C'est reparti pour un tour. Les dirigeants des caisses et des cinq centrales de médecins libéraux se reverront les 17 janvier et 6 février pour deux nouvelles séances de négociations conventionnelles, puisqu'ils se sont quittés jeudi 12 décembre, au petit matin, sur un constat de désaccord sans rupture. Ils se sont donné en fait jusqu'au 31 mars pour parvenir à un accord.
L'actuelle convention des médecins généralistes, qui devait arriver à échéance le 31 décembre, sera donc « reconduite par tacite reconduction ». Pour les spécialistes, toujours soumis au règlement conventionnel minimal (RCM), les syndicats médicaux et les caisses demandent conjointement au gouvernement de suspendre encore jusqu'au 31 mars leurs pénalités financières (réduction de la participation des caisses aux cotisations sociales).
L'échec des négociations, qui s'ajoute à celui de l'accord cadre interprofessionnel destiné à l'ensemble des professions de santé libérales (voir page 5), est d'autant plus cinglant que l'espoir d'un accord était grand. A défaut de finaliser une convention, les caisses et les médecins libéraux espéraient du moins fixer les « axes stratégiques » d'une rénovation de leurs relations.
Lors de la dernière séance de négociation nocturne, les caisses ont proposé dans un document de travail quelques mesures d'urgence, en particulier la prise en charge, au 1er janvier 2003, des deux tiers des primes d'assurance en responsabilité civile professionnelle (RCP) des médecins du secteur I quand ces primes sont égales ou supérieures à 1 000 euros par an. Les caisses proposaient d'étendre la prise en charge des primes de RCP à tous les médecins libéraux à partir de 2004, dans le cadre d'un contrat de groupe, mis en place par les partenaires conventionnels afin de limiter la hausse des tarifs d'assurance.
Les caisses avaient aussi proposé, dans le cadre d'un contrat de pratique professionnel, un forfait annuel de 3 500 à 6 000 euros au titre de « la coordination et du suivi opératoire », ainsi que le principe d'un forfait d'astreinte pour les gardes effectuées en clinique.
La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) a mis son veto à ces « rustines », évaluées à 150 millions d'euros par les caisses, alors que la confédération espérait un effort financier de 500 millions. Pour la CSMF, qui évalue à seulement 40 millions d'euros l'effort consenti par la CNAM (voir l'interview de Michel Chassang en page 4), on est en tout cas loin du compte.
L'échec d'une méthode
De son côté, le Syndicat des médecins libéraux (SML) « veut croire que cet échec est celui d'une méthode » et que les prochaines négociations « permettront d'aboutir à une nouvelle architecture conventionnelle ».
La Fédération des médecins de France (FMF) déplore que son cheval de bataille, la réouverture du secteur II, ait été « exclu » des propositions des caisses et que les « revalorisations tarifaires (soient) remises aux calendes grecques ». Quand à la prise en charge partielle de la RCP, la FMF n'y voit qu'un « nouveau lien de subordination » pour les médecins libéraux.
MG-France regrette que « près de 150 millions d'euros ne (soient) pas mis à la disposition des confrères dès janvier ». Ce syndicat de médecins généralistes « appelle les syndicats médicaux de spécialistes à se retrouver pour que les négociations aboutissent à des résultats concrets pour chaque professionnel ».
Le Dr Félix Benouaich, président d'Alliance, est d'autant plus déçu que les propositions de son syndicat « ont été actées » par les caisses.
Quoi qu'il en soit, les négociations vont reprendre l'an prochain dans un climat moins cordial.
Le Dr Jean-François Rey, président de l'UMESPE branche spécialiste de la CSMF, envisage d'organiser chez les spécialistes « des mouvements de protestation » qui iraient crescendo« jusqu'au 6 février ». « L'intensification des moyens de pression » des spécialistes sur les caisses doit aussi passer, selon le Dr Rey, par l'arrêt total de la télétransmission des feuilles de soin électroniques et par « une large utilisation du DE » (dépassement pour exigence particulière du malade) en secteur I, « puisque les caisses ne sont pas capables de revaloriser leurs tarifs », bloqués depuis huit ans. « On est furieux, on a l'impression qu'on nous balade depuis sept mois » (1), explique le président de l'UMESPE.
Par ailleurs, le contexte n'est guère favorable en raison de la dégradation des comptes de la Sécu. A cet égard, la Mutualité sociale agricole (MSA, deuxième régime d'assurance-maladie), qui est « profondément déçue » par l'échec des dernières négociations, « craint, à présent, que la conjoncture économique et budgétaire 2003 ne rende plus délicates les discussions à venir ».
Enfin, les syndicats médicaux ne doivent pas compter sur un coup de pouce immédiat de Jean-François Mattei pour faire pression sur les caisses d'assurance-maladie. Le ministère de la Santé a en effet précisé qu'il n'entend « pas intervenir pour l'instant de quelque manière que ce soit », préférant « laisser négocier » les médecins et les caisses.
(1) C'est-à-dire depuis l'accord du 15 mai qui marque la reprise du dialogue des spécialistes avec les caisses.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature