De notre correspondante
à New York
Un essai clinique, le premier du genre, combine la chimiothérapie, les liposomes et « l'hyperthermie », chez des patientes nouvellement diagnostiquées, avec de larges tumeurs du sein invasives.
Les résultats sont encore plus spectaculaires que ce que prévoyait l'équipe sur la base des études précliniques, a annoncé le Dr Kimberly Blackwell (Duke Comprehensive Cancer Center, Durham, NC) au Congrès de l'American Society of Clinical Oncology (Orlando, Floride).
L'approche consiste à administrer une chimiothérapie enrobée dans des liposomes (des enveloppes graisseuses), puis à chauffer la tumeur afin d'élever sa température locale à 40 degrés Celsius.
Le chauffage de la tumeur a plusieurs effets. Premièrement, il rend les vaisseaux sanguins plus perméables, ce qui permet aux liposomes de s'échapper de la circulation sanguine et de se concentrer dans le tissu tumoral. Deuxièmement, la chaleur augmente la captation du médicament dans la cellule cancéreuse. Troisièmement, la chaleur augmente le taux d'oxygène dans la tumeur, ce qui accroît l'action de nombreux agents anticancéreux. Enfin, la chaleur inhibe les enzymes de réparation d'ADN, amplifiant ainsi les dégâts infligés par la chimiothérapie sur la cellule cancéreuse.
Liposomes fondant sous l'effet de la chaleur
Autre sophistication, les chercheurs de Duke ont développé des liposomes qui fondent rapidement sous l'effet de la chaleur. Ils déversent ainsi leur contenu directement dans la tumeur. Le médicament diffuse lentement dans les tissus normaux sur une période de trois à quatre semaines, ce qui est suffisamment lent pour émousser les effets toxiques.
« L'enrobage de la chimiothérapie dans les liposomes nous permet de délivrer 30 fois plus de chimiothérapie que normalement au site tumoral, sans "empoisonner" le reste du corps », précise le Dr Blackwell.
L'essai de phase 1 a été mené chez 21 femmes atteintes d'un cancer du sein inflammatoire ou localement avancé. Le cancer était suffisamment vaste ou invasif pour être inopérable chez la majorité des patientes. Elles ont reçu 4 cycles de chimiothérapie néoadjuvante avec hyperthermie, chacun espacé de trois semaines.
Au cours d'un cycle, tout d'abord, les patientes reçoivent une chimiothérapie combinant Myocet (doxorubine encapsulée dans des liposomes) et Taxol. Les patientes sont alors confortablement allongées sur le ventre, sur une table de traitement spécialement conçue et fabriquée par un ingénieur du centre de Duke. Les seins y baignent dans de l'eau salée, laquelle aide à diriger l'énergie de radiofréquence qui chauffe la tumeur. La séance dure une heure.
L'essai de phase 1 montre que les patientes présentent en général moins de nausées, de fatigue et de toxicité cardiaque qu'avec la chimiothérapie traditionnelle.
Réduit la masse tumorale
Ce traitement néoadjuvant a stoppé la croissance tumorale chez toutes les patientes et réduit, au moins partiellement, la masse tumorale chez 50 % d'entre elles. De plus, 11 % des femmes ont eu une réponse histologique complète (aucune cellule tumorale à l'examen postchirurgical) et 33 % ont eu une réponse clinique complète (aucun signe visible de tumeur décelable).
Ces chiffres sont significatifs, affirme le Dr Blackwell, puisque la plupart de ces femmes avaient des tumeurs inopérables.
Après le dernier cycle, la tumeur résiduelle est excisée par chirurgie, puis une radiochimiothérapie supplémentaire est effectuée pour détruire toute cellule cancéreuse résiduelle.
« Nous utilisons les meilleurs et tout nouveaux agents d'entrée de jeu, puis les traitements standards et traditionnels à la fin », note le Dr Blackwell. « C'est comme une assurance pour garantir que les patientes reçoivent tous les bénéfices possibles que nous pouvons leur offrir. »
Congrès de l'American Society of Clinical Oncology, Orlando, 18 mai2002.
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