Il est bien admis que les facteurs reproductifs jouent un rôle dans le risque de cancer du sein. Mais les mécanismes biologiques ne sont pas encore clairement identifiés. L'étude de ces facteurs en fonction de l'âge et du statut ménopausique au moment du diagnostic devrait permettre de mieux les comprendre.
Cent mille femmes de la MGEN
Prises ensemble, les données de la littérature suggèrent qu'un jeune âge au moment des premières règles et un âge avancé au moment de la première grossesse menée à terme ont un impact plus important sur les cancers découverts avant la ménopause que sur les cancers découverts plus tard. A l'inverse, l'effet protecteur de la multiparité semble plus important pour les cancers survenant tardivement. Pour ce qui est de l'influence des avortements spontanés ou provoqués, elle est controversée.
Il était important d'en savoir plus que ces données issues d'un « poolage ». C'est dire tout l'intérêt d'une très grande étude conduite par Françoise Clavel-Chapelon (INSERM U521, institut Gustave-Roussy, Villejuif) et le groupe E3N-EPIC et publiée dans le « British Journal of Cancer ». Les données proviennent des observations de 1 718 femmes atteintes d'un cancer du sein, femmes qui faisaient elles-mêmes partie d'une cohorte de 100 000 femmes participant à l'étude E3N. Ces 100 000 femmes (assurées à la MGEN) étaient âgées de 40 à 65 ans à l'entrée dans l'étude. Le principal objectif de ce travail était de rechercher des facteurs de risque de cancer du sein et d'autres pathologies (maladies cardio-vasculaires, diabète, ostéoporose). Les participantes ont été enrôlées entre juin 1990 et novembre 1991, après avoir rempli un questionnaire (dont facteurs reproductifs, tabac, antécédents personnels et familiaux de cancers...).
Dans l'analyse des résultats, il est important de différencier les femmes en fonction de leur statut ménopausique à la survenue du cancer.
A chaque fois que l'âge des premières règles est retardé d'un an, le risque de cancer est diminué de 7 % pour les cancers survenus avant la ménopause (p = 0,001) : par rapport à celles qui ont été réglées à 11 ans ou moins, celles qui l'ont été à 15 ans ou plus avaient un risque relatif de cancer de 0,66. En revanche, pour les cancers survenus après la ménopause, le risque ne diminue que de 3 % par année supplémentaire (p < 0,05).
En ce qui concerne l'âge de la première grossesse menée à terme, le risque augmente de 4 % par an pour les cancers survenus avant la ménopause et de 2 % par an seulement pour les cancers survenus après la ménopause. Par exemple, une première grossesse menée à terme avant l'âge de 30 ans confère un risque relatif de 1,63 pour les cancers d'avant la ménopause et de 1,35 pour les cancers survenus après la ménopause.
Pour ce qui est des effets protecteurs de la multiparité, ils ne sont patents que pour les cancers survenus après la ménopause (respectivement : 0,79, 0,69, 0,66 et 0,64 pour une, deux, trois ou quatre grossesses et plus).
Enfin, cette étude n'a pas retrouvé d'influence des avortements spontanés sur le risque, que ce soit pour les cancers survenus avant la ménopause ou pour ceux survenus après.
« Ces résultats, indiquent les auteurs, confirment que le risque global de cancer du sein s'accroît avec l'abaissement de l'âge lors des premières règles, s'accroît avec une augmentation de l'âge lors de la première grossesse à terme et avec une faible parité. Toutefois, les effets de ces facteurs reproductifs diffèrent en fonction du statut ménopausique. L'âge des premières règles a un effet significatif sur le risque de cancer avant la ménopause. L'âge, lors de la première grossesse à terme, touche toutes les femmes mais l'effet se fait surtout sentir avant la ménopause. La parité a un effet protecteur significatif dans le sous-groupe postménopausique. »
« British Journal of Cancer », 2002. DOI : 10.1038/sj/bjc/6600124 www.bjcancer.com
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