Les résultats particulièrement intéressants ont incité le groupe indépendant des observateurs à arrêter prématurément l'étude, à faire connaître les résultats au public et à proposer aux femmes incluses dans le bras placebo de prendre le létrozole.
L'activité préventive oncologique du tamoxifène a été validée pour un traitement de cinq ans. Actuellement, après ce terme, il n'existe pas d'options thérapeutiques. Or on sait que plus de 50 % des récidives surviennent au-delà de cinq ans après le diagnostic initial.
L'étude internationale M-17 a été entreprise par le National Cancer Institute of Canada Trials Group (Kingston, Ontario) avec le concours des Laboratoires Novartis Phamaceuticals, pour évaluer l'effet du létrozole, donné pendant une durée de cinq ans, dans ce groupe de patientes qui étaient arrivées au terme des cinq ans de traitement par le tamoxifène.
Ont été incluses dans ce travail 5 187 femmes, dont 98 % présentaient des tumeurs positives pour les récepteurs estrogéniques. La moitié d'entre elles a reçu un placebo et l'autre une dose quotidienne de 2,5 mg de létrozole.
Analyse intermédiaire au bout de deux ans et demi
A l'analyse intermédiaire au terme d'un suivi moyen de 2,5 ans, les observateurs constatent dans le groupe Létrozole un résultat très significatif pour ce qui concerne l'objectif primaire, avec une diminution de 43 % du risque global de récidive comparativement au placebo (p < 0,00008). On a observé, à cette échéance, 75 cancers dans le groupe létrozole (récurrences locales ou métastatiques du cancer ou nouveau cancer dans l'autre sein) et 132 dans le groupe placebo. On observe une réduction de 46 % de la survenue de cancer controlatéral. Les auteurs calculent que, à quatre ans, le gains concernant le taux des femmes en survie sans récidive serait de 6 % dans le groupe sous létrozole comparativement au placebo (93 % versus 87 %, p < 0,001). S'il existe une augmentation du taux de survie globale, elle n'atteint pas la significativité (42 décès dans le groupe placebo et 31 dans celui sous létrozole, p = 0,25).
Deux éditoriaux sont adjoints à la publication. « L'ampleur estimée du bénéfice, correspondant à une différence de 5 % de survie sans maladie après trois ans de suivi, est substantiellement plus important que ce à quoi on s'attendait », indiquent deux spécialistes, « compte tenu de l'effet rémanent connu du tamoxifène après les cinq ans d'utilisation : le taux de récidive est réduit de 30 % par rapport à ce qui se serait produit avec la poursuite du tamoxifène. »
Dans ces textes, les spécialistes s'accordent à reconnaître le bien fondé de la publication anticipée des résultats. Mais ils avertissent : ces nouvelles données ne doivent pas être interprétées comme une recommandation thérapeutique, dans l'attente de plus ample informé. Les résultats de plusieurs travaux en cours examinant la question de la durée optimale et de la séquence des traitements par antagonistes des récepteurs de l'estrogène (comme le tamoxifène) et par inhibiteurs de l'aromatase, bloquant la synthèse de l'estrogène (comme le létrozole), sont attendus.
Inhibition de l'aromatase
Comme d'autres inhibiteurs de l'aromatase, le létrozole inhibe la conversion périphérique des androgènes en estrogènes et réduit de plus de 95 % les taux d'estrogènes circulants chez les femmes en postménopause. Il est nécessaire de prendre en considération les conséquences potentielles de la privation estrogénique de ces femmes, sur le plan cardio-vasculaire et ostéoporotique. Les données intermédiaires sur la tolérance du produit montrent une incidence de nouveaux diagnostics d'ostéoporose chez 5,8 % dans le groupe létrozole et de 4,5 % sous placebo (p = 0,07), mais le taux des fractures est similaire.
Paul Goss et coll. « New England Journal of Medicine », 349 ; 19, 6 novembre 2003.
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