Jusqu'au début des années 1990, le traitement standard du cancer du larynx localement avancé était la laryngectomie totale. Ensuite, il y a eu une importante étape : l'étude du Department of Veterans Affairs Laryngeal Cancer Study Group, dans laquelle on a comparé, d'une part, la chimiothérapie l'induction (cisplatine plus fluoro-uracile) suivie de radiothérapie, d'autre part, la chirurgie avec radiothérapie adjuvante. Résultat : le larynx fut préservé chez 64 % des patients non opérés et la survie à deux ans fut identique (68 %) dans les deux groupes ; aucune différence de mortalité n'a été rapportée après plus de dix ans de suivi. Dès lors, la possibilité de préserver le larynx sans compromettre la survie a fait de la chimiothérapie d'induction suivie de radiothérapie une alternative à la laryngectomie dans le cancer laryngé localement avancé.
Il semblait nécessaire de déterminer la place respective de la chimiothérapie et de la radiothérapie.
L'essai RTOG 91-11 a donc été mis en place, dans le but de comparer trois traitements : induction par cisplatine plus fluoro-uracile puis radiothérapie en cas de réponse ; radiothérapie avec administration concomitante de cisplatine (notion selon laquelle les effets de la radiothérapie sur les cellules tumorales sont accrus en cas de traitement concomitant par le cisplatine) ; radiothérapie seule.
Les patients étaient éligibles s'ils avaient un carcinome à cellules squameuses de stade III ou IV du larynx glottique ou supra-glottique, relevant en principe de la laryngectomie. Entre août 19?2 et mai 2000, 547 patients ont été enrôlés et répartis au hasard dans l'un des trois groupes de traitement ; 518 ont pu être analysés.
L'objectif primaire était la préservation du larynx. Les autres objectifs analysés étaient la survie globale, la survie sans maladie, le contrôle local et locorégional, le délai de survenue des métastases à distance et la survie sans laryngectomie. Le suivi médian a été de 3,8 années.
Larynx intact au bout de deux ans dans 88 % des cas
Au bout de deux ans, la proportion de patients ayant un larynx intact après radiothérapie avec cisplatine concomitant (88 %) était significativement différente de celle observée dans le groupe chimiothérapie d'induction suivie de radiothérapie (75 % ; p = 0,005) et dans le groupe radiothérapie seule (70 % ; p < 0,001).
De même, le taux de contrôle locorégional a été significativement supérieur dans le groupe radiothérapie avec cisplatine (78 %) à celui de la séquence chimiothérapie d'induction puis radiothérapie ((61 %) et à la radiothérapie seule (56 %).
Quant aux métastases à distance et à la survie sans maladie, les deux protocoles à base de chimiothérapie faisaient mieux que la radiothérapie seule.
Pour ce qui est de la survie globale, les taux étaient similaires dans les trois groupes.
Une forte toxicité muqueuse
En ce qui concerne les effets toxiques de haut grade, ils ont été plus fréquents dans les deux groupes chimiothérapie (82 % pour le couple radiothérapie et cisplatine et 81 % pour la séquence chimiothérapie d'induction puis chimiothérapie).
Enfin, la toxicité muqueuse de l'administration concomitante de la radiothérapie et du cisplatine a été près de deux fois plus importante que celle observée dans les deux autres groupes.
« Chez les patients ayant un cancer laryngé, la radiothérapie avec administration concomitante de cisplatine est supérieure à la chimiothérapie d'induction suivie de radiothérapie et à la radiothérapie seule pour la préservation laryngée et le contrôle locorégional », concluent les auteurs.
Pour eux, « la radiothérapie avec cisplatine concomitant devrait être considérée comme le traitement standard des patients souhaitant conserver leur larynx, et dont le cancer rentre dans la catégorie de ceux analysés dans l'étude », et la laryngectomie devrait n'être pratiquée que dans un but de « sauvetage ».
Ils insistent sur le fait que cette conclusion s'applique seulement aux patients ayant une maladie de stade III ou IV, mais pas aux patients ayant un envahissement significatif de la base de la langue ou une grosse destruction cartilagineuse.
Ariene Forastiere et coll. (Etats-Unis). « New England Journal of Medicine » du 27 novembre 2003, pp. 2091-2198.
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