De notre correspondante
à New York
Il y a trente ans, des brûlures couvrant plus de 30 % de la surface corporelle étaient universellement létales. Aujourd[226]hui, grâce aux techniques d'excision chirurgicale précoce des tissus brûlés et de fermeture des plaies avec des greffes cutanées, de nombreux patients survivent et ont une bonne qualité de vie.
Toutefois, malgré une réanimation rapide et efficace, certains aspects de la réponse post-traumatique ne sont pas bien contrôlés, notamment le catabolisme protéique. En effet, tout patient sévèrement brûlé développe une réponse hypermétabolique, principalement médiée par les cathécholamines endogènes (dont le taux plasmatique est multiplié par un facteur 10). Cette réponse s'accompagne d'une augmentation de la dépense d'énergie basale et d'un catabolisme des protéines des muscles squelettiques (dégradation plus rapide que la synthèse).
Une fièvre et une tachycardie
L'enfant sérieusement brûlé ne fait pas exception. Dans les premiers jours après la brûlure, il développe une fièvre et une tachycardie. Puis, dans les semaines suivantes, en dépit d'une fermeture des plaies et d'un bon apport nutritionnel, sa masse musculaire fond visiblement. Il faudra plusieurs mois pour observer, durant la convalescence, une augmentation progressive de la masse musculaire et une recharge des réserves en graisse.
Herndon et coll. (Shriners Hospitals for Children, Galveston, Texas) ont examiné si le blocage de la stimulation bêta-adrénergique par le propranolol peut diminuer la réponse post-traumatique chez des enfants atteints de brûlures étendues (toutefois sans lésion d'inhalation sérieuse et ne nécessitant pas de ventilation assistée). Ils ont conduit une étude randomisée chez 25 enfants sévèrement brûlés (plus de 40 % de la surface corporelle totale) et vus moins d'une semaine après la brûlure. Dans les quarante-huit heures de l'admission, les enfants ont subi une première opération, puis une seconde six à dix jours après. Immédiatement après la deuxième intervention, 13 des enfants ont reçu du propranolol par voie orale (sonde gastrique) pendant au deux à quatre semaines. La dose a été ajustée de façon à baisser la fréquence cardiaque de repos de 20 % de la valeur initiale. Douze enfants ont été randomisés et comparés à un groupe témoin non traité. Chez les enfants recevant le propranolol, la dose initiale de 0,33 mg/kg/4 heures a été élevée à, en moyenne, 1 mg/kg/4 heures.
Les investigateurs ont mesuré, avant le traitement bêtabloqueur et deux semaines après, la dépense énergétique au repos et la cinétique des protéines du muscle (étude cinétique de la phénylalanine marquée, pendant cinq heures, avec biopsie répétée au niveau de la cuisse). La composition corporelle a été mesurée à diverses reprises pendant l'étude (par scintigraphie corporelle totale du potassium pour déterminer la masse maigre, et par absorptiométrie).
Une baisse significative du métabolisme basal
Les enfants dans les deux groupes étaient similaires (âge, poids, quantité de surface brûlée et délai entre la brûlure et l'étude métabolique). Les 13 enfants traités par propranolol ont tous présenté une baisse significative de la fréquence cardiaque et du métabolisme basal, en comparaison des valeurs initiales et en comparaison des témoins. Douze de ces 13 patients ont aussi présenté une amélioration de l'équilibre protéique musculaire. Le propranolol a diminué le catabolisme protéique musculaire. Tandis que l'équilibre protéique s'est accru de 82 % dans le groupe propranolol, il s'est abaissé de 27 % dans le groupe témoin. La masse maigre n'a pas changé dans le groupe propranolol, mais a significativement diminué (9 %) dans le groupe témoin.
« Ces effets devraient sans doute améliorer la force des patients et leur possibilité de récupérer », déclarent les investigateurs. « Lorsque le propranolol est donné à des doses qui diminuent la fréquence cardiaque d'environ 20 % de sa valeur initiale, sous une étroite surveillance, ce traitement est sûr, facilement administré et efficace. »
« Comme le préconisent les auteurs, ce nouveau traitement devrait être utilisé avec prudence et seulement en USI », note le Dr Sheridan (Shriners Burns Hospital, Boston) dans un éditorial.
« New England Journal of Medicine », 25 octobre 2001, pp. 1223 et 1271.
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