L'histoire retiendra que l'année 2001 aura été celle du dépistage du sein étendu à tous les départements français. Elle retiendra aussi que ce pas en avant dans la recherche de la première lésion cancéreuse de la femme est le fait de Bernard Kouchner. Un tel plan de masse représente certes un effort financier de quelque 76 millions d'euros, mais il sous-entend aussi l'application de règles strictes. Elles étaient rappelées, début juin, lors d'Eurocancer, par le Pr Jean-Louis Lamarque (Montpellier).
Avant que de s'engager dans une telle démarche de santé publique, il faut s'assurer qu'elle répond aux dix règles de l'OMS pour un bon dépistage. De fait, le cancer du sein y souscrit amplement. Entre autres : un problème majeur de santé publique, visualisation de la maladie au stade précoce, sensibilité et spécificité du test de dépistage optimales... Il faut ensuite s'appuyer sur des travaux scientifiques mondiaux significatifs. La Suède, la Hollande ou les Etats-unis l'on démontré. Le Pr Lamarque ajoutait qu'une fréquentation d'au moins 60 % des femmes est nécessaire pour que la baisse de la mortalité soit effective. Ce qui, à notre époque, sous-entend de la publicité. En amont du dépistage, il convient d'assurer une information permanente auprès des femmes de 40 à 70 ans, afin qu'elles subissent bisanuellement le dépistage. Le choix d'un test unique répétitif contrôlable s'impose. Il s'agit bien sûr de la mammographie, examen disposant des plus hautes sensibilité et spécificité actuellement. Enfin, un contrôle de la qualité de réalisation et de la lecture des films se révèle indispensable. D'où la nécessité d'une formation complémentaire des médecins.
10 % des clichés seront anormaux
Alors que l'épidémiologie nous enseigne qu'au cours du dépistage seuls 10 % des clichés seront anormaux, elle affinait, en 2001, les chiffres en fonction de l'âge et de l'ethnie. En avril, le « American Journal of Preventive Medicine » précisait que le risque de 1 sur 9 pour une femme de développer un cancer doit être très largement nuancé. Ce 1 sur 9 est une estimation sur le cours de la vie et non pas à court terme. Ainsi, à 50 ans, le risque de voir apparaître la tumeur dans les cinq années suivantes est de 1 sur 86, mais de 1 sur 18 dans les vingt ans. Dix ans plus tôt, à 40 ans, un cancer peut apparaître chez une femme sur 189 dans les cinq ans et chez une 1 sur 26 dans les vingt ans. Enfin, à 60 ans, les chiffres sont de 1 sur 61 pour les cinq prochaines années et de 1 sur 14 dans les vingt ans. De plus, toutes les femmes ne sont pas égales face au risque. Toujours à 50 ans, une Caucasienne présente un risque évalué à 1 sur 15 dans les vingt ans, une Afro-Américaine un risque de 1 sur 20, une Asiatique de 1 sur 26, une Hispanique de 1 sur 27. Raccourci aux cinq années à venir, le risque passe respectivement chez ces femmes à 1 sur 75, 1 sur 98, 1 sur 107 et 1 sur 133.
Selon le « Jama », consommer des fruits et des légumes à l'âge adulte ne modifie en rien la survenue du cancer. Un suivi de plus de 350 000 femmes en atteste.
L'année écoulée aura eu aussi son lot de bonnes nouvelles en thérapeutique.
La survie au cours du cancer métastatique
Xeloda (capécitabine), des Laboratoires Roche a permis de démontrer, pour la première fois, un avantage sur la survie au cours du cancer métastatique, dans le cadre d'une association, versus une monothérapie standard, chez des patientes n'ayant pas répondu à une chimiothérapie par anthracyclines. La capécitabine est une fluoropyrimidine ayant démontré une activité antitumorale significative dans les cancers du sein métastatiques lourdement prétraités. Au cours d'un essai international, elle a été associée au docétaxel (Taxotère) chez 255 femmes. L'association a été comparée au Taxotère seul prescrit chez 256 femmes. Alors que toutes ces patientes avaient résisté aux anthracyclines, l'association a permis, au cours d'un essai de phase III, une survie statistiquement supérieure à celle du docétaxel seul, soit quatorze mois contre onze mois. Le temps avant la reprise de la progression a été amélioré, six mois contre quatre, ainsi que le taux de réponses atteignant 42 % contre 30 %. « Xeloda et Taxotère combinés ensemble représentent un pas en avant appréciable dans la bataille contre le cancer du sein », se réjouissait la principale investigatrice de l'essai, le Dr Joyce O'Shaughnessy.
Aromasine, inhibiteur irréversible de l'aromatase
Une nouvelle molécule était aussi mise sur le marché, l'Aromasine (exémestane), inhibiteur irréversible de l'aromatase. Elle est indiquée dans le traitement du cancer du sein hormonodépendant de la femme ménopausée, à un stade avancé, après échec du traitement par antiestrogènes. L'exémestane, des Laboratoires Pharmacia, est un stéroïde analogue structural du substrat de l'aromatase, l'androstènedione. Après une prise unique d'un comprimé à 25 mg, les taux d'estrone, d'estradiol et de sulfate d'estrone baissent respectivement de 65, 72 et 61 %. A doses répétées, pendant six à huit semaines, ces baisses passent à 94,5, à 92,2 et à 93,2 %. L'évaluation de la molécule continue dans le monde auprès de 2 200 femmes (dont 200 Françaises). Une évaluation est également en cours auprès de 12 000 femmes (dont 800 Françaises) en traitement adjuvant.
Enfin, le Taxol montre de nouvelles potentialités. Au cours d'un essai de phase III, la molécule des Laboratoires Bristol-Myers Squibb était associée à la doxorubicine. Chez 267 femmes atteintes d'un cancer du sein métastasé, l'association a amélioré significativement tant la survie globale que le délai avant progression du processus tumoral. Un autre travail, mené en France et en Belgique, a comparé les effets de l'association selon qu'elle est administrée en 4 ou 6 cures à titre néo-adjuvant. Le protocole en 6 cures a montré une amélioration significative des réponses complètes anatomo-pathologiques et cliniques.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature