« C'est la chose la plus intéressante qui se produise en cancérologie depuis Glivec », estime le principal investigateur de l'essai de phase 2, le Dr Mark Ratain, professeur de médecine et chef de pharmacologie clinique à l'université de Chicago. « Tous les patients de l'étude souffraient d'un carcinome rénal avancé et n'avaient pas répondu à au moins un traitement systémique ; pourtant, près de la moitié ont présenté une réponse rapide prometteuse à cet agent. »
Nouveau modèle de phase 2
L'étude valide une nouvelle approche pour conduire des essais de phase 2. Cet essai de « cessation randomisée » comprend deux phases : une phase d'induction de trois mois, durant laquelle tous les participants présentant divers types de cancers ont reçu le nouvel agent oral, appelé BAY 43-9006 (400 mg, deux fois par jour) ; dans la seconde phase, les patients qui ont une bonne réponse initiale (régression tumorale supérieure à 25 %) poursuivent le traitement ; ceux dont la maladie est stable (régression ou croissance tumorale inférieure à 25 %) sont randomisés au placebo ou au traitement pendant les trois mois suivants ; enfin, ceux qui ont une croissance tumorale supérieure à 25 % sont retirés de l'étude.
« Cette approche nous permet de tester un nouvel agent pour ses effets dans de nombreux types de cancer, puis de se concentrer sur les patients qui ont le plus de chances d'en bénéficier », explique le Dr Ratain, qui a conçu l'étude, la deuxième de ce type à ce jour. « Alors que le modèle standard de phase 2 peut prouver qu'un médicament est inactif, ce modèle peut prouver qu'un médicament ralentit la progression de la tumeur », ajoute-t-il. En outre, grâce à cette approche novatrice de phase 2, l'agent prometteur pourrait bien avoir été sauvé de l'obscurité. Il était prévu à l'origine qu'il joue un rôle dans le traitement du cancer du côlon. Mais sa faible efficacité chez 131 patients affectés du cancer du côlon aurait pu conduire à son abandon si ses effets dans le cancer rénal n'étaient apparus.
Les résultats préliminaires de l'essai de phase 2, commencé en octobre 2002, portent sur 50 patients avec un carcinome rénal avancé progressif, qui ont pu être évalués après trois mois de traitement.
Près de la moitié des patients (42 % ; 21/50) ont bien répondu, avec une régression tumorale supérieure à 25 % à trois mois ; six (12 %) ont eu une régression supérieure à 50 %.
Un quart des patients (13/50) présentent une stabilisation de la tumeur (dans les 25 % de la taille prétraitement). Les 32 % restants sont sortis de l'étude en raison d'une progression du cancer ou d'effets secondaires (rash douloureux, diarrhée).
Essai de phase III
Sur la base de ces résultats prometteurs, Bayer et Onyx, qui codéveloppent en partenariat le nouvel agent anticancéreux, ont entrepris un large essai de phase III international afin de confirmer l'activité de BAY 43-9006 dans le carcinome rénal. Plus de 800 patients avec un cancer rénal non opérable et/ou métastasé, qui n'ont pas répondu à un précédent traitement systémique, seront enrôlés. L'étude de phase III sera conduite par le Dr Ronald Bukowski, directeur du Cleveland Clinic Cancer Center (Etats-Unis).
La survie moyenne pour les patients présentant un cancer du rein avancé métastasé est inférieure à un an. Au stade avancé du cancer, la réponse (50 % de régression) à la chimiothérapie standard est inférieure à 10 %, et la réponse à l'immunothérapie (interféron alpha et IL2) est d'environ 15 %, avec la possibilité de rémission prolongée, mais aux dépens d'une toxicité importante.
Les résultats seront donc attendus avec impatience. « Il nous faut davantage de patients, des résultats à plus long terme et voir en particulier les résultats du groupe randomisé », souligne le Dr Walter Stadler, cancérologue à l'université de Chicago.
BAY 43-9006 est le premier agent connu qui cible à la fois la kinase Raf et le récepteur 2 pour le VEGF, et inhibe deux mécanismes essentiels impliqués dans la croissance tumorale. La kinase Raf est une enzyme clé dans une voie de signal importante pour la prolifération des cellules tumorales. VEGFR2 est un récepteur majeur pour le VEGF, qui joue un rôle clé dans l'angiogenèse.
Congrès de l'American Cancer Association, Boston.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature