On sait que l'inactivation du gène p53 joue un rôle important dans le développement des tumeurs. Le gène constitue désormais une cible thérapeutique dans le traitement des cancers du sein. Mais l'effet des mutations du p53 sur la sensibilité des tumeurs vis-à-vis des médicaments génotoxiques reste controversé.
Une équipe française de l'INSERM, du CNRS et de l'hôpital Saint-Louis (Paris) a, pour la première fois, mis en évidence une forte corrélation entre la présence du gène muté dans les tumeurs cancéreuses du sein et la réponse histologique.
L'étude, publiée dans le « Lancet », a inclus 50 patientes admises à l'hôpital Saint-Louis entre 1997 et 2001 avec un diagnostic de cancer avancé du sein non métastatique (stade IIb à IIIb, n = 39) et métastatique (stade IV, n = 11). D'après l'examen des biopsies effectué à l'entrée, 41 étaient des carcinomes canalaires infiltrants, les autres se situant au niveau lobulaire.
Une réponse complète
Toutes les patientes ont reçu, trois à six mois avant la mastectomie, des cycles d'une chimiothérapie à forte dose, associant de l'épirubicine à du cyclophosphamide (n = 49) ou du docetaxel (n = 1). La présence de mutation du gène p53 a été détectée sur la biopsie avant traitement. La réponse histologique, évaluée sur les prélèvements effectués lors de l'intervention et sur environ 8 ganglions du curage ganglionnaire (effectué chez 47 patientes), était considérée comme complète s'il n'existait plus de cellule tumorale résiduelle au niveau du sein ou des ganglions, si la tumeur résiduelle était inférieure à 1 mm2 ou encore si elle est était intracanalaire. La réponse clinique était évaluée selon les critères internationaux : réponse totale, partielle ou stable.
Les résultats, après un suivi moyen de 17 mois (4-53), n'ont pas mis en évidence d'association entre la présence ou non de mutations du p53 et la réponse clinique. En revanche, la présence du gène muté est fortement corrélée à la réponse histologique. Aucune des 36 tumeurs possédant le gène non muté n'a régressé complètement. En revanche, parmi les 14 tumeurs positives pour la mutation p53, une réponse histologique complète a été observée pour 8 d'entre elles, la tumeur ayant été éradiquée dans 6 cas.
Selon les chercheurs, « les réponses incomplètes malgré la présence de mutations du p53 sont probablement dues au caractère non homogène des tumeurs. En effet, pour 4 d'entre elles, la mutation n'était que partielle (15-30 %), alors que la protéine p53 a été détectée en faible quantité ou était absente ».
La réponse histologique était d'autant meilleure que le grade était plus élevé, que les tumeurs étaient négatives pour les récepteurs estrogéniques, ou que le gène C-ERBB-2 était surexprimé. Cependant, l'analyse a montré que la présence de mutations du p53 avait une valeur prédictive meilleure. A la fin de l'étude, les 8 patientes semblaient en bonne santé.
C'est la première fois qu'une telle corrélation est retrouvée dans le cancer du sein. Ce résultat est sans doute dû à une meilleure sensibilité de la méthode employée : réponse histologique plutôt que réponse clinique ; détection des mutations sur des cultures de levures plutôt que mesure de la protéine p53 par immunohistologie.
L'épirubicine agit en activant via le p53 l'apoptose et/ou l'arrêt du cycle cellulaire. La mutation du gène empêcherait l'arrêt du cycle favorisant la réparation cellulaire.
« Lancet », vol. 360, 14 septembre 2002, pp. 853-854.
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