DE NOTRE CORRESPONDANT
AU COURS du Forum européen de la santé, qui s’est tenu récemment à Bad Hofgastein, en Autriche, les responsables de la Commission européenne ont débattu avec les organisations de professionnels et de patients des principaux aspects des dossiers relatifs aux soins transfontières. Ces organisations sont en effet appelées à donner leur avis sur les projets d’ici à la fin de janvier, afin qu’un texte législatif puisse voir le jour courant 2007. Au-delà de ses dispositions principales, le futur texte abordera le problème de la responsabilité des prestataires, notamment en matière de sécurité et de préjudice, et veillera à garantir un système équilibré, notamment dans les régions frontalières : les dentistes hongrois, par exemple, accueillent un tiers de patients étrangers, surtout autrichiens, parce qu’ils sont moins chers, mais il ne faut pas que cette habitude pénalise les patients locaux.
De même, dans certaines régions touristiques, les médecins reçoivent parfois autant de patients étrangers que d’autochtones, ce qui peut perturber la distribution de soins. Il importe, à l’inverse, d’éviter que des régions se « démédicalisent » au profit des régions limitrophes situées dans le pays voisin. Le texte abordera les problèmes éthiques, de même que les demandes d’euthanasie dans un pays où celle-ci est autorisée, ou encore la délivrance de la pilule du lendemain aux mineures ressortissantes d’un pays où elle est interdite.
La France plébiscitée.
La Commission présente sa nouvelle « stratégie pour la santé », qui entend renforcer la prévention et la promotion de la santé, en particulier chez les jeunes, et face à l’alcool, aux drogues et au suicide. Elle vise à améliorer la sécurité sanitaire en Europe, de même que la coordination des politiques, tout en mettant au point des études et des indicateurs sur la santé.
Mais l’Europe de la santé se construira parce que les pays européens n’ont plus les moyens, séparément, d’assurer l’ensemble des soins de leur population, ont montré plusieurs autres sessions du forum. Comme l’a rappelé Mukesh Chawla, économiste à la Banque mondiale, l’Europe dépense aujourd’hui 9,3 % de son PIB pour sa santé, et ce chiffre passera à 16 % dans quinze ans. Elle devra «faire mieux avec moins de ressources», a-t-il poursuivi, en soulignant que le principal facteur d’augmentation des coûts n’est ni le vieillissement, ni le médicament, ni l’hôpital ou le corps médical, mais la mauvaise gestion. Selon l’OMS, si les ressources actuelles allouées à la santé étaient correctement utilisées, les Occidentaux vivraient en moyenne dix à quinze ans de plus sans affections ou maladies graves, tandis que l’espérance de vie des Africains augmenterait de plus de vingt-cinq ans.
Toujours selon Mukesh Chawla, le mode de financement de la santé importe moins que la manière dont elle est gérée : le Canada dispose, par exemple, d’un système public bien moins performant que le système public suédois, pourtant ultra-réglementé, mais presque aussi cher que le système suisse, qui est privé et très efficace. Pour lui, l’avenir passe par une conjonction des modèles publics et privés, car aucun système ne peut plus fonctionner de manière indépendante.
Vu sous l’angle des consommateurs, c’est le système français qui recueille le plus de suffrages, notamment en raison de sa très bonne accessibilité, un atout qu’il partage avec l’Allemagne, la Belgique et le Luxembourg. Le « classement » effectué par une association européenne de patients, Health Powerhouse, place la France en tête des meilleurs systèmes, juste devant les Pays-Bas et la Suède, tandis que les Tchèques et les Lituaniens sont les plus mécontents du leur. Enfin, la Slovénie et l’Estonie recueillent la palme du meilleur rapport qualité/prix, grâce au niveau de prestations qu’elles offrent par rapport aux budgets qu’elles consacrent à la santé.
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