De notre correspondante
à New York
Le cancer du sein est le plus fréquent des cancers chez les femmes, avec un risque de 10 % d'en développer un au cours de la vie. Et si le cancer de l'ovaire est plus rare (risque de 1,8 % sur toute la vie), il est l'un des plus mortels.
La plupart des cancers du sein et de l'ovaire sont sporadiques, mais certains résultent d'une prédisposition héréditaire, principalement liée aux mutations des gènes tumeur-suppresseur BRCA1 ou BRCA2 (BRCA = BReast CAncer).
Les femmes porteuses d'une mutation de BRCA1 ou BRCA2 ont un risque de cancer du sein et de l'ovaire beaucoup plus élevé que celui de la population générale. Cependant, l'amplitude de ce risque restait controversée.
Les chiffres définitifs de risque sont maintenant apportés par l'étude du New York Breast Cancer Study Group, étude menée par le Dr Mary-Claire King (université de Washington, Seattle), la célèbre généticienne qui a découvert le premier gène du cancer du sein héréditaire, BRCA1.
L'équipe a étudié 1 008 femmes chez lesquelles a été porté un diagnostic de cancer du sein à New York entre 1996 et 2000, quels que soient leur âge et leur histoire familiale de cancer. Chez ces 1 008 femmes, on a recherché des mutations de BRCA1 ou BRCA2. Puis tous les membres des familles des 104 femmes présentant une mutation BRCA1 ou BRCA2 ont été testés génétiquement.
Pour faciliter leur analyse moléculaire, les 1 008 femmes étudiées (probants) étaient toutes juives ashkénazes, une population dans laquelle seulement trois mutations représentent la majorité des mutations BRCA1/BRCA2.
« Les résultats sont probablement généralisables à toutes les femmes porteuses de mutations pathogènes BRCA1/BRCA2 qui ont un mode de vie similaire », affirment-ils néanmoins.
Des résultats importants pour le conseil génétique
Les résultats sont importants pour le conseil génétique. Les femmes porteuses de mutations BRCA1/BRCA2, testées en raison d'une parenté avec une femme ayant un cancer du sein, ont un risque de 82 % de développer un cancer du sein au cours de leur vie (lorsqu'elles seront arrivées à l'âge de 80 ans), ce qui est similaire au risque existant dans les familles à haut risque (avec plusieurs cas de cancer du sein). De plus, leur risque de développer un cancer de l'ovaire est de 54 %, ou de 23 %, selon qu'elles portent une mutation de BRCA1 ou de BRCA2, respectivement.
Des influences non génétiques
Le second résultat est que des facteurs de l'environnement pourraient influencer significativement le risque. En effet, le risque de cancer du sein à l'âge de 50 ans est de 24 % chez les femmes porteuses de mutations qui sont nées avant 1940, mais de 67 % chez celles qui sont nées après 1940. De plus, l'exercice physique et l'absence d'obésité pendant l'adolescence sont associés à une apparition retardée du cancer du sein.
« L'identification de ces influences non génétiques sur la pénétrance suggère de nouvelles directions pour les études d'oncogenèse associée a BRCA1/BRCA2 », concluent les investigateurs.
Selon deux commentateurs, les Drs Levy-Lahad (université de Jérusalem) et Plon (Baylor College of Medicine, Houston), « les résultats de cette étude suggèrent que le temps est venu pour la recherche d'examiner le dépistage des mutations BRCA1/2 dans la population générale, afin de déterminer si les risques de cancer sont suffisants pour justifier un dépistage systématique ».
« Science », 24 octobre 2003, p. 643.
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