On connaît plusieurs gènes qui prédisposent au cancer du sein. Dans les familles comportant de multiples cas, les gènes BRCA1 et BRCA2 (BRCA : BReast CAncer) sont numériquement les plus importants, notamment dans les familles ayant des cancers du sein à début précoce et des cancers de l'ovaire.
Toutefois, BRCA1 et BRCA2 n'expliquent pas 60 % des cancers du sein féminins exclusifs familiaux. De plus, des études de population ont démontré que ces gènes ne rentrent en compte que dans environ 15 % du risque familial de cancer du sein.
Certes, il existe d'autres gènes de susceptibilité, dans le cadre des syndromes cancéreux familiaux : TP53 (syndrome de Li Fraumeni), PTEN (Cowden), ATM (ataxie-télangiectasie). Mais même en prenant en compte ces gènes là, au moins 80 % du risque familial de cancer du sein restent inexpliqués, ce qui suggère que d'autres gènes de susceptibilité importants restent à découvrir.
En dehors du contexte des syndromes spécifiques, les gènes connus autres que BRCA1 et BRCA2 ne semblent pas jouer un grand rôle. Par exemple, une analyse sur 56 familles avec trois cas ou plus de cancer du sein n'a pas montré de rôle significatif pour PTEN.
A l'heure actuelle, on a suggéré la responsabilité de quelques autres loci de susceptibilité. On a, par exemple, évoqué la responsabilité du locus 8p12-8p22 mais l'étude de grandes séries familiales n'a pas retrouvé de gène de susceptibilité à ce niveau. Ce fait illustre la difficulté des recherches.
En l'an 2000, le locus 13q21
Récemment, Kainu et coll («Proc Natl Acad Sci USA », 2000 ; 97 : 9603-9608) ont décrit un nouveau locus de susceptibilité au cancer du sein sur le chromosome 13q21. Ils avaient étudié 77 familles avec multiples cas de cancer, provenant de Finlande, de Suède et d'Islande, dans lesquelles aucune mutation de BRCA1 ou BRCA2 n'était identifié. les familles n'étaient pas spécialement sélectionnées pour un début précoce du cancer et n'étaient pas non plus exclues si un cancer de l'ovaire était présent. Ainsi, à première vue, ce travail scandinave avait permis de localiser un nouveau gène, appelé BRCA3. Il fallait une nouvelle étude d'envergure pour confirmer ou infirmer la présence d'un gène de susceptibilité sur ce locus 13q21. C'est ce qui a été fait par le Breast Cancer Linkage Consortium, qui comporte des équipes d'Europe, d'Amérique du Nord et d'Australie, parmi lesquelles trois équipes françaises : Agence internationale de recherche sur le cancer de Lyon (Gilbert Lenoir et Michael Badzioch) ; institut Curie et INSERM U434, Paris (Dominique Stoppa-Lyonnet) ; unité d'oncogénétique et INSERM CRI 9502 & EA2145, Centre Jean-Perrin, Clermont-Ferrand (Yves-Jean Bignon).
Un travail sur 128 familles avec 5 cancers par famille
Ce travail a porté sur 128 familles atteintes de cancers du sein, recrutées dans des centres d'Europe (Royaume-Uni, Allemagne, Espagne, Pays-Bas, France et Israël), des Etats-Unis, du Canada et d'Australie. Une famille provenait de Mexico. Toutes le familles étaient d'origine caucasienne, à l'exception de la famille mexicaine qui était d'origine euro-amérindienne. N'étaient éligibles que les familles comportant au moins trois femmes ayant déclaré un cancer du sein avant 60 ans. Etaient exclues celles qui comportaient des cancers de l'ovaire ou des cancers du sein de l'homme, car ces phénotypes sont fortement prédicteurs de mutations de BRCA1 ou BRCA2. Dans ces 128 familles, 650 femmes avaient un cancer du sein ( moyenne de 5 cancers par famille) ; 56 % des cas étaient diagnostiqués avant 50 ans ; des échantillons provenant de 409 femmes atteintes et de 293 personnes apparentées indemnes ont été disponibles pour un génotypage.
Sans entrer dans les détails, cette étude internationale ne confirme pas la précédente étude scandinave : aucun signe de liaison génétique n'a été retrouvé, même après ajustement pour des biais de sélection.
« Nous concluons que si un gène de susceptibilité existe sur ce locus, il ne peut être en cause que pour une petite proportion des familles non-BRCA1/BRCA2 avec multiples cas de cancer à début précoce », estiment les auteurs.
« Proc Natl Acad Sci USA », janvier 2002, vol. 99, n° 2, 827-831.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature