut conduire à la guérison d'une tumeur détectée à un mois. Les patients qui consultent tard ou pour lesquels le diagnostic n'a pas été établi voient leur chance de guérison diminuer jusqu'à 50 %, en raison d'une localisation métastatique particulière ou d'une forte concentration des marqueurs tumoraux.
Le cas d'un jeune hollandais de 17 ans, rapporté dans le « Lancet » par H. D. de Boer, montre qu'aujourd'hui encore on peut mourir d'un cancer du testicule. Ce jeune homme a été retrouvé chez lui en arrêt cardio-vasculaire et n'a pu être « rattrapé » après trente minutes de réanimation. Le premier diagnostic évoqué a été celui d'hématome rétropéritonéal en raison de la dilatation bilatérale des veines jugulaires et de la distension de l'abdomen expliquée par la présence d'une masse supra-ombilicale à l'échographie. La tuméfaction de la région inguinale et du scrotum droits a été d'abord mise au compte de l'hémorragie rétropéritonéale, mais l'autopsie a révélé un cancer du testicule de 12 cm avec un envahissement ganglionnaire (masse rétropéritonéale de 23 cm), des métastases osseuses et hépatiques. L'histoire de ce patient est significative car, quatre jours auparavant, il avait eu un accident de voiture au cours duquel il avait heurté un arbre, ce qui rendait plausible le diagnostic d'hémorragie post-traumatique. A la suite de cet accident, il avait été examiné par son médecin traitant qui n'avait constaté que des contusions et des éraflures cutanées légères. Le patient n'a pas été adressé à l'hôpital et des douleurs de l'abdomen et du dos sont apparues plus tard.
Informer et éduquer
Cette observation rappelle aux praticiens qu'un examen de la région génitale doit faire partie de l'examen clinique. Elle souligne également la nécessité d'informer et d'éduquer les patients qui ont tendance à négliger ou à cacher ces tuméfactions du testicule. Dans le cas hollandais, la tumeur devait évoluer depuis plusieurs mois. Les éditorialistes Jeremy PC Steele et R. Timothy D. Olivier rappellent que de tels cas ne sont pas rares. Au département d'oncologie (hôpital St Barthlomew, Londres) ils notent que sur les cinquante nouveaux cas observés par an, quatre sont des tumeurs de taille importante que les patients ont dissimulées pendant des mois. Dans certains cas, rares mais ennuyeux, les patients ont consulté leur médecin traitant qui n'a pas fait le diagnostic. Mais le plus souvent, les patients contribuent eux-mêmes à ce diagnostic tardif en cachant leur tumeur, soit à cause d'un manque d'information, ou d'une peur du cancer et de l'émasculation.
Les éditorialistes rapportent par ailleurs le cas particulier des demandeurs d'asile qui n'ont souvent pas accès aux soins ou qui ont peur d'être dénoncés par le médecin. Ils citent l'exemple d'un Albanais de 32 ans émigré du Kosovo et vivant avec une Croate.
Une tumeur dissimulée pendant des mois
Pendant des mois, il a dissimulé sa tumeur de peur d'être renvoyé dans son pays d'origine et est mort six semaines après le diagnostic de son cancer à la suite d'une coagulation intravasculaire disséminée, alors que son cancer était parfaitement curable.
En dehors de cet aspect particulier, les éditorialistes concluent que « les professionnels de santé, comme la population générale, doivent être éduqués à reconnaître les tumeurs du testicule et informés qu'elles peuvent être des urgences médicales ».
« Lancet », vol. 359, 11 mai 2002.
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