Le traitement des cancers du côlon de stade III (envahissement ganglionnaire) fait appel à la chirurgie suivie d'une chimiothérapie adjuvante par fluoro-uracile/leucovorine ou fluoro-uracile/levamisole durant six à huit mois. On sait, en effet, que le risque de récurrence dans les cinq ans est élevé et que la chimiothérapie réduit d'un tiers le risque de décès dus au cancer. Néanmoins, malgré le bénéfice reconnu en termes de survie de la chimiothérapie adjuvante, très peu de patients âgés en bénéficient. Aux Etats-Unis, seulement 48 % des 65-74 ans et 24 % des 80-84 ans ont eu une chimiothérapie adjuvante pour un cancer avec envahissement ganglionnaire. Une multitude de raisons (comorbidité, défaillance viscérale ou mentale, crainte de toxicité) peuvent expliquer l'absence de chimiothérapie. « Pourtant, expliquent les auteurs d'une publication récente sur le sujet, la plupart des plus de 75 ans sont autonomes et ont une espérance de vie sans cancer de dix à douze ans. Il n'y a donc pas de raison de ne pas proposer une chimiothérapie adjuvante à une population sélectionnée de septuagénaires, voire d'octogénaires. »
C'est précisément ce que le Dr Sargent, de la Mayo Clinic, a voulu prouver dans son travail à partir de sept essais cliniques randomisés de phase III. L'analyse statistique a pris soin de sélectionner rigoureusement des personnes âgées « en bon état général », c'est-à-dire indemnes d'insuffisance médullaire, rénale ou hépatique, et avec un minimum de symptômes liés au cancer. Sur 3 351 patients, la survie et les complications cliniques après traitement d'un cancer colique (de stade II,III) ont été comparées en fonction de l'adjonction ou non d'une chimiothérapie avec du fluoro-uracile. Chaque critère était analysé dans quatre tranches d'âge : moins de 50 ans, 51-60 ans, 61-70 ans et plus de 70 ans.
Les résultats sont bons : l'adjonction d'une chimiothérapie chez des patients âgés allonge significativement la survie comme chez des patients plus jeunes. Le bénéfice est retrouvé pour 38 % des 61-70 ans et 15 % des plus de 70 ans. Le nombre de décès dus au cancer était le même dans toutes les tranches d'âge. Néanmoins, les plus de 70 ans étaient logiquement plus nombreux à mourir d'autres causes (13 %) que les moins de 50 ans (2 %).
Des critères d'exclusion sévères
La toxicité (nausée, vomissement, diarrhée, stomatite) était la même chez les personnes âgées. La seule différence notoire était la fréquence des leuconeutropénies plus importantes chez les sujets âgés. Le rapporteur de l'étude, qui titre son article « L'âge n'est pas une barrière au traitement du cancer du côlon », reconnaît toutefois avoir appliqué des critères d'exclusion sévères pour ne garder que des candidats âgés en bon état général physiquement et mentalement, valides et entourés socialement. On ne sait pas encore comment pourrait interférer le fluoro-uracile avec un organisme défaillant. Dans cet essai, seulement 0,7 % des sujets avaient plus de 80 ans ; difficile, donc, de tirer des conclusions pour les octogénaires.
« N Eng J Med », du 11 octobre 2001.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature