Décision Santé-le Pharmacien Hôpital. Pour la première fois, des données positives ont été observées dans le cancer du pancréas. Peut-on parler de percée ?
Pr Emmanuel Mitry. Plutôt de résultats encourageants. Une amélioration significative a été observée dans une étude phase III randomisée où ont été comparés un pacitaxel de nouvelle génération suivi de l’administration de gemcitabine versus la gemcitabine seule. Depuis une dizaine d’années, de nombreux essais ont été lancés avec des associations thérapeutiques. L’objectif poursuivi était d’améliorer les résultats obtenus avec la gemcitabine seule. C’est la première fois qu’une association à base de gemcitabine enregistre une amélioration sur la survie globale et la survie sans progression dans le cancer du pancréas métastatique. Pour le critère de survie globale, elle s’élève à 8,5 mois dans le bras des patients traités par l’association versus 6,7 mois dans le groupe qui a reçu la gemcitabine seule.
D. S-P. H. Ces progrès ont été obtenus avec un simple taxane.
Pr E. M. Pas exactement. Il est administré sous une forme galénique particulière comprenant des nanoparticules d’albumine. Ce qui favorise sa pénétration au niveau des cellules tumorales. C’est la forme galénique de ce Nab-pacitaxel qui génère la différence. Au cours des derniers mois, l’association Folfirinox avait déjà montré sa supériorité face à la gemcitabine seule. Mais elle ne peut être prescrite chez les patients porteurs d’une cholestase avec ictère. En revanche, ce pacitaxel de nouvelle génération associé à la gemcitabine peut être prescrit chez ces patients fragiles.
D. S-P. H. Les promesses de la nanomédecine sont-elles enfin tenues avec la mise au point de ce nab-pacitaxel ?
Pr E. M. C’est encore un peu trop tôt. Cette nouvelle génération de pacitaxel avait déjà montré un intérêt dans le cancer du sein métastatique et le mélanome. C’est à ma connaissance la première fois que des nanoparticules associées à un médicament classique améliorent le pronostic dans un cancer redoutable avec une tolérance acceptable. Des informations circulent sur la mise au point d’un biomarqueur qui identifierait les patients répondeurs.
D. S-P. H. Des avancées ont-elles été observées dans d’autres types de cancer du pancréas ?
Pr E. M. Une étude anglaise a été menée dans le cancer du pancréas localement avancé, c’est-à-dire non métastatique et non resécable. Quel est le meilleur schéma thérapeutique dans cette population? À la radiothérapie faut-il associer la gemcitabine ou la capécitabine ? Les résultats plaident plutôt en faveur de la capécitabine. Elle serait mieux tolérée et générerait un meilleur taux de survie globale. Ce qui valide les pratiques cliniques françaises.
D. S-P. H. Des résultats ont également été annoncés dans le cancer colorectal, notamment chez les personnes âgées.
Pr E. M. On ne connaît pas le schéma thérapeutique optimal chez les personnes âgées porteuses d’un cancer colorectal métastatique. Les standards n’ont pas été évalués dans cette population. Mais au cours des derniers mois, des essais prospectifs, randomisés ont été réalisés dans ce sous-groupe de patients. Une première étude française présentée à l’Esmo à Vienne n’avait pas montré d’intérêt à associer le campto au 5 FU.
L’essai Avex, essai international de phase III réalisé chez les patients âgés d’au moins 70 ans, confirme en revanche la place du bevacizumab. Le protocole reposait sur l’administration d’une association capécitabine-bévacizumab toutes les trois semaines versus la capécitabine en monothérapie. Résultat principal, le bevacizumab améliore de manière statistiquement significative la survie sans progression. Cette amélioration ne s’est pas accompagnée d’une majoration insupportable de la toxicité. Certes, à ce jour, il n’est pas envisageable d’administrer le bevacizumab chez toutes les personnes âgées, notamment en raison du risque majoré d’accidents thromboemboliques. Mais la chimiothérapie classique associée à la thérapie ciblée se révèle supérieure à la chimiothérapie classique seule.
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